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« Yellowjackets » : plus sombre, plus intense et sans compromis
*Ce texte contient de légers divulgâcheurs pour ceux et celles qui n’ont pas vu la première saison de Yellowjackets.*
Mangeriez-vous de la chair humaine si vous étiez perdu et affamé dans le bois?
Voici la question au centre de la série d’horreur américaine Yellowjackets diffusée sur Showtime depuis l’automne 2021. C’est aussi un dilemme qui nous hante depuis 1972, lorsqu’une équipe de rugby uruguayenne y a été confrontée dans la cordillère des Andes, et auquel Yellowjackets ne daigne jamais vraiment répondre.
Mais pour être 100 % honnête, le fait que Yellowjackets se pose un paquet de questions à propos de la condition humaine en circonstances extrêmes et ne réponde décisivement à aucune d’entre elles fait aussi tout son attrait. Parce que lorsqu’on est confronté à des questions de vie ou de mort, rien n’est jamais simple. Et maintenant que la série est officiellement de retour en ondes depuis vendredi pour une deuxième saison, son ballet complexe et obsédant avec la mort se poursuit de plus belle.
https://www.youtube.com/watch?v=krFohHX8WeU
Le retour de la faucheuse
Pour ceux qui ignorent l’intrigue de Yellowjackets, laissez-moi vous en dresser un portrait dans un style « pour faire une histoire courte » : en 1996, une équipe de soccer féminin est victime d’un écrasement d’avion au-dessus de la forêt en se rendant à un match de championnat national. L’accident fait quelques morts, mais la plupart des adolescentes sont laissées à elles-mêmes au milieu de nulle part pendant plusieurs mois.
On suit donc l’épopée de survie des jeunes filles sur le moment, mais aussi vingt-cinq ans plus tard, alors que toutes sont encore profondément marquées par les événements. Pour assurer ces sauts dans le temps, le groupe de femmes au cœur de l’histoire est interprété par deux générations d’actrices.
J’ai le « plaisir » de vous annoncer que cette descente au cœur de la noirceur de l’âme humaine se poursuit dans la deuxième saison de Yellowjackets qui commence à peu près là où la première s’est arrêtée. Les filles sont toujours perdues dans la forêt en plein hiver et leur alter ego contemporain lutte avec une force invisible prête à leur faire payer l’addition pour des transgressions du passé dont l’audience ignore encore la portée.
On n’est pas dans la grosse métaphore, mais plutôt dans la violence de l’urgence. Dans la nécessité de prendre les décisions difficiles.
Qu’est-ce que cette nouvelle saison apporte de nouveau? Une proximité avec la mort des plus inconfortables. Taissa, Shauna, Lottie, Natalie et les autres survivantes doivent composer avec un décès au sein du groupe et l’inévitabilité grandissante de ce qui ressemble progressivement à une condamnation. Ce n’est plus une simple menace que ça l’était dans la première saison. C’est une réalité qu’on côtoie au jour le jour, en 1996 comme en 2021, et la survie prend alors un tout nouveau sens.
Cette deuxième saison ne réinvente pas du tout le contexte de Yellowjackets, mais l’approfondit plutôt. On n’est pas dans la grosse métaphore, ici, mais dans la violence de l’urgence. Dans la nécessité de prendre les décisions difficiles. Si la première saison vous a séduit tout en vous laissant sur votre appétit en termes de réponses, vous le retrouverez dès le premier épisode.
Vivre et survivre
Un des nombreux facteurs rendant Yellowjackets si unique et rafraîchissante est l’exploration de la survie en milieu extrême par l’entremise de personnes habituellement protégées contre la grande majorité des circonstances hostiles de la vie : les jeunes adolescents.
Être ado, dans la vie comme à la télévision, c’est d’abord et avant tout une quête identitaire. C’est une période de découverte, d’apprentissage et surtout d’essai-erreur qui se vit en grande partie à l’abri de la responsabilité de sa propre survie. Dans Yellowjackets, vie et survie se côtoient constamment. Les jeunes femmes doivent composer à la fois avec les rigueurs du climat, la violence hormonale et les questionnements existentiels propres à cet âge qui se voudrait autrement formateur.
Dans Yellowjackets, vie et survie se côtoient constamment. Les jeunes femmes doivent composer à la fois avec les rigueurs du climat, la violence hormonale et les questionnements existentiels propres à cet âge qui se voudrait autrement formateur.
Cette dichotomie est exprimée merveilleusement à travers le personnage de Lottie qui offre une troisième temporalité aux événements de Yellowjackets dans le premier épisode. Entre le sauvetage des jeunes femmes et l’année 2021 où les survivantes se retrouvent, Lottie est immédiatement institutionnalisée, car affublée d’une sensibilité à l’invisible et au surnaturel. Elle comprend cependant très rapidement l’étendue de son pouvoir et prend le contrôle de son destin en formant une communauté religieuse. Dans ce nouveau statut, elle est à la fois inquiétante et profondément humaine. C’est donc difficile de ne pas sympathiser avec son parcours.
Alors oui, il y a une composante d’horreur paranormale encore plus assumée que celle de la première saison, mais Yellowjackets ne sépare jamais ces éléments de circonstances extrêmes dans lesquelles les personnages se trouvent. L’apport du mystique (que les personnages qualifient de « grande noirceur ») ne dicte jamais les circonstances des personnages, mais les place plutôt devant une série de choix difficiles.
Quand je vous parle de choix, est-ce que je suis en train de vous parler de cannibalisme, là? Tout comme Yellowjackets, je ne répondrai pas à cette question et je vous inviterai plutôt à renouer avec la série! Je ne vous en dis pas plus, mais ça vaut le coup.