La chute de Marvel
La chute de Marvel
Thomas Bédard vous explique pourquoi les héros ne volent plus très haut
Marvel a longtemps eu le dessus sur DC Comics, qui eux rushaient à construire et à entretenir un univers qui faisait du sens au fil de leurs productions. Mais me voilà forcé de constater, qu’une seule longue histoire qui dure depuis 15 ans, ça s’en vient pas mal aussi redondant que ton mononcle qui te conte une nouvelle anecdote de son passé 2-3 fois par année dans les soupers de famille.
Les vrais le savent (même s’ils n’osent pas l’avouer) : depuis Endgame, Marvel a beaucoup de mal à garder sa cadence, sa qualité… et son audience.
ACTE I : La Cadence
De 2008 à 2016, Marvel lance les premiers opus de son univers cinématographique avec éclat. En même temps, c’est facile de se démarquer à une époque où ta seule compétition, c’est les films d’Adam Sandler et les quatre Alvin & les Chipmunks.
Au rythme de un à deux films par an, la franchise connaît rapidement un succès retentissant, tant auprès des spectateurs que des critiques et insuffle un vent de fraîcheur aux salles obscures . Aller au cinéma pour voir le dernier Marvel était devenu synonyme de party. Chaque opus solo est un bon apéro et chaque Avengers, un fucking gros open-house.
De 2017 à 2019, Marvel atteint son apogée. Thanos domine l’univers 616 et par le fait même, le nôtre. Trois films (trois blockbusters) par an deviennent la norme. Infinity War déclenche une tempête chez les fans, les préparant pour la Phase Finale (qui, comme on le sait très bien aujourd’hui, n’était pas DU TOUT la phase finale).
Avengers : Endgame débarque en salles, provoquant l’euphorie. Plusieurs le qualifie du « plus grand film du siècle », alors que le siècle en question est à peine entamé. Capitaine America qui attrape le Mjölnir de Thor, prononçant enfin la phrase tant attendue : « Avengers, assemble!. » déclenche dans les salles de véritables festivités. Tout le monde se lève, braille et hurle de joie devant l’une des plus grandes scènes de combat jamais produites sur écran géant. Ce jour-là, les geeks avaient enfin trouvé leur équivalent d’un night club.
Une époque dorée. Et puis bam : Phase 4, pandémie.
De 2021 à 2023, les choses se gâtent un peu.
D’abord, Marvel mise gros sur Disney+ avec des tonnes et des toooooonnes de séries telles que WandaVision, Falcon & The Winter Soldier, Loki, Hawkeye et j’en passe (vraiment, ça n’arrêtait plus). Le globe est en quarantaine, on a rien d’autre à câlisser, alors on embarque! Mais…
ACTE II : La Qualité
Des scénarios de moins en moins révolutionnaires, plus médiums que saignants, une pertinence parfois en berne. Chaque film semblait servir de teaser pour le prochain film qui sortirait dans six mois,. Et surtout, SURTOUT… les effets spéciaux deviennent exponentiellement bas de gamme et vite faits.
C’est connu, les artistes travaillant sur les VFX de Marvel sont épuisés, au bord du burn-out. Leurs conditions de travail sont inexistantes, et les employés sont entassés autourde trois ordinateurs, submergés de canettes de Red Bull vides dans un cubicule sans fenêtre, dans l’espoir de rendre trois films et deux séries pour la veille.
Bien entendu, ce n’est pas de leur faute, mais le public s’en est bien évidemment rendu compte à quelques reprises. En commençant par Moon Knight… pour ensuite y aller de pire en pire. Du troisième œil sur le front de Doctor Strange à l’épouvantable SheHulk qui semblait avoir été produite en parallèle à Une vie de bestiole en 1998, jusqu’à l’abominable Quantumania, aussi appelé Shark Boy & Lava Girl 2.0.
Pour vrai, si t’as pas vu à quoi ressemble MODOK dans ce film, tu fais partie des chanceux qui trouvent encore qu’une baby face, c’est cute.
La gang des VFX était tellement décrissée que la production de Secret Invasion a utilisé l’intelligence artificielle pour concocter le générique d’intro de la série. L’A-RRO-GANCE, toé chose. C’est comme si les travailleurs des services publics au Québec se plaignaient de leurs conditions médiocres et qu’au lieu de les aider, le gouvernement dépensait des millions de dollars pour accueillir une équipe de hockey à Québec.
Oh, wait.
ACTE III : L’Audience
En plus de tout ça, les fans critiquent les scénarios simplistes et répétitifs ainsi que la tournure enfantine et Disney-ish que certains personnages ont prise. Rien ne va plus.
Bob Iger, PDG de Disney, a annoncé que la méga-compagnie essuierait des pertes avoisinant les 900 millions de dollars en 2023 en raison de ses piètres performances au box-office. On le voit actuellement avec The Marvels qui a enregistré les pires recettes jamais générées par la franchise.
Ben voyons donc? Le film qui nécessite d’avoir vu WandaVision, Miss Marvel, Captain Marvel, Secret Invasion et, idéalement, les quarante autres films ne séduit pas les foules? J’EN AI MON VOYAGE!
Oui, au départ, on trouvait ça cool, un univers de cette envergure. Mais après près de 15 ans à suivre le même pattern, le superhero fatigue commence à se faire sentir. Comme je l’ai mentionné en juillet dernier avec le phénomène Barbenheimer, les gens veulent toujours aller au cinéma, mais peut-être plus seulement pour des adaptations en live-action de bandes dessinées (au grand bonheur de Martin Scorsese).
Comme dans n’importe quoi, y faut savoir quand la sauce a été assez étirée. Si la sauce générait toujours des milliards comme avant, je comprendrais. Sauf que là, la sauce, elle s’en vient frette et pâteuse. Le mononcle est à court d’anecdotes palpitantes.
Alors, chers Bob Iger & Kevin Feige, je sais que ça va être tough, mais il est peut-être temps de tirer la plug?