J’ai un ami qui est mort cet été. À cause de la drogue. Et j’espère que je l’oublierai pas. Ni lui, ni la leçon que j’en ai tirée.
La drogue. Notre capacité à être dépendant. Accro. Notre capacité à fuir. Notre possibilité de faire taire ce que l’on veut faire taire. Momentanément. Ou à chaque jour.
Comme tout le monde, ma vie fait parfois mal. Parce que la vie, ça fait mal. C’est dur. Pis on peut bien penser qu’on se plaint la bouche pleine, la réalité, c’est que t’as beau avoir un toit sur la tête, t’es pas au bout de tes peines.
T’es vivant. Pis t’as des questions. Tu sais pas ce que tu fais. T’as peur. Pis face à l’anxiété de la vie, c’est tentant de te mettre à trouver des exutoires. Des drogues. Sous toutes les formes.
Et c’est la clé. Tout dire et être vulnérable. Mais parfois, la clé te tente pas.
Au-delà de la pression
J’ai vécu ça cet été. Une sorte de retour à la réalité. Je sors de l’École nationale de l’humour. J’ai terminé en juillet. Après une trentaine de shows. Partout au Québec. Avec ma cohorte. De 20 ans. J’en ai 35. J’ai trois enfants. J’ai rushé. J’ai adoré cette expérience et j’en suis sortie gagnante sous tellement de formes, mais je peux vous dire que j’ai rushé.
Au-delà de la pression de devoir performer, de passer à travers tout le voyage de vulnérabilité qu’est une école d’art et d’être obligée de faire fitter l’ensemble dans mon horaire de mère de famille, la peur de ne pas y arriver me quittait rarement. Je me voyais en venir à : « Oui, allô? Louise Richer? Ouin, ben, c’est ça là, finalement, ça se fait pas vraiment vivre tout ça en élevant 3 enfants… »
Heureusement, j’étais bien entourée. J’avais une cohorte en or dans laquelle je pouvais tout dire et être vulnérable.
Et c’est la clé. Tout dire et être vulnérable. Mais parfois, la clé te tente pas. Parfois ça te tente pas de dealer avec tes émotions « négatives », non, ce que tu veux, c’est les assommer. Les fuir.
La fuite
Je prends pas de drogue. Je bois pas vraiment. Mais je m’assomme avec mon écran. Des fois je suis raisonnable. Des fois, ça fait juste partie de mon travail de m’immerger et avoir de la répartie sur les médias sociaux. J’adore ça, pis j’en vis.
Mais d’autres fois, c’est juste de la fuite. D’autres fois, les deux heures de niaisage sont des heures que je devrais passer à me coucher. Des fois les messages que j’envoie ont pour seul but de me donner un fix de dopamine, pis surtout, trop souvent le temps que j’y passe est le temps que je devrais consacrer à autre chose. Qui bâtit de quoi. Mon travail. Ou des liens. Avec ceux que j’aime.
Je faisais juste me garder éveillée sur un buzz de café
« Pis ça? » Vous allez me dire. Ben, c’était exactement ma question.
Quand la pression de l’école est retombée, je suis tombée malade. Je me suis rendu compte que depuis un bout, je faisais plus face à la réalité de ma vie. Je faisais juste me garder éveillée sur un buzz de café, je passais d’un truc à l’autre, pis je me droguais à l’attention des médias sociaux.
Mais en dedans j’étais morte.
Alors j’ai tout arrêté. J’ai remplacé le café par le sommeil. L’attention des médias sociaux, par l’amour de mes proches. Pis ben…
Y avait aucun fuckin’ changement.
Nos choix
Je me promenais avec un gros « Pis ça?! » étampé dans le front. « Fine! Je mange des céréales bio le matin, je bois du criss de thé vert, pis je me couche au lieu de vedger 3 heures sur FB, mais PIS ÇA!? Je suis encore impatiente avec mes enfants, j’ai encore toutes mes criss de questions existentielles pis en plus, LÀ, JE RESSENS TOUTES LES ÉMOTIONS NÉGATIVES DE LA VIE! Je vois pas pourquoi je me ferais chier à vivre une vie sans plaisir où faut que je boive du thé pis je me couche tôt si ça change sweet fuck all au final! »
Que tu choisis de t’annuler par une substance, une habitude, un truc auquel t’es accro. Chaque petite dose s ’additionne.
Pis c’est là que mon ami est mort.
Sébastien. Qui avait l’âme sensible de tous les artistes et à qui ce monde faisait juste trop mal. Et qui se « médicamentait » par la drogue.
Ça m’a fessée en pleine face. Au-delà de son jeune âge et de la tristesse de son départ, ce qui m’a marquée c’est que c’est à la longue que nos choix font une différence.
Chaque fois que tu t’assommes. Que tu choisis de t’annuler par une substance, une habitude, un truc auquel t’es accro… Chaque petite dose s’additionne. Pis ça change pas grand-chose sur le coup, mais un jour c’est ce qui fait que tu perds pied.
Alors je le bois mon criss de thé vert, pis face à ma vulnérabilité, au stress de ma vie, je mets au point un meilleur système d’aide et de gestion. Pas de fuite. En souvenir de mon ami, mais aussi parce que pour l’instant, j’ai le choix.
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