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Il y a 30 ans, le droit à l’avortement devenait vraiment un droit

Comment l'histoire de Chantal Daigle a changé le cours de l'histoire.

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Le 28 janvier 1988, la Cour suprême du Canada décriminalise l’avortement. Une bonne nouvelle qui s’accompagne à l’époque d’un bémol important : aucun cadre réglementaire n’encadre réellement cet acte médical. C’est un droit protégé par la Charte des droits et libertés, mais qui peut être parfois être interprété différemment.

Un an et demi plus tard, l’ex-conjoint violent de Chantal Daigle, une jeune femme de 21 ans, essaie de l’empêcher de mettre un terme à sa grossesse.

Le quotidien Le Devoir dresse une ligne du temps. En mars 1989, Chantal Daigle apprend qu’elle est enceinte. Son chum, Jean-Guy Tremblay, est violent et la relation se détériore jusqu’à leur séparation, le 3 juillet. Mais ce dernier n’a pas l’intention de laisser son ex mettre un terme à sa grossesse. Le 17 juillet, il réussit à obtenir une injonction pour empêcher Chantal d’avoir recours à l’avortement. Si elle choisit l’IVG, elle pourrait faire deux ans de prison et devoir débourser 50 000$…

Eh oui! Il y a 30 ans, il était plus facile (ou presque) d’avoir accès à l’avortement aux États-Unis qu’au Canada.

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C’est ainsi que débute une saga judiciaire rapide et intense. Il faut faire vite, puisqu’elle en est déjà à son deuxième trimestre. Chantal Daigle et son avocat Robert Décary réussissent le 8 août à obtenir gain de cause en Cour suprême. L’injonction est levée, et on conclut que la jeune femme a le droit de mettre un terme à sa grossesse.

Plot twist. Chantal avait déjà réussi, quelques jours avant, à traverser les frontières habillée en punk, et à se faire avorter à Boston. Eh oui! Il y a 30 ans, il était plus facile (ou presque) d’avoir accès à l’avortement aux États-Unis qu’au Canada. Comme quoi le vent tourne rapidement.

Le procès se poursuit

L’avocat Robert Décary a réussi à convaincre les juges d’entendre la cause, même si le coeur du foetus ne battait plus. Cet élément sera particulièrement important dans l’histoire. Il fera jurisprudence et permettra aux femmes canadiennes, encore à ce jour (et à jamais, on l’espère) d’avoir les pleins pouvoirs sur leur corps.

C’est ainsi qu’après le jugement Morgentaler qui décriminalisait l’avortement, on passe à l’autre étape : établir les droits du foetus et ceux du père. À l’unanimité, les juges rendent une décision « facile » selon la juge Claire L’Heureux-Dubé, et déterminent que «le foetus n’a pas de personnalité juridique et qu’il n’a donc aucun droit» et que «le père n’a pas de droit concernant le sort de la grossesse.»

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On ne peut que remercier les juges qui ont su prioriser les droits des femmes sur leurs corps et espérer que 30 ans plus tard, ce débat est réellement clos.