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Louis T sur le Concerta : goûter au bonheur, puis en avoir un peu peur

« Je ne me fais pas confiance pour être capable d'en consommer de manière responsable. »

Par
Thomas Chenel
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Dans la première émission de la série documentaire Louis T veut savoir, diffusée sur Savoir média, l’humoriste et animateur a essayé le méthylphénidate à libération prolongée (mieux connu sous le nom de Concerta), un psychostimulant normalement utilisé pour traiter les symptômes du TDA/TDAH.

« Je ne savais pas que Louis T avait un TDA/TDAH… » direz-vous. Ce n’est pas le cas. Comme plusieurs utilisateur.trice.s qui s’en servent pour booster leur productivité sans avoir reçu un diagnostic du genre, Louis T a voulu tester le Concerta pendant une semaine pour en connaître les effets. Une façon, en quelque sorte, de flirter avec le transhumanisme, ce qui est aussi le premier thème abordé dans la série.

Curieux d’en apprendre un peu plus sur son expérience, nous lui avons passé un coup de fil pour en discuter.

Qu’est-ce qui t’a le plus surpris des effets du Concerta?

Louis T.: Le sentiment de bien-être que ça m’a procuré. C’était la première fois que je touchais à un psychostimulant comme celui-là, et ça m’a fait goûter au pur bonheur. Je m’attendais à ce que ça me réveille, que ça me donne de l’énergie, mais là j’avais l’impression d’être sur un antidépresseur en plus d’avoir bu deux cafés.

Même ma blonde trouvait que j’avais changé, que j’étais différent.

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Par exemple, ça m’a rendu super impulsif; faut pas me faire confiance avec une carte de crédit dans cet état-là!

Les effets étaient aussi vraiment différents en fonction de la dose. Celle qu’on donne aux enfants, la 16 mg, ne m’apportait pas grand-chose. C’est avec la 54 mg que je suis vraiment devenu euphorique. Je pouvais dire avec certitude que je ressentais un effet.

En quoi le Concerta a-t-il été bénéfique pour toi?

Même si l’épisode portait sur l’amélioration des fonctions cognitives, ce n’est pas vraiment à ce niveau-là que ça a été bénéfique pour moi. Je me trouve déjà assez performant comme individu, je n’ai pas de problème de concentration.

Ça m’a surtout aidé en me donnant de la motivation et de l’énergie. J’avais plein d’idées, pis j’avais l’énergie nécessaire pour les réaliser. J’avais le goût d’aller marcher, de parler aux gens.

Il faut savoir que je suis une personne assez maladroite socialement; les interactions ont tendance à me stresser.

Sur le Concerta, j’avais envie d’aller voir du monde.

J’ai l’impression que ça a soulagé mon anxiété sociale : j’me sentais drôle, charismatique, pis en contrôle de mes moyens. Je pense aussi que ça a soulagé un problème de mal-être chez moi, pis c’est surtout ça qui m’a fait peur.

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As-tu eu envie d’en reprendre après la semaine de l’épisode? Est-ce que ça t’arrive d’y penser?

Oui! Il m’en reste dans le pot sur mon bureau. J’y pense pas chaque jour, mais chaque fois que je vois le pot, j’ai le goût d’en prendre une!

Je me dis que ça pourrait être l’fun, avoir un bel après-midi assuré. Je me dis aussi que si je la garde, c’est sûrement pour en reprendre à un moment donné.

Tu dis que tu n’as jamais vraiment été intéressé par la drogue. Est-ce que cette expérience a piqué ta curiosité?

Non, au contraire! Ça a confirmé toutes mes peurs envers la drogue! Maintenant que j’ai essayé le Concerta, je ne me fais pas confiance pour être capable d’en consommer de manière responsable.

J’ai plus peur de moi-même que de la substance en tant que telle.

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Si t’es capable de faire de la coke les fins de semaine tout en gardant un certain équilibre de vie, tant mieux pour toi! Mais moi, je ne me fais pas confiance avec ça.

Je me dis aussi que cette pratique-là ne peut pas être viable à long terme, qu’il y a un prix à payer pour ça : le bien-être va nécessairement se transformer en mal-être éventuellement, l’énergie en fatigue. Évidemment, je ne veux pas faire la morale à personne : si on parlait d’alcool à la place, ce serait triste, mon affaire!

Est-ce que l’essayer a changé ta perception du médicament et des gens qui le consomment?

Pas vraiment, parce que ceux qui en ont besoin ne vont pas nécessairement en tirer les mêmes effets que moi, mais ça m’a permis de mieux comprendre à quel point ça peut être facile de tomber dans la dépendance avec ces médicaments-là.

Ça m’a fait beaucoup réfléchir à la manière dont on soigne nos problèmes de santé.

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Peut-être qu’on a le réflexe de prescrire des médicaments un peu trop rapidement. Quand je pense à ce qui se passe présentement en Amérique du Nord avec les antidouleurs, je me dis qu’il doit forcément y avoir de la surprescription. C’est un gros problème de société, et je pense qu’on n’en parle pas assez.

Tu as lu mon article sur l’impact de la pandémie sur les consommateurs de psychostimulants à des fins de performance. Quelle a été ta réaction en constatant l’ampleur de cet impact?

Ça ne m’a pas étonné, parce que la pandémie exacerbe nos petits bobos, pis ces substances-là peuvent soulager nos bobos dans une certaine mesure. En lisant les témoignages, j’avais l’impression que ce n’était pas nécessairement juste pour performer que les individus consommaient, mais aussi pour combler une sorte de manque.

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Au-delà de la culture de performance qu’on peut retrouver dans certains domaines, je pense qu’il y a aussi une culture d’acceptabilité de la consommation, pis ça, selon moi, ça peut être dangereux. On ne devrait pas être obligé de recourir à des stimulants pour être capable de faire sa place en société.