Balado
Un cancer stade 4 à 22 ans, perdre ses seins et les sorcières d’Etsy
Gab : Les sorcières sur Etsy
À l’approche de l’Halloween, j’ai envie de parler d’une tendance qu’on n’avait pas vu venir et j’ai nommé : le marché florissant des sorcières Etsy.
Pour les gens qui ne sont pas fan de macramé, Etsy est une plateforme où des créateurices et des petites entreprises vendent indépendamment des produits faits à la main ou vintage. C’est un peu comme un marché aux puces, mais en ligne.
Pis là, y’a comme une autre offre qui s’est développée dans les dernières années, soit celle de sorcières qui vendent des sorts personnalisés. Ces services-là coûtent pas super cher, et promettent pas mal d’affaires. Au Québec, j’ai trouvé une sorcière qui propose une trousse de sorts et de rituels pour Le jour du déménagement à Montréal pour la modique somme de de 21,98$. Mais ça, c’est des gros prix, parce que j’ai aussi vu des « Bring Back Your Ex Spells » à 5,44$.
Une fois que tu as payé la sorcière, elle exécute le sort avec son pouvoir ou son énergie, (c’est pas clair pour moi), et tu reçois une photo comme preuve que le rituel a bien été complété.
Y’a deux évènements qui ont contribué à la montée en popularité des sorcières Etsy cette année, et si vous êtes pas chronically online, ils sont probablement passés sous votre radar. D’abord, il y a une influenceuse méga riche, Becca Bloom, qui a affirmé avoir fait appel à une sorcière Etsy pour « contrôler la météo » le jour de son mariage en Italie, parce qu’il annonçait de la pluie. Finalement, le ciel s’est éclairci au moment de la cérémonie et les photos de son mariage dans Vogue sont super belles.
Ensuite, il y a eu l’affaire où deux jours avant l’assassinat de Charlie Kirk, le site féministe américain Jezebel a publié un article dans lequel il mentionnait que la journaliste avait engagé plusieurs sorcières Etsy pour jeter un sort à Charlie Kirk. Pas des vœux de mort, mais plus des sorts pour que tout le monde se mette à le détester.
Après l’évènement, les recherches Google pour « Etsy witch » ont augmenté de plus de 600 %, et les sorcières qui avaient jeté les sorts ont été bannies de la plateforme.
Qu’on croie au pouvoir des sorcières ou pas, on sait bien qu’il n’y a pas de preuve que les sorts fonctionnent.
Un peu comme les voyantes ou les marabouts qui vendent leurs services dans les petites annonces du Journal de Montréal, on peut se demander à quel moment ces sorcières-là tracent la ligne entre faire profiter le public de leurs pouvoirs et charger du monde anxieux.
Dans le fond ici, on transforme des pratiques spirituelles en services et on marchandise la spiritualité. Y’a d’ailleurs des universitaires qui ont pensé la notion de capitalisme spirituel, une théorie qui soutient que la spiritualité contemporaine fonctionne comme un marché de biens symbolique, où les entreprises, les coachs et les sorcières, par exemple, promettent de la guérison morale ou du sens existentiel, toujours dans le cadre d’un échange de cash.
En gros, la spiritualité devient une ressource économique : elle sert à vendre un état de bien-être ou une nouvelle étape du développement personnel plutôt qu’à nous accompagner dans nos difficultés.
Salomé : perdre ses seins
Je sais pas pour vous, mais moi, en pensant, aux femmes atteinte du cancer du sein, j’ai longtemps eu une image bien précise en tête : celle d’une femme dans la cinquantaine qui est tombée sur un « bon cancer », un cancer dont on guérit.
J’avais tort, comprendrez-vous.
Non seulement on ne guérit pas toujours de cette maladie, mais elle frappe aussi de plus en plus de jeunes femmes. En 35 ans, les cas ont bondi de 45 % chez les femmes dans la vingtaine et de 15 % chez celles dans la trentaine, selon une étude publiée en 2024 dans le Canadian Association of Radiologists Journal.
C’est très inquiétant, surtout considérant que ce cancer est plus difficile à déceler chez les jeunes, qui ne consultent pas régulièrement comme le font des femmes un peu plus âgées, et dont les seins plus denses compliquent l’imagerie médicale. Chez les jeunes, ce cancer tend donc à être diagnostiqué à un stade plus avancé de la maladie.
C’est ce qui est arrivé à Ève, 22 ans, qui est avec nous aujourd’hui, et qui est atteinte de stade 4.
Durant la chimiothérapie, la perte de ses cheveux et les changements dans son visage lui ont donné le sentiment de perdre une partie de sa féminité. Et la mastectomie n’a pas aidé à apaiser ce sentiment.
Voulant préserver cette partie d’elle-même, elle a opté pour reconstruction mammaire, qui lui était vendue comme une opération simple.Mais des complications l’ont mené à perdre son sein droit.
Aujourd’hui, elle apprend à aimer son nouveau corps, à ne plus le percevoir comme un objet médical, et à retrouver sa féminité.
Pour mon Micromag, je suis allée à la rencontre d’Ève, mais aussi de trois autres femmes qui ont dû dire adieu à leurs seins en raison de la maladie.
Une jeune mère célibataire qui avait hâte que de se débarasser de ses seins, et avec eux de son cancer
une amoureuse de la culture vintage et swing pour qui qui des séances photos de style « pin-up » l’ont aidée à se sentir belle et forte après l’opération, et une femme queer qui est bien heureuse d’avoir opté pour l’opération préventive, et qui sent que sa nouvelle poitrine est en accord avec sa présentation de genre plus fluide.
Quatre femmes, quatre parcours différents, mais une même résilience face à la maladie et au deuil de ses seins.

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