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S’excuser après avoir dit une shit raciste
On dit que c’est en se parlant qu’on va se comprendre. Alors que les enjeux entourant le racisme systémique sont sur toutes les lèvres, certains livreront des discours inspirants avec éloquence, certains vont dire de la marde.
Quand on fait un commentaire raciste, que ce soit intentionnel ou non, une fois que c’est dit, c’est dit. Et ça se répand sur les murs de nos fils Facebook. Mais une fois que le mal est fait, mettons qu’on vous fait remarquer que c’est un commentaire de marde ou que vous vous en rendez compte tout seul, je crois qu’il n’est jamais trop tard pour revenir sur vos propos. Encore faut-il que vous posiez des gestes concrets pour démontrer votre volonté d’apprendre.
Alors, comment s’excuse-t-on après avoir dit une shit raciste?
Captures d’écran à l’appui, j’ai envie de vous donner en exemple des excuses qui m’ont été suffisantes dans une situation qui m’a mise en criss.
Des insultes sorties de nulle part
Ma page Facebook est constituée généralement de blagues. Il m’arrive de parsemer des statuts sérieux de temps en temps, quand il y a des choses dans l’actualité qui doivent être dites. Les propos que je tiens habituellement m’évitent beaucoup de jambons. Donc, en général, les débats demeurent civilisés sous mes jokes ou mes publications sérieuses.
Le silence de presque tous mes proches devant la question importante de Black Lives Matter m’attristait. Alors j’ai écrit ce statut :
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Et là. Bang :
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Quand ce genre de situation m’arrive, je ne sais pas quelle émotion surgit en premier ni même laquelle est la plus forte. Je ne suis submergé d’incompréhension, de découragement, de désillusion, de désolation, de rage et de tristesse en même temps.
Si je m’étais écouté sur le coup, j’aurais répondu : « Si tu veux être raciste, peux-tu au moins être raciste sans te tromper géographiquement dans tes insultes? Je suis né en Colombie! »
«Si tu veux être raciste, peux-tu au moins être raciste sans te tromper géographiquement dans tes insultes? Je suis né en Colombie!»
J’ai pris quelques secondes pour me ressaisir. J’avais lancé une discussion avec ma publication, j’avais l’impression que je devais répondre quelque chose. Je sais que les insultes directes ne donnent rien, alors j’ai finalement opté pour une réponse qui partait de mes impressions :
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Une réplique vraiment stupide
Je me suis dit qu’en l’interpellant par son prénom, je serais en mesure de lui faire comprendre que son commentaire n’avait aucune calice d’allure. Est-ce que ça a marché? Non. Même que sa réaction a été de me dire de me calmer!
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Étrangement, j’ai été soulagé. Je n’avais pas affaire à un raciste, juste à un épais sans jugement. Fiou!
Sauf que. Sauf que je me fais insulte-splainer et ça m’apaise. Il me semble que ça n’a aucun sens!
Je suis passé tout près d’y aller d’une réplique du genre : « À quoi tu penses tabarnak??? Que je connais toutes les lignes de tous les monologues de tous les humoristes du Québec??? »
Ensuite, je suis passé par la phase sarcastique avec l’envie d’écrire : « Oups, mon erreur! J’aurais dû en effet le savoir hein! Je suis tellement niaiseux! »
Finalement, j’ai opté pour quelque chose de clair, de direct et de premier niveau. J’ai décidé de lui expliquer la situation comme s’il avait 8 ans et qu’il venait de voler un biscuit pour le manger avant souper :
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Et surprise : des excuses!
Quelques minutes plus tard, quelle ne fut pas ma surprise de voir ce message apparaître dans mon inbox :
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Ses excuses ne sont pas parfaites, mais je ne cherche pas la perfection. Je veux juste que la personne réalise l’ampleur de sa bêtise et que je puisse passer à un autre appel au plus vite.
J’ai accepté ses excuses parce qu’elles contiennent des éléments de bases :
1— Il exprime du remords
Des excuses sans les mots je m’excuse ou désolé ne sont pas des excuses.
Les pires excuses contiennent des formules du genre « Je m’excuse, mais » ou « Je suis désolé que tu te sois senti comme ça ». Essentiellement, ça sonne fake. Ça revient à dire « Je n’aime pas que tu sois tu sois fâché après moi » au lieu « Je regrette de t’avoir fait du tort ».
Ne sonnez pas comme « Je suis désolé de m’être fait prendre », c’est la version adulte de « Je suis désolé que tu sois allé brailler à maman ».
Ça ne donne rien de livrer de fausses excuses. Les déclarations passives agressives qui cachent un genre de sorry not sorry ne démontrent que de l’entêtement. Ça veut dire « J’avais raison et c’est plate que tu sois heurté, mais je tiens absolument à réitérer que j’avais raison ».
2— Il reconnaît que c’est de sa faute
Les gens dans l’erreur ont souvent tendance à vouloir justifier leurs intentions. Bien que ça puisse être inclus dans des excuses, ça peut se retourner contre vous et sonner comme une justification. Et ça, ça recentre la discussion sur la personne qui a commis l’acte plutôt que celle qui l’a subi.
Aussi, remarquez à quel point ses excuses sont courtes. Je ne veux pas un roman. Je ne veux pas une maîtrise. Je ne veux pas son journal intime. Je ne suis pas son psy. J’ai assez de ma vie à gérer en plus de toutes les émotions que j’ai vécues. Je m’en fiche de savoir ce qui l’a mené à poser ce geste.
Si vous pilez sur le pied de quelqu’un, que ce soit parce que vous aviez une grosse boîte dans les mains, que vous regardiez ailleurs, qu’un oiseau vous a distrait, que quelqu’un d’autre vous a poussé dans le dos, vous avez pilé sur le pied de quelqu’un. Vous vous excusez. Point.
Il assume sa faute et reconnaît avoir agi en épais. C’est tout ce dont j’ai besoin.
3— Il fait amende honorable
Des paroles ne valent rien si elles ne sont pas suivies d’actions concrètes. Comme il s’agit d’un total inconnu, le fait de m’écrire en privé et de retirer son commentaire initial me suffit.
S’il y avait eu des répercussions découlant de ses gestes, il aurait dû tenter de les amoindrir ou de compenser les conséquences qui auraient suivi, un don à un organisme par exemple.
Des excuses acceptées sont acceptées, duh
Peut-être que certains trouvent que ses excuses n’atteignent que la barre la plus basse, mais je suis en paix avec ce qu’il m’a écrit. Ses excuses me suffisent. Je veux juste fermer le couvercle sur cette situation et la ranger dans l’armoire des affaires désagréables qui me sont déjà arrivées.
Il peut arriver dans ce genre de situations que des gens viennent rajouter leur grain de sel. Certains veulent être encore plus fâchés que la personne concernée, même lorsque celle-ci déclare que cet évènement est derrière elle.
Peut-être que certains trouvent que ses excuses n’atteignent que la barre la plus basse, mais je suis en paix avec ce qu’il m’a écrit. Ses excuses me suffisent.
Et ça, ça fait qu’après m’être expliqué avec des gens fautifs, je suis pogné à redevoir justifier mes émotions à d’autres personnes qui croient m’aider en parlant à ma place. Certains croient être des sauveurs, mais ils ne font que rajouter du bruit et du poids dans toutes ces situations alors qu’on a déjà les mains pleines. Et ça, c’est tout aussi lourd.
L’affaire dont on ne parle pas assez
Au final, je suis vraiment content d’avoir eu le calme de lui répondre quelque chose de sensé. Je suis reconnaissant d’avoir réglé ça avec lui et qu’il soit passé d’un solide épais à quelqu’un qui a tiré une leçon de l’altercation. Je suis heureux de savoir qu’il va y repenser avant de dire des horreurs du genre.
Mais calice que ça a été épuisant pour moi!
Je voulais écrire des jokes ce soir-là et faire du montage pour mes stories Instagram et j’en ai été incapable. Cette montagne russe d’émotions m’a complètement exténué.
Ça se passe à nos dépens. Ces expériences-là sont drainantes. J’aurais préféré faire n’importe quoi d’autre de ma soirée que d’enseigner à quelqu’un sur les bases du respect.
Si une personne marginalisée vous dit que vos mots ou vos actions l’ont heurtée, ses émotions n’ont pas à être remises en question. Vous pouvez tenter de vous expliquer et essayer de comprendre pourquoi ce que vous avez dit est grave. Mais si la personne atteinte n’a ni l’énergie ni le moral pour décortiquer la manière dont vous avez fait fausse route, vous n’avez pas à déballer votre incompréhension. Vous avez d’autres amis pour ça.
Dans ces discussions, des erreurs seront commises et il faut accepter que nous en ferons tous. Je préfère des gens qui parlent, se trompent, s’excusent et apprennent plutôt que de les voir en silence contribuer à une omerta qui favorise le statu quo.
Mais ça se passe à nos dépens. Ces expériences-là sont drainantes. J’aurais préféré faire n’importe quoi d’autre de ma soirée que d’enseigner à quelqu’un sur les bases du respect.
Alors que le premier ministre de notre province ne parvient pas à donner une définition claire du racisme systémique, la charge d’éduquer les gens repose sur nous.
Et ça, c’est épuisant.
Donc, si vous commettez une bavure, excusez-vous comme il faut. Ça sera déjà ça de pris.