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Ce texte est extrait du #26 spécial Médias sociaux
Les réseaux sociaux ont bouleversé notre quotidien. La vie de plusieurs s’est littéralement transformée grâce — ou à cause de —Facebook et Twitter. Après le tremblement de terre à Haïti, Rachelle Houde est devenue «geek sans frontières».
«Le 12 janvier dernier, en rentrant du travail, ma vie a changé. J’ai appris sur Twitter qu’il y avait eu un tremblement de terre en Haïti. On pouvait lire des tweets du genre: “Je suis à Port-au-Prince et j’ai besoin d’aide”. Je ne comprenais pas trop d’où venaient ces messages, comment et par qui ils avaient été envoyés. Je me suis mise à faire des recherches, à fouiller sur Internet, et je suis tombée par hasard sur haiti.ushahidi.com, un genre de 911 sur le Web, qui utilise des cartes géographiques fonctionnant avec les systèmes gps. En moins de 24 heures, je suis devenue bénévole pour le site. Je ne sais pas trop pourquoi je me suis embarquée là-dedans, mais pour moi, à ce moment-là, c’était ça qu’il fallait que je fasse, c’est tout.
Les ONG qui essayaient d’intervenir à Haïti étaient complètement perdues, parce qu’avant cette crise-là, personne n’avait pensé à cartographier les bidonvilles de l’île. Mais comme beaucoup d’Haïtiens ont un téléphone cellulaire muni d’une fonction gps, ils étaient en mesure de nous fournir leurs coordonnées exactes, et les bénévoles comme moi s’occupaient de les retransmettre aux organisations.
Sur Twitter, je lisais des tweets comme: “Je suis dans tel orphelinat et on va bientôt manquer d’eau potable”. Ma mission, c’était de m’assurer que cette info se rende jusqu’aux bonnes personnes. Je suis entrée en contact direct avec les ONG, je tâchais de faire le suivi avec elles. Oxfam et World Water Relief ont pris mes appels au sérieux. Malgré tout, à un moment donné, je me suis demandé si ce que je faisais servait réellement à quelque chose. J’ai vite eu ma réponse: un pasteur baptiste m’a envoyé une photo de lui, dans un orphelinat, avec la cargaison de bouteilles d’eau que j’avais demandée la veille. J’ai braillé comme un bébé quand j’ai vu cette image.
J’ai passé des heures, des jours à faire ça. Je ne voyais plus le temps passer, au plus grand désespoir de mon chum, qui ne saisissait pas trop ce qui me prenait. J’avoue que moi-même, je n’ai pas vraiment encore compris comment je me suis ramassée là. Je ne suis pas une travailleuse humanitaire et je n’avais jamais fait de coordination de situations d’urgence, mais là, j’ai senti que je pouvais faire ma part, à ma façon. J’ai suivi la vibe, c’est tout.
Je travaillais toute seule dans mon salon, mais j’étais loin d’être seule en fait: il y avait des centaines de bénévoles qui utilisaient Skype, Facebook et Twitter pour communiquer. Beaucoup de gens, qui appartiennent à des générations un peu plus vieilles, pensent qu’on utilise Twitter et Facebook juste pour son plaisir personnel et égoïste. Mais dans ce cas-ci, les réseaux sociaux ont prouvé qu’ils pouvaient servir à beaucoup plus.
La technologie s’est trouvée une nouvelle fonction que ses inventeurs n’avaient même pas prévue. Et moi, je me suis trouvé une nouvelle vocation qui n’était absolument pas dans mes plans: je suis devenue “geek sans frontières”. Depuis ces événements, on me demande de participer à des colloques sur l’avenir des réseaux sociaux dans les efforts humanitaires, la marine américaine suit toujours mes tweets et Alyssa Milano m’a même envoyé un tweet de remerciement. »
La suite à lire dans le #26 spécial Médias sociaux.
Autre témoignage de Pile ou Face : Patrick Delisle-Crevier, Francine Deshaies.
Extraits du #26 Médias sociaux : Nouveau salon mortuaire, la brebis noire, portrait non autorisé, Grandeur et décadence de l’empire Myspace, Les impokables, Facebook nous rend-il heureux, Qui sont nos amis, FB étiquette, Pierre Coté est spécial, Le tour du monde en 2.0 secondes, 35 rules on Facebook.