Logo

Vie et mort du going-out top: on en parle avec Ariane de Mixmania

On se replonge dans LA tendance mode des années 2000.

Par
Laïma A. Gérald
Publicité

Alors que le Hot Vax Summer battait son plein (ou pas) entre deux vagues de coronavirus, l’été 2021 nous a heureusement offert quelques occasions de sorties festives. Ça, c’était avant que les variants Delta et Omicron viennent contrecarrer nos plans, évidemment.

Par une belle soirée de juillet, je me prépare à rejoindre des ami.e.s. Je mets de la musique dans mon appartement, je me sers un verre de vin et je fais le tour de ma garde-robe. Après des mois de linge mou et de pyjamas, la question se pose d’autant plus : qu’est-ce que je mets?

Soudainement, comme plongée 15 ans en arrière, j’ai une triste épiphanie : je ne possède pas de party tops. Ou plutôt, je ne possède plus de hauts spécifiquement pour sortir.

Au début des années 2000, on portait toujours une paire de jeans, genre la même qu’on portait tout le temps, et on la mettait avec un “top pour sortir”

Publicité

J’attrape mon téléphone et envoie un message vocal à mes amies Émilie et Mylène : « OMG les filles, vous rappelez-vous que quand on sortait, au début des années 2000, on portait toujours une paire de jeans, genre la même qu’on portait tout le temps, et on la mettait avec un “top pour sortir”. On les achetait dans des boutiques genre Le Château ou Jacob. Et c’était des camisoles ou des t-shirts qu’on mettait vraiment juste quand on sortait! Même les stars portaient ça sur les tapis rouges. Vous vous souvenez de cette mode-là? »

Mes ami.e.s sont sans équivoque. « OMG OUI! Il y avait un magasin cheap à Edmundston avec juste des tops pour sortir! », répond instantanément Mylène. « L’ENFER! Moi j’allais au SIRENS. Je me rappelle que ces tops-là avaient souvent des petits glitters ou des pierres brillantes, comme cousues dedans. Et s’il n’y en avait pas, on ajoutait des colliers pour faire plus “dressed up” », ajoute Émilie, aussi emballée et nostalgique que nous.

Publicité

Going-out top : je t’aime et c’est tout

Je parie que la simple vue d’une photo d’Hilary Duff, de Paris Hilton ou de Beyoncé vêtues […] d’une camisole satinée vous enveloppe d’une douce nostalgie.

Si vous êtes une millénariale et que vous aviez l’âge de sortir au début des années 2000, que ce soit dans un bar, un club, dans un party de sous-sol ou à la danse de l’école, le going-out top faisait très certainement partie de votre garde-robe. De plus, je parie que la simple vue d’une photo d’Hilary Duff, de Paris Hilton ou de Beyoncé (à l’époque de Destiny’s Child) vêtues d’une paire de jeans taille basse et d’une camisole satinée vous enveloppe d’une douce nostalgie.

Publicité

Personnellement, la nostalgie est tellement forte que j’ai eu envie d’approfondir le sujet avec une interlocutrice de choix : Ariane Laniel, chanteuse, membre de feu Aucun Regret et participante de la toute première édition de Mixmania, circa 2002.

Si vous ne comprenez absolument pas de quoi je parle, Mixmania est une émission de télévision québécoise, dont la première édition a été diffusée en 2002 sur VRAK.TV. Ce qui constitue l’une des premières téléréalités québécoises suivait le quotidien de deux groupes formés pour l’occasion : Aucun Regret (les filles) et Défense Urbaine (les gars). Au fil des semaines, le public avait plusieurs décisions à prendre : les chansons, l’élection des solistes, le look des participant.e.s, et bien sûr, déterminer le groupe gagnant. Spoiler : c’est Aucun Regret qui avait gagné!

Publicité

« Je l’avais jamais verbalisé comme ça, mais c’est vrai qu’à l’époque, on agrémentait nos soirées et nos jeans avec un petit top! », me répond d’emblée Ariane Laniel quand je la questionne sur ses souvenirs vestimentaires du début des années 2000. « Je me rappelle que j’optais souvent pour une camisole avec une coupe un peu “ballon”. C’était serré à la taille et il y avait des genres de petits plis au niveau du col. Je précise aussi que le côté bling bling brillant du vêtement était très important! », ajoute la chanteuse en riant au bout du fil.

De mon côté, je me souviens que j’adorais les camisoles satinées un peu plus longues avec un col en V. Genre, en 2005, je m’habillais exactement comme ça :

Publicité

L’auteure-compositrice-interprète souligne également que le jeans avait une importance capitale. « À l’époque, on avait sa paire de jeans préf, souvent taille basse. On le mettait autant à l’école que pour sortir, et c’est vraiment le haut qui variait en fonction des occasions », se remémore la jeune trentenaire.

Aucun, aucun regret

«Dans les photos pour le magazine Cool!, je portais des jeans avec des espèces de coutures rouges sur le devant du pantalon. J’avais aussi un chandail rouge avec des manches évasées et lacées.»

Pour moi qui avais 14 ans en 2002, les membres du quatuor Aucun Regret, Ariane Laniel, Annabelle Oliva, Julie St-Pierre et Caroline Marcoux-Gendron, étaient de véritables icônes de mode. Et le going-out top était évidemment un élément central de leurs tenues.

Publicité

« Mixmania était un festival de petits tops Parasuco, se souvient Ariane, amusée. C’est sûr que dans les looks que les stylistes nous proposaient, il y avait des tenues de scène, donc nos hauts et nos pantalons étaient souvent très flashy. Personnellement, je dirais que j’ai porté des jeans très marquants. »

Marquant, c’est le mot, puisque je m’en souviens comme si c’était hier. Ariane se prête au jeu, un peu crampée, et se lance dans la description d’un de ses fameux looks. « Dans les photos qu’on avait faites pour le magazine Cool!, je portais des jeans avec des espèces de coutures rouges sur le devant du pantalon. J’avais aussi un chandail rouge avec des manches évasées et lacées. Le rouge des fils cousus sur le jeans était un beau rappel du rouge du chandail! », explique l’artiste, qui appréciait tout particulièrement le style des vedettes et des chanteuses pop de l’époque, surtout celui de Britney Spears, Paris Hilton, et plus près de nous, Natasha St-Pier.

Publicité

Ariane constate d’ailleurs, à sa plus grande surprise, que le lacé, qu’il soit au bas des manches, aux épaules ou au niveau du col, est revenu à la mode ces dernières années. Comme quoi les tendances sont véritablement cycliques.

En juillet 2021, le magazine Vogue prédisait d’ailleurs le retour en force du going-out top, une sorte de célébration du retour de la vie nocturne après des mois de confinement. Eh ben!

Désolée pour la qualité de la photo, c’est tout ce que l’on trouve sur le web…
Désolée pour la qualité de la photo, c’est tout ce que l’on trouve sur le web…
Publicité

« Oui, oui, j’ai parlé des jeans », lance Ariane en s’éloignant du combiné quelques secondes. « S’cuse, ma mère voulait vraiment que je te parle des jeans! » rigole la jeune femme, toujours aussi joyeuse. Manifestement, la maman d’Ariane garde un souvenir vif des tenues de sa fille, 15 ans plus tard.

Pour ma part, je me souviens très clairement que je rêvais d’avoir un haut rouge comme celui d’Ariane. Je ne peux donc pas m’empêcher de poser la question : qu’est-il advenu de ce kit mythique à mes yeux et ceux de ma génération?

« Je l’ai encore! lance Ariane. Je vais t’envoyer des photos! »

Ariane Laniel
Ariane Laniel
Ariane Laniel
Ariane Laniel
Publicité

« Je t’aime, c’est ainsi, le jour et la nuit »

Bien que l’on puisse considérer que les années 2000 constituent l’apogée du going-out top, Cassidy Zachary, historienne de la mode et cocréatrice du podcast Dressed: The History of Fashion rappelle que l’origine du morceau remonterait aux années 1960. En effet, cette pièce de vêtement serait en quelque sorte l’emblème de la jeune génération désireuse de briser les codes vestimentaires et d’adopter le pantalon et la mini-jupe.

«À l’époque, j’avais donné une entrevue à Denis Lévesque, spécifiquement pour parler de chandail “bédaine»

Toujours est-il qu’en 2002, Ariane est malgré elle devenue une sorte de porte-parole de la tendance. « Je pense que c’est ma destinée de parler de petits tops, plaisante-t-elle. Imagine-toi donc qu’à l’époque, j’avais donné une entrevue à Denis Lévesque, spécifiquement pour parler de chandail “bédaine”! J’avais comme 16 ans et j’étais chez Parasuco avec une styliste. Denis était clairement contre cette mode-là, il voyait ça comme le symbole de l’hypersexualisation des ados. Aujourd’hui, je dirais : “Heille, je peux porter ce que je veux, Denis”, mais à l’époque, j’avais été prise au dépourvu et ça m’avait troublée de vivre ça. »

Publicité

Quand je lui demande si elle se sent nostalgique de cette tendance, Ariane est nuancée. « C’est sûr que c’était pratique de ne pas penser au bas (on mettait juste sa paire de jeans préférée) et de mettre le paquet sur le haut. Aujourd’hui, quand on sort, on pense à l’ensemble », explique celle qui, au fil des années, avoue être devenue consciente de l’impact vestimentaire d’Aucun Regret. « Par contre, justement, comme on mettait le vêtement du haut très en valeur, on le remettait pas forcément, on brûlait le vêtement. C’était pas très écologique. Aujourd’hui, j’ai l’impression qu’on opte davantage pour des pièces intemporelles, plus neutres, qu’on va pouvoir reporter », ajoute la chanteuse.

Pour l’écologie, on repassera, surtout que la qualité n’était souvent pas au rendez-vous.

Sara Idacavage, historienne de la mode à l’Université de Georgie citée dans le Huffpost, abonde dans ce sens. « L’apogée de cette tendance coïncide avec l’avènement des commerces de fash fashion, explique l’experte. Je me souviens qu’il était très facile d’acheter beaucoup de “hauts pour sortir” pour une somme d’argent relativement modique, ce qui était très excitant pour une jeune étudiante comme moi à l’époque. » Pour l’écologie, on repassera, surtout que la qualité n’était souvent pas au rendez-vous.

Publicité

Pour sa part, Ariane Laniel, qui évolue toujours dans le milieu de la musique, m’apprend qu’elle enregistre actuellement de nouvelles chansons, ce à quoi elle ajoute : « Mais je ne sais pas encore ce que je vais porter sur la pochette de mon prochain album! »