Devriez-vous avoir honte d’être hétéro?
Devriez-vous avoir honte d’être hétéro?
Une fois de plus, cette semaine, Gab et Flo, accompagnées de leur invité, plongent dans des sujets qui passent sous le radar mais qui méritent tout autant votre attention.
Gabrielle : 👀 l’hétéropessimisme
J’ai récemment lu un article sur des gens qui vivent un moment difficile ces temps-ci : les femmes hétéro. C’est un texte paru dans le New York Times la fin de semaine passée qui traite d’une tendance bien intéressante : l’hétéropessimisme.
L’hétéropessimisme, c’est un terme qui a été inventé pour désigner un mélange de regret, de cynisme et d’embarras que ressentent certaines femmes hétéro face à leur orientation sexuelle. En gros, elles se sentent mal d’être straight.
Après l’élection de Trump aux États-Unis et avec la montée en popularité d’influenceurs masculinistes, comme on a pu le voir dans le documentaire Alphas de Simon Coutu récemment, les jeunes femmes hétéro semblent avoir de la misère à réconcilier leur orientation sexuelle et leurs valeurs féministes.
C’est çaaaa, tu l’as peut-être vu sur TikTok, des femmes se plaignent ouvertement d’être hétéro : elles ont honte et sont tannées d’être attirées par les maudits gars pas fins, mais surtout de se retrouver dans des relations où, par exemple, elles ont toute la charge mentale. Certaines vont même jusqu’à qualifier de « prison » leur orientation, ou encore de dire que si elles pouvaient choisir, elles seraient lesbiennes.
Le problème avec cette tendance-là, c’est que c’est assez performatif. Peu de femmes vont mettre leurs convictions en pratique et vraiment rejeter les relations hétérosexuelles.
Oui, certaines personnes vont opter pour le célibat volontaire (on pense à des tendances comme « decentering men » ou aller « boysober ») ou même le lesbianisme politique, comme le mouvement 4B en Corée, mais la plupart des filles qui se plaignent de leur hétérosexualité vont continuer de dater des hommes, puis pour vrai, je ne peux pas les blâmer.
Ça t’étonne tu?
L’hétérosexualité va peut-être mal, mais ce n’est pas un concept dépassé ou quelque chose dont on peut se débarrasser. C’est une structure qui est en révision, mettons, et il faut se demander si l’hétéropessimisme est vraiment la solution aux problèmes des relations hétéro.
Florence : 💞 prendre l’amour au sérieux
Gab cette semaine, j’voulais te parler d’amour. Je suis tombée sur un article du Guardian intitulé « Voici pourquoi on devrait prendre l’amour adolescent au sérieux ».
J’avais envie qu’on jase de ça, pare que me semble que dans l’actualité, ces temps-ci, on parle beaucoup de dynamiques de couple pis à notre rapport collectif à la reproduction (je pense aux enjeux qui concernent le droit à l’avortement aux États-Unis, mais aussi ici, au pays – on le sait si on a vu le documentaire La peur au ventre). Pis j’me suis dit : c’est drôle le peu d’attention qu’on porte à notre premier contact direct avec l’amour, le couple, l’intimité, la sexualité – et j’ai nommé : nos premiers amours, qui surviennent souvent à l’adolescence.
Pis c’est pas juste qu’on s’y intéresse pas vraiment, on a comme une façon réductrice de parler de ça : on dit que c’est du puppy love, on insinue que c’est un peu insignifiant, pis que c’est une affaire de bébés, des amourettes. Mais je pense qu’on sous-estime vraiment à quel point ces amours-là nous définissent pis nous font vivre des affaires intenses. Une rupture à l’adolescence, c’est pas juste une fin. C’est un peu une crise identitaire. Y’a d’ailleurs une étude qui a montré que les émotions les plus fortes qu’on vit dans notre vie arrivent souvent autour de 15 ans.
Faque cette semaine, je me suis intéressée à ce qui se passe quand on a 15 ans pis qu’on est en amour – et donc un peu inévitablement bientôt en rupture. Mon constat, c’est que clairement, minimiser ce que les ados vivent, c’est une peu dangereux. J’te montre les chiffres que j’ai trouvés :
Selon une étude de Statistique Canada qui s’est intéressée à des adolescents d’entre 15 et 17 ans, entre 2009 et 2022, il y aurait 45% (donc près de la moitié) des adolescents canadiens qui auraient vécu du « dating violence » comme de la violence physique et sexuelle, ou de l’abus psychologique.
Ce qui est intéressant de constater, c’est que parallèlement à ça les adolescents datent de moins en moins, et ont une vie sexuelle de moins en moins active. J’ai pas réussi à trouver de données canadiennes, mais y’a une étude de 2023 du Survey Center on American Life qui a révélé qu’il y aurait 56% de la Gen Z qui aurait été impliquée dans une relation amoureuse pendant l’adolescence. Pour les boomers, ce chiffre-là monte à près de 80%. Pis d’ailleurs, cette tendance à la baisse-là, elle est plus prononcée chez les jeunes hommes.
Donc les jeunes datent moins, et quand ils le font, ils ont tendance à vivre des violences. C’est sûr que quand t’arrive à l’âge adulte et que c’est ça, le rapport que tu as eu à l’intimité, tu te sens sûrement pas outillé pour avoir une relation saine et épanouissante. Pendant ce temps-là, on nous apprend ce qu’est l’hypothénuse à l’école. Qu’est-ce qui se passe? Où sont les cours sur le consentement? L’intelligence émotionnelle? Sait po.
Dans un contexte où les enjeux qui concernent ce qui se passe dans nos vies intimes font les manchettes, y’aurait peut-être place à ajouter le cours « éducation à l’intimité » au cursus scolaire des jeunes.