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Bitchologie Rosalia

Bitchologie : Rosalía est la pop star de demain

…et nous ne sommes pas dignes de la recevoir.

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Babe, réveille, c’est Noël avant l’heure! Et là, je ne parle pas du tapis de neige (yash) qui a recouvert le Québec au cours des derniers jours, mais bien de l’abondance de cadeaux qui nous attendent déjà sous le sapin, délicatement déposés par nos pop stars favorites.

2025 achève et on dirait que les girly pops se sont toutes passé le mot pour sortir les gros canons maintenant. Peut-être qu’elles attendaient sagement que la vague Taylor Swift passe ; dans l’industrie, c’est un secret de Polichinelle que les artistes redoutent les éclipses médiatiques déclenchées par les sorties d’album de madame Travis Kelce.

Qu’importe, l’important c’est qu’on soit gâtées, même si, avouons-le, on a été plutôt tannantes dans la dernière année.

En l’espace d’environ deux semaines, on a eu droit au solide album de Lily Allen (dont j’ai parlé ici) ainsi qu’à de nouveaux singles de Katy Perry (bandaids, une chanson au sujet de sa relation toxique avec Legolas dont on se fout pas mal maintenant qu’elle est avec le monsieur qui a légalisé le weed au Canada), Hilary Duff (Mature, une toune qui a l’air basic af en surface, mais qui met le Petit Chaperon rouge en garde contre le grand méchant loup), Charli XCX (House, en vue d’une nouvelle adaptation sexu des Hauts de Hurlevents d’Emily Brontë sur grand écran) et Robyn (Dopamine, un hit qui lui ressemble, mais dont le vidéoclip a l’air d’une annonce pour les savons Dove au plus fort du mouvement body positive).

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De vrais beaux joujoux, donc, mais le plus précieux d’entre eux nous a été offert par la chanteuse espagnole Rosalía qui semble investie d’une mission pour nous convertir à l’église de la musique classique avec Lux, un album divin, bon à s’en démener dans l’eau bénite.

La chanteuse d’origine catalane s’est fait un nom sur la scène musicale en remettant le flamenco au goût du jour avec les albums Los Angeles (2017) et El Mal Querer (2018), avant de conquérir la planète pop avec la douce folie de MOTOMAMI en 2022.

Après la sortie du premier single, Berghain, un titre en hommage à la célèbre boîte de nuit du même nom, c’était évident que Lux allait nous amener ailleurs. Personne ne s’attendait à ça. C’est audacieux, raffiné, percutant. Et que dire de ce clip livré pour nous, pauvres pécheurs?

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On n’a quasiment pas le choix de se prosterner devant le génie créatif de Rosalía. D’ailleurs, partout sur la planète, les critiques se confondent en éloges pour la chanteuse.

Lux est reçu comme le second avènement du cHrist parce qu’il donne l’impression d’avoir entre les mains un objet d’art plutôt qu’un objet de consommation.

Avec une ambiance à la fois cinématographique et immersive, c’est un disque ambitieux, exigeant. Il exige le silence, la lenteur, l’écoute tout en étant étonnamment plus accessible qu’on pourrait penser. Pourquoi? Tout simplement parce que c’est beau. Et n’importe qui a les outils pour apprécier le beau, pas besoin d’une formation en musique classique pour se laisser envoûter par la voix céleste de Rosalía, sublimée par l’Orchestre symphonique de Londres.

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Si la chanteuse s’exprime dans plus d’une dizaine de langues sur ce disque pensé pour évoquer de vieux chants religieux (d’ailleurs, Rosalía a récemment bleaché le sommet de son crâne pour donner l’illusion d’un halo), il est tout à fait possible de mesurer l’ampleur de l’émotion derrière chaque morceau sans en comprendre les paroles. C’est comme un opéra, en fait, une épopée à la hauteur d’un amour qui inspire autant qu’il ravage. Y’a pas plus commun que ça.

Dans différentes entrevues, Rosalía parle de sa volonté d’offrir une alternative à « l’économie de la dopamine », celle qui nous pousse à la surconsommation et à la surstimulation pour une gratification constante, immédiate. Dans l’industrie de la musique, ça s’exprime par des chansons de plus en plus courtes (où on enlève le bridge, par exemple) et de plus en plus répétitives, pensées pour un réseau social comme TikTok.

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Et tout ça change malheureusement la façon dont les maisons de disques gèrent leurs artistes puisque l’accent est désormais mis sur la quantité et la viralité plutôt que la qualité. C’est une situation qui a entre autres déjà été dénoncée par Adele et Charli XCX. Rosalía vient ainsi s’ajouter à la liste des pop stars qui s’opposent à la dictature des algorithmes avec une œuvre contemplative, presque aussi sacrée que les chants liturgiques dont elle s’inspire.

Rosalía, c’est la réponse au slop, à l’emmerdification des médias et de la culture.

Perso, j’ai un faible pour les pièces De Madruga et La Rumba Del Perdon parce qu’on y retrouve la Rosalía d’hier au service de la pop de demain.

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La pire série de tous les temps

Maintenant que la saison froide est véritablement installée, les vieilles peaux comme moi sont à la recherche d’excuses pour ne pas sortir en dehors des heures de travail. Non, je n’ai pas l’intention de me les geler pour aller siroter un cocktail à 22 $ dans un bar où tout le monde postillonne à force de crier pour parler par-dessus la musique.

J’ai trouvé mon salut dans All’s Fair, la nouvelle série du prolifique réalisateur et scénariste Ryan Murphy, qui m’a gardée clouée sur mon La-Z-Boy (j’en ai un pour vrai. On est une vieille peau ou on l’est pas).

Pour ceux qui ne le replacent pas, Ryan Murphy s’est fait un nom avec Nip/Tuck, une série audacieuse qui suivait les déboires des patrons d’un cabinet de chirurgie esthétique (ça impliquait beaucoup de gros sexe sale), de même que Glee, Scream Queens et American Horror Story. On lui doit aussi l’adaptation cinématographique du livre à succès Eat, Pray, Love, la série Feud qui revisite des moments d’anthologie de l’histoire américaine et la série sur Jeffrey Dahmer hébergée sur Netflix. En gros, Ryan Murphy, c’est l’un des artisans les plus importants de la télé américaine. Et ce qui fait son succès, c’est son homosexualité assumée comme moteur de création et son p’tit côté camp.

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C’est particulièrement évident dans sa façon de mettre en scène les femmes : devant sa lentille, elles sont soit des divas plus grandes que nature, soit des brats qui ne font aucune concession. Ryan Murphy a le don de miser sur des starlettes pour des rôles consistents (Ariana Grande, Lady Gaga) ou de sortir de vieilles actrices des boules à mites comme Jessica Lange, iconic dans les différents chapitres d’American Horror Story.

Y’a personne qui aime plus les femmes de plus de 50 ans que les hommes gais et c’est une maudite chance qu’ils sont là pour donner des rôles originaux, divertissants, complexes ET SEXY à des actrices admissibles à une carte de la FADOQ.

C’est pas compliqué, chaque matin, Nicole Kidman se lève en remerciant le ciel que des hommes n’ayant aucun lien de parenté avec elle l’appellent « Mother ».

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Chaque « yaaas kween » soufflé dans sa direction repousse d’au moins 3 ans sa retraite. Pareil pour Glenn Close, que tous les gais cherchent à venger devant le refus obstiné de l’Académie du cinéma américain de lui accorder un Oscar. Sinon, on le sait tous que la vieille sèche désignée de l’industrie, c’est Meryl Streep, et que c’est seulement grâce aux films d’époque que des Anglaises austères telles que Helen Mirren, feu Maggie Smith et Dame Judi Dench, parviennent parfois à se faufiler dans le tas.

Et donc, dans le casting d’All’s Fair, on retrouve la vétérane Glenn Close, mais aussi Kim Kardashian, qui joue une version optimisée d’elle-même : une avocate spécialisée dans les crimes sexuels commis contre des femmes riches, habillée comme si elle sortait d’une plaidoirie commanditée par SKIMS, sa compagnie de gaines.

Rappelons d’ailleurs que Kim K caresse le véritable rêve de passer le barreau de la Californie pour suivre les traces de son défunt père avocat, Robert Kardashian, connu pour avoir assuré la défense d’OJ Simpson.

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All’s Fair, c’est tout simplement ridicule à regarder. C’est à la fois une satire, un soap, et un master class en superficialité… Et j’ai tout aimé. Pour vrai, j’ai tellement ri, d’abord parce que tout le monde se bitche en s’exprimant comme dans un sketch de RuPaul’s Drag Race. Ça, c’est synonyme de vulgarité gratuite : il faut entendre le personnage de Sarah Paulson traiter celui de Kim Kardashian de « used cum rag » ou celui de Glenn Close lui répondre que « sa mère aurait dû avaler ».

J’ai ri aussi en écoutant la bande sonore qui regroupe des hits comme Work Bitch de Britney Spears ou Someone to Call my Lover de Janet Jackson qui a récemment connu un regain de popularité sur TikTok.

Mais si je me suis autant amusée, c’est parce que la série est très mal écrite.

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C’est possible de verser dans le camp en soignant les textes et en présentant des intrigues bien ficelées, comme dans les premières saisons de Desperate Housewives par exemple. Mais All’s Fair, c’est une série sans queue ni tête et c’est pas clair à quel point c’est voulu que ça soit aussi caricatural. Moi, je fais quand même le choix de croire que la série est self-aware.

Prenons Kim Kardashian, également productrice de la série. Elle ne se débrouille pas super bien niveau acting, mais en même temps son ton monotone en vocal fry fonctionne à merveille dans un univers où tout le monde est riche et blasé. Sa face figée et botoxée est réaliste, voire justifiable (et carrément justifiée dans un des épisodes), dans cet univers campé dans la réalité du 1 % où les divorces se règlent à coups de millions de dollars.

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Ah, et mention spéciale à ce outfit, qui devrait être l’uniforme de base dans tous les cabinets d’avocats selon moi :

Let me see that thooooong
Let me see that thooooong

Oui, c’est nono All’s Fair, mais les actrices ont du plaisir et ça paraît. Ryan Murphy a même créé un rôle sur mesure pour Jessica Simpson qui joue une bimbo boursouflée avec de grosses babines de suceuse obtenues sous la pression d’un chum narcissique et violent. Il faut la voir susurrer ses répliques avec des prothèses dignes du Cœur a ses raisons pour comprendre que ce show-là nous troll.

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En fait, la seule personne qui détonne vraiment c’est Naomi Watts. La comédienne, impeccable, n’a pas l’air de jouer dans la même série que les autres ; elle n’a tout simplement pas le niveau nécessaire de laisser-aller pour incarner un personnage aussi over the top.

Ce laisser-aller manque aussi cruellement aux critiques qui ont parlé d’All’s Fair comme de la pire série dramatique de tous les temps, en la prenant au premier degré malgré son côté cabotin assumé. C’est de la mauvaise foi et ça se reflète dans le score obtenu par la série sur Rotten Tomatoes : un gros zéro qui en dit plus long sur les critiques allergiques aux objets culturels qui présentent les femmes comme autre chose que des ingénues naïves ou des matrones exemplaires.

All’s Fair met en scène des vaches, des putains et des sorcières.

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C’est un show pour les girlies et les gays. Ryan Murphy a compris depuis longtemps que le meilleur remède à la grisaille ambiante, c’est le glamour, les rebondissements grossiers, les perruques plastifiées, et la conviction sincère que les femmes méchantes sont toujours les plus intéressantes.

Il faut confisquer l’appareil photo d’Annie Leibovitz

C’est ça qui est ça. J’ai poussé un profond soupir en voyant l’édition du mois de décembre du magazine Vogue, qui met en vedette Timothée Chalamet dans ce qui est probablement la couverture la plus laide de l’histoire de l’illustre magazine. Regardez par vous-même :

C’est gênant.

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Je ne sais même pas par où commencer. Tout est hideux : les vêtements (G.I. Joe meets Inspecteur Gadget meets Willy Wonka), la pose (entre toupie Beyblade et mime triste), l’abus de Photoshop et ce fond censé représenter une galaxie, mais qui rappelle plutôt les leggings du même genre vendus pas chers chez Urban Planet en 2011.

It’s giving Pinterest en 2013
It’s giving Pinterest en 2013
It’s giving Pinterest en 2013

Pauvre Timmy. Et à l’intérieur du magazine, ça ne va pas en s’améliorant : l’éditorial en entier rappelle vaguement un clip de Linkin Park circa 2001.

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Pourtant, tout le monde sait que Timothée Chalamet est photogénique et coquet ; il est connu pour repousser les limites de la mode masculine tout en restant suave. C’est dire à quel point il faut vraiment manquer d’inspiration pour rater une photo de lui.

Annie, my love, tu es un monument : tu as révolutionné l’art du portrait et tu as immortalisé un nombre incalculable de stars, de Yoko et John à Demi Moore en passant par Leonardo DiCaprio avec un cygne random autour du cou.

Sauf que ça fait une couple de fois que tu moffes des gens pis tout le monde est trop poli pour te le dire. D’habitude, tu t’acharnes sur les personnes noires : on les a vues, tes photos hideuses dans tous les tons de bruns ternes inimaginables consacrées à Serena Williams, Misty Copeland, Simone Biles et Viola Davis…

La ballerine Misty Copeland par Annie Leibovitz
La ballerine Misty Copeland par Annie Leibovitz
Simone Biles par Annie Leibovitz
Simone Biles par Annie Leibovitz
Viola Davis par Annie Leibovitz
Viola Davis par Annie Leibovitz
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…et on se rappelle de la fois où tu as comparé un LeBron James, un homme noir, à un gorille, King Kong en l’occurrence, pour nourrir l’archétype raciste de la black brute.

LeBron James et Gisele Bündchen par Annie Leibovitz
LeBron James et Gisele Bündchen par Annie Leibovitz

Mais là, je t’avouerais que tu arrives presque à me convaincre que ce n’est pas à cause du racisme que tu sabotes les photos des personnes noires (quoique), mais bien parce que tu as perdu l’œil, sans égard pour ton sujet ; le cover raté de Timmy est là pour en attester.

Annie, malgré mon malaise persistant, je peux volontiers reconnaître ton talent et l’importance que tu as eu dans le monde de l’art. Je n’ai rien à t’apprendre, mais je peux quand même te rappeler que parfois, la meilleure façon de préserver son legs, c’est de se retirer à temps et de le faire avec élégance.

Après un énième photoshoot laitte pour le magazine Vogue, peut-être le temps est-il venu pour toi, à 76 ans, de raccrocher ton objectif pour te consacrer à d’autres hobbies comme le pickleball, ou les cartes, tiens.

Je suis persuadée qu’il y aurait un rôle taillé sur mesure pour toi dans une série de Ryan Murphy. Les jokes s’écriraient toutes seules.

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