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Comme on vous l’a raconté récemment, Urbania a eu la chance de se rendre au Festival de musique émergente (FME), à Rouyn-Noranda, la fin de semaine dernière.
Quoi? Un vrai de vrai festival, avec des humains et de la musique live? Oui, madame!
J’avoue qu’une semaine plus tard, je n’en reviens toujours pas. Comme la majorité des gens présents, je n’avais pas assisté à un spectacle en chair et en os depuis 6 mois. Du jamais vu pour une spectatrice aussi assidue que moi.
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Une de nos missions au FME, c’était d’animer une émission de radio quotidienne sur les ondes de la radio locale. On a pu partager nos coups de coeur, raconter nos aventures abitibiennes (sous la pluie!) et faire des entrevues avec des organisateur.trice.s et des artistes invité.e.s.
Le samedi après-midi, on a eu la chance de recevoir Gab Bouchard, qui a lancé son excellent premier album Triste pareil, juste avant le confinement. Si vous ne connaissez pas encore ce chanteur originaire de Saint-Prime au Lac-Saint-Jean, je vous conseille vraiment de remédier à la situation en allant écouter son album (mais après avoir fini cet article, genre!).
Gab, comment tu t’es senti quand tu as appris que tu devais annuler ta première tournée, initialement prévue ce printemps, à cause de la pandémie?
J’ai trouvé ça vraiment wack! Personne ne pouvait s’attendre à ça, et ça m’a pris un moment avant de réaliser que ma première tournée n’aurait juste pas lieu comme prévu. Autour de moi, tout.e.s les artistes perdaient leurs gigs en même temps, c’était irréel. D’un autre côté, je me dis que les gens ont eu le temps d’écouter mon album chez eux, en confinement.
https://www.instagram.com/p/CAGYCrWHPHm/
C’est mon cas, d’ailleurs. J’ai découvert ta musique confinée toute seule, chez nous! Parlant de confinement, est-ce que cette période t’a inspiré d’une manière particulière?
Je suis parti au Lac. Je devais y aller seulement une semaine, mais finalement je suis resté 3 mois parce que je pouvais pas revenir à Montréal. J’ai écrit des tounes, mais c’était vedge, donc j’ai arrêté. Pour le premier album, on a écrit tellement longtemps, et ça a été tellement long et intense à faire, alors ça a été cool de prendre une petite pause d’écriture. En fait, je recommence tout juste à être dedans et à tripper. Je vais bientôt commencer à travailler sur un nouvel album.
C’est comment revenir sur scène après 6 mois de confinement?
C’est sûr que cet été, on présente seulement quelques spectacles en formule réduite. C’est mieux que rien, mais on a hâte de faire des « vrais shows ». Aussi, la réaction du public est incroyable. Quand les gens viennent nous dire « Merci » après les shows, on sait ce que ça représente. On réalise qu’on est souvent le premier show auquel les gens assistent depuis des mois. C’est vraiment une chance de jouer devant eux.elles.
On poursuit en musique (comme on dit quand on fait de la radio!):
Pendant qu’on écoute la chanson de Gab, je réfléchis à sa dernière affirmation: « Quand les gens viennent nous dire « Merci! » après les shows, on sait ce que ça représente. ».
C’est vrai que depuis le début du festival, mon premier en 6 mois, j’arrête pas de dire que je me trouve chanceuse d’être ici, qu’on est privilégié.e.s de pouvoir assister à des shows live et de voir des artistes sur scène.
C’est alors que je prends conscience d’à quel point c’est quelque chose que je tenais pour acquis avant la pandémie: j’avais envie d’aller au théâtre, je m’achetais un billet. J’avais envie de voir un show de musique, j’y allais, simplement. J’avais envie de danser avec mes ami.e.s pendant un concert, je le faisais dans la plus grande insouciance et sans plus de complexité que ça.
L’émission reprend et je me tourne vers Gab.
Depuis que je suis au FME, je sens vraiment une solidarité incroyable entre les artistes et le public. Comme une espèce de reconnaissance mutuelle d’être là. De mon point de vue de spectatrice, je mesure la chance que j’ai d’être ici, de voir et d’entendre de la musique live, avec des musicien.ne.s qui jouent en vrai. Et inversement, je suis tellement heureuse pour les artistes, qui peuvent enfin se produire devant des gens. C’est comment de ton point de vue, Gab?
Je suis tellement d’accord avec ce que tu dis. Pour nous, c’est tellement précieux de jouer en live, devant des humains qui bougent et de recevoir leurs émotions. Oui, on fait des sacrifices. Non, le public ne peut pas toujours danser dans les salles intérieures. Oui, il faut respecter une distanciation physique, mais on est là. On est LÀ! Nous, on est heureux pour le public, et le public est heureux pour nous. Tout le monde est heureux pour tout le monde. On mesure la chance d’être ensemble et ça fait qu’on savoure même peut-être plus le moment qu’avant. On peut pas se coller, mais l’émotion passe quand même.
Je sens aussi une belle solidarité avec les autres bands. On est tous et toutes dans le même bateau, donc quand nos ami.e.s ont des gigs, il n’y a pas de jalousie, on est juste content que la musique reprenne sa place.
« Je suis vraiment content d’être ici! »
Ce soir-là, habitée par cette discussion avec Gab Bouchard, je vais voir le spectacle d’Aliocha, toute seule. C’est un show que j’ai très hâte de voir au FME, parce que Naked, le dernier album du chanteur montréalais, est un des disques que j’ai le plus écoutés pendant le confinement. Et aussi, parce que j’ai un petit secret crush sur lui.
https://www.instagram.com/p/CBBUzbpJ_aH/
Quand Aliocha arrive sur scène, fébrile et souriant, il regarde la salle pendant plusieurs secondes et dit, simplement: « Je suis vraiment content d’être ici! », en savourant chaque mot. Dans un élan commun, les spectateurs et les spectatrices hurlent leur bonheur parce que comme dirait Gab Bouchard, « On sait ce que ça représente » d’être ici. Une phrase comme celle-là, en début de concert, on l’entend souvent, à toutes les sauces. Mais ce soir-là, c’est la toute première fois qu’Aliocha présente son concert, devant un public assis et distancié, certes, ça prend donc une dimension extraordinairement précieuse.
Chanson après chanson, sa joie est palpable, celle de la foule aussi. Comme Aliocha, je savoure chaque seconde de cette magnifique heure et demie.
Pendant ce temps-là, mes collègues Billy et Mélanie assistent au concert de KNLO, quelques rues plus loin. Devant un public assis (ce qui n’est vraiment pas commun dans un show de hip-hop, on va se le dire) KNLO, aux côtés de Caro Dupont, annonce: « La prochaine toune, on va vous la faire sur notre chaise, comme vous! ». Ils chantent donc une chanson complète, les deux fesses bien ancrées sur leur banc, en solidarité pour le public contraint de bouger assis. C’est nice, pareil, comme geste! C’est le genre d’affaire qui me touche, en tout cas!
Ça fait une semaine que je suis revenue du FME. Oui, je pense aux concerts et aux artistes de grand talent que j’y ai vu, mais cet esprit de solidarité, de joie d’être réuni.e.s même à distance, la fébrilité des retrouvailles entre les artistes et le public, m’habitent particulièrement. Parce que même à 2 mètres, même assis sur une chaise, même en plus petit groupe, entendre de la musique live, ensemble, « on sait ce que ça représente ».