Vous accueillerez bientôt votre premier enfant? Félicitations! Lorsque vous annoncerez la nouvelle à votre entourage, vous aurez droit à de belles accolades… et une avalanche de conseils non sollicités formulés entre deux bouchées de crêpe au brunch familial de Pâques.
Les gérants et gérantes d’estrade de la parentalité ne lésinent pas quand vient le temps de donner leur opinion sur des situations qui ne les concernent pas pantoute. Oui, ça part souvent d’une bonne intention, mais ça finit rapidement par tomber sur les nerfs de se faire passer des petits commentaires sur la façon d’élever son enfant, surtout à un moment inopportun, par exemple pendant une crise légendaire dans une allée du Toys R Us.
Voici une liste non exhaustive de ces fameux conseils que vous risquez de recevoir. Et armez-vous de patience, parce que vous les recevrez tout au long de votre parentalité. Yé!
« S’il boit mal, faites-lui couper le frein de langue. »
Non, Marcel (les conseils non sollicités viennent toujours de personnes d’une… certaine génération). C’est pas la première chose à laquelle on pense quand notre nouveau-né d’à peine une semaine a eu de la misère à téter.
C’est vrai que la frénotomie peut être une intervention nécessaire chez certains nourrissons qui ont de la difficulté à téter (environ 4 à 10 % des nouveau-nés), mais c’est loin d’être la majorité des cas. Un frein de langue plus court, une condition appelée ankyloglossie, ne représente un réel inconvénient que chez le tiers des bébés.
Rien ne sert donc de se garrocher chez le dentiste pour que votre poupon subisse cette chirurgie au moindre signe qu’il a de la misère à boire.
Cette intervention, bien qu’elle soit considérée comme mineure, n’est pas à prendre à la légère et peut potentiellement virer au drame. Il vaut mieux prendre son temps pour s’informer et rencontrer des spécialistes en la matière – pas toi, Marcel – pour s’assurer de la nécessité d’une telle intervention.
Il faut parfois savoir mettre un frein à la frénotomie. Désolé pour celle-là.
« Le bébé dort avec vous? Êtes-vous tombés sur la tête? »
Tout va bien, Marcel. On essaie juste que tout le monde ait la meilleure nuit de sommeil possible.
Dormir avec son petit trésor dans son lit, c’est souvent mal vu parce que les professionnels de la santé jugent que ce n’est pas sécuritaire. Les parents ont d’ailleurs peur de l’admettre lors de leurs visites chez le médecin ou de rencontres à domicile avec une infirmière du CLSC. À quand une nouvelle saison d’Omertà : la loi du silence sur le cododo?
Bien qu’elle soit mal perçue, cette façon de faire comporte plusieurs avantages, comme celui de faciliter l’allaitement et de permettre aux parents d’avoir un meilleur sommeil. Il faut cependant suivre certaines règles pour assurer le bien-être du bébé si vous souhaitez en faire l’expérience.
Un casque, un harnais, une veste de sauvetage et le tour est joué! (On niaise.)
« Elle va avoir deux ans. Tu devrais peut-être arrêter d’allaiter. »
Quel est le problème, Marcel?
D’abord, l’Organisation mondiale de la santé recommande l’allaitement partiel jusqu’à l’âge de 2 ans et une spécialiste en la matière affirme que quand il est fait sur une longue durée, l’allaitement permettrait à une mère et sa progéniture de bâtir une relation d’autant plus solide, ce qui favoriserait le sain développement de l’enfant en augmentant son sentiment de sécurité.
« Quand ton bébé est en crise, laisse-le pleurer. C’est juste des caprices. »
Penses-tu vraiment que mon enfant de 4 mois joue consciemment avec mes émotions pour avoir de l’attention, Marcel?
Selon les études, un poupon ne pleure jamais pour tenter de manipuler son père ou sa mère et ainsi obtenir son attention.
Vous ne risquez donc pas de le gâter en le consolant. Câlins for the win! Par ailleurs, agir autrement pourrait avoir des répercussions importantes sur le niveau de stress et la santé physique de votre enfant. Ainsi, un enfant en crise qui se fait réconforter par ses parents se sentira davantage en sécurité.
Va donc consoler ta petite-fille, Marcel!
« La mélatonine, ça fait des miracles. »
On ne croit plus aux miracles depuis que le magicien masqué a révélé tous les secrets d’Alain Choquette, désolé Marcel.
Oui, ça peut être tentant de donner une dose de mélatonine à sa progéniture qui dort moins que Mathieu Dufour.
Bien qu’un tel traitement peut être recommandé par un médecin, il faut d’abord considérer plusieurs autres raisons qui pourraient expliquer qu’un enfant ait de la difficulté à s’endormir. Une routine de dodo bien établie, avec une heure du coucher constante et un temps d’écran nul ou restreint avant le saut au lit sont à prendre en compte pour aider un petit à ronfler avant même que vous n’ayez fini de lire Je suis terrible pour la 82e fois.
Bonne nuit, tout le monde! À toi aussi, Marcel.
« Mets ton petit sur le pot le plus tôt possible, sinon il ne sera pas propre avant longtemps. »
J’imagine que tu étais propre à 3 mois, Marcel?
La vérité, c’est que chaque enfant a un rythme bien à lui pour apprendre à devenir propre, comme pour commencer à parler, faire ses premiers pas et comprendre que ça peut être impoli de fixer les gens pendant plus de 3 minutes lors d’une sortie au resto. Il faut surtout faire preuve de patience et surveiller certains signes avant de commencer l’entraînement sur le petit pot, ce qui survient habituellement entre l’âge de 2 et 4 ans.
Et une fois que la pratique est commencée, il se peut que votre enfant prenne jusqu’à 6 mois avant d’être en mesure de délaisser complètement les couches, ce qui est tout à fait normal. Lui mettre de la pression, perdre patience ou lui dire qu’il fait de la peine à Passe-Partout parce que les choses ne roulent pas comme vous – ou vos beaux-parents – le souhaiteriez n’aidera en rien.
Pousse, mais pousse égal, Marcel!
« Engueuler ses enfants de temps en temps, ça leur fait pas de tort. »
Euh oui, ça fait du tort. Et pas mal plus que ce que tu penses, Marcel.
La fessée, les coups de règle et autres châtiments corporels peuvent engendrer de potentiels troubles physiques et psychologiques chez les enfants.
Ils créent une insécurité qui peut affecter la santé mentale même à l’âge adulte.
Ce que bien des gens ignorent, c’est que la violence verbale, comme les cris, les menaces et les paroles dénigrantes, peut avoir des répercussions à long terme aussi importantes que la violence physique chez un être en développement.
Parler dans le casque à ses petits, ça ne passe pas. C’EST-TU CLAIR, MARCEL?
« Faut jamais s’excuser à ses enfants. Sinon, tu perds toute crédibilité comme parent. »
On n’est plus en 1983, Marcel.
À une certaine époque, le parent était vu comme un genre de demi-dieu. Il ne fallait surtout pas remettre en question sa décision de fumer 8 paquets de cigarettes dans une auto aux fenêtres fermées sur le chemin Montréal-Alma.
Cette vision de la parentalité est aujourd’hui révolue, mais il existe toujours un certain mythe qui veut qu’un père ou une mère doit toujours représenter une figure d’autorité quasi infaillible pour son enfant. Sauf que tous les parents ont des faiblesses.
D’ailleurs, il a été démontré qu’en tant que parent, reconnaître ses erreurs et le communiquer peut aider à construire une relation de confiance avec son tout-petit. Cela fait aussi comprendre à un enfant que tout le monde peut se tromper de temps à autre.
Ben oui, même toi, Marcel.
« Pour pas te brûler, dors pendant que le bébé dort. »
Ah, ben oui. J’avais pas pensé à ça. Merci, buddy!
Tous les parents en devenir – du moins, ceux qui ont un minimum de jugement – s’attendent à ce que leur sommeil soit affecté avec la venue d’un petit être. Sauf que parfois, c’est pire que ce qu’on avait anticipé.
Oui, faire des siestes pendant que votre rejeton somnole peut être une idée intéressante pour tenter de refaire le plein d’énergie, mais c’est loin d’être une solution accessible à tous. Par exemple, c’est possible que votre horaire ne vous le permette pas – même si vous êtes en congé parental – et que vous ne soyez pas particulièrement efficace pour vous endormir sur commande à n’importe quelle heure du jour.
Où est Messmer quand on a besoin de lui?
« Si tu veux que tes enfants t’aiment, faut jamais leur dire non. »
Non, Marcel.
C’est pas toujours facile de voir le visage de sa petite fille se métamorphoser en fontaine parce que vous avez refusé de lui acheter un 37e pot de pâte à modeler. Je vous comprends : aucun parent n’aime faire de la peine à sa progéniture.
Et disons que c’est pas mal plus facile de dire oui que de se taper une crise et les regards remplis de jugement des autres clients qui se demandent s’ils doivent appeler la DPJ.
Sauf que dire non à son enfant quand il exprime un désir et non un besoin, c’est essentiel pour qu’il comprenne les limites qui lui sont imposées. Cela permet aussi à un tout-petit de mieux gérer ses émotions et de trouver des solutions à ses problèmes plus facilement à moyen et long terme.
Dommage qu’on ne puisse pas retourner dans le temps pour faire comprendre ça aux parents d’un certain président des États-Unis.