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« The Whale » : la petite histoire de deux grands retours

L'inspirant retour de Brendan Fraser en cache un autre.

Par
Benoît Lelièvre
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La planète entière avait momentanément oublié l’existence de Brendan Fraser.

Après son dernier rôle grand public dans l’adaptation du roman de Jules Vernes Voyage au centre de la terre, les opportunités ont commencé à se faire rares pour l’interprète de Georges de la Jungle. Il n’a jamais vraiment arrêté de travailler, mais les rôles sont devenus moins prestigieux. Bien que le milieu soit notoirement plus difficile avec les femmes, Hollywood n’est pas tendre avec les gens qui vieillissent en général.

Comme un cheveu sur la soupe, Fraser est revenu à l’écran dans un rôle de soutien pour le film de Steven Soderbergh No Sudden Move et un peu tout le monde est tombé sur le cul à l’unisson. Non seulement il était excellent, mais il a énormément changé physiquement depuis les années où il incarnait le beau Rick O’Connell dans La Momie.

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Commérages, mauvaises blagues et jugements de valeur mis à part, le grand retour de Brendan Fraser ne faisait que commencer. Depuis quelques semaines, le film The Whale, où il incarne le rôle principal, fait fureur dans les festivals. Après une ovation de six minutes au festival de Venise, Fraser a eu droit à une deuxième ovation presque aussi longue à Toronto. Tout le monde est heureux de le voir réussir à nouveau… mais pourquoi au juste?

Par ailleurs, le retour de Brendan Fraser dans The Whale en cache un autre un peu moins romantique. Laissez-moi vous expliquer tout ça.

https://www.youtube.com/watch?v=hKU4Q0rwP-k

Brendan Fraser : le retour qui fait chaud au coeur

Que s’est-il donc passé avec le valeureux Brendan depuis Voyage au centre de la terre? Plusieurs choses. La plus importante : son divorce avec Afton Smith, avec qui il a été marié neuf ans. Fraser a été ordonné par la cour de payer 50 000 $ à son ex chaque mois sur une période de 10 ans (ou jusqu’au remariage de cette dernière) en plus de 25 000 $ de pension alimentaire pour leurs trois garçons pendant trois ans. C’est 6,9 millions de dollars en tout et partout.

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Fraser s’est donc vu obligé de prendre un peu tous les boulots qui lui passaient sous la main sans se soucier de leur qualité artistique. Les raisons de son divorce n’ont jamais été dévoilées, mais les rumeurs vont dans tous les sens à ce sujet, de l’infidélité à la magouille légale. Surtout depuis que l’acteur est de retour dans l’espace public. Votre intuition est aussi valide que la mienne à ce sujet : aucun site sérieux ne s’est avancé sur les raisons de la séparation.

C’est toujours inspirant de voir quelqu’un braver la tempête et riposter, même après que la vie lui eut enlevé look et fortune.

Le divorce ne fut qu’un des désastres à s’abattre sur Brendan Fraser au tournant du millénaire. Souvent blessé en exécutant ses propres cascades, Fraser a dû subir un remplacement du genou, une laminectomie (une opération assez majeure aux vertèbres) et une chirurgie aux cordes vocales au fil des années, ce qui eut pour effet de multiplier les factures, de ralentir son rythme de travail et de modifier son corps autrefois svelte et tonique. C’est une autre des raisons pour lesquelles il s’est rabattu sur du travail de voix.

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Bien sûr, il y eut aussi les allégations d’agression sexuelle qu’il aurait subie aux mains de Philip Beck, alors président du Hollywood Foreign Press Association. Fraser est lui-même revenu sur ses déclarations parce que divers médias ont interprété l’événement comme catalyseur pour expliquer sa difficulté à décrocher des rôles intéressants. Fraser affirme ne pas avoir été blacklisté parce que le HFPA n’a pas TANT de pouvoir que ça, mais que l’incident a changé sa relation avec son métier et l’a plongé dans une dépression.

C’est peut-être aussi à la base de la dissolution de son mariage, qui sait.

Bref, ça fait chaud au cœur de voir un acteur saisir sa deuxième chance comme le fait Brendan Fraser depuis quelques années. C’est toujours inspirant de voir quelqu’un braver la tempête et riposter, même après que la vie lui eut enlevé look et fortune. On n’arrête pas le talent lorsqu’il est déterminé à réussir.

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Darren Aronofsky : le retour qu’on n’attendait pas vraiment

L’autre grand retour que marque la parution du film The Whale est celui du réalisateur Darren Aronofsky, dont on clamait haut et fort le génie il n’y a pas si longtemps.

Mis en nomination plusieurs fois aux Oscars pour Requiem for a Dream, The Wrestler et Black Swan, Aronofsky n’a jamais remporté la statuette tant convoitée, mais s’est bâti au fil des années une réputation de réalisateur visionnaire, capable à la fois de divertir, de faire réfléchir et d’éblouir son public. Le monde était à ses pieds. Il a même fréquenté Jennifer Lawrence pendant un peu plus d’un an. Tout allait bien pour lui jusqu’à la sortie du film Mother! en 2017.

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C’est pas que Mother! soit si terrible à proprement parler ou que Darren Aronofsky ait été « cancellé » pour cause de navet problématique. C’est juste que… c’est un peu n’importe quoi. Violent, chaotique et hautement métaphorique, le film met en scène l’inexplicable calvaire d’une femme enceinte aux mains de son propre mari et d’une foule d’étrangers. Le tout est une allégorie un peu (beaucoup) tirée par les cheveux pour « le viol de mère Nature par l’espèce humaine », avait expliqué l’actrice principale et alors blonde d’Aronofsky Jennifer Lawrence en entrevue.

Mother! a reçu un accueil… disons mitigé par la critique et le public. Le film a même souffert l’indignation d’une nomination pour le gala des Golden Raspberries, qui récompense les pires films de l’année.

Le film a même souffert l’indignation d’une nomination pour le gala des Golden Raspberries.

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Bien qu’il ait balayé les critiques du revers de la main comme tout bon esprit créatif devrait le faire, Aronofsky s’est exilé dans ses bureaux de production pendant pas moins de cinq ans par la suite. Il a produit 13 projets depuis 2017, mais n’en a réalisé qu’un seul : un épisode d’une série documentaire à teneur écologique mettant en vedette Will Smith.

L’histoire ne dit pas si Aronofsky fut blacklisté par les bailleurs de fonds hollywoodiens ou si cet exil était volontaire, mais il y eut bouderie mutuelle et cette bouderie est bientôt terminée.

C’est peut-être pas votre cas, mais j’étais très fan des films de Darren Aronofsky avant l’incident Mother! et je m’ennuyais beaucoup de sa touche audacieuse et inconfortable. Son retour n’est peut-être pas aussi inspirant que celui de la vedette de son film, mais il était presque inespéré dans un marché où les propriétés intellectuelles franchisées prennent de plus en plus de place.

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The Whale ne sortira en salle que le 9 décembre prochain, mais on devrait commencer tout de suite à s’en enthousiasmer. C’est le retour de deux talents qui avaient disparu pour des raisons on ne peut plus différentes, mais qu’on se réjouit de retrouver!