Courrier recommandé
Soleil Launière et Aïcha au Festif de Baie-St-Paul
Les musiciennes Soleil Launière et Aïcha Bastien N’Diaye ont répondu aux questions de Courrier recommandé lors du Festif! de Baie-St-Paul.
« Être » avant d’éduquer : un défi constant
Dans une société où les identités sont multiples, mais trop souvent mal comprises, éduquer devient parfois une tâche imposée plutôt qu’un simple choix. C’était l’un des thèmes centraux explorés dans cette conversation. « Est-ce qu’on vous demande souvent d’éduquer alors que vous voulez juste être ? » réfléchit Aïcha Bastien N’Diaye. Une question qui, bien qu’anodine à première vue, soulève des vérités complexes liées aux pressions sociales.
Dans la vie quotidienne, certains gestes ou décisions, même banales, peuvent involontairement devenir un acte d’éducation. Porter un afro, nommer son enfant d’un prénom issu d’une culture autochtone ou simplement répondre à des questions mal formulées : tout ça devient un moment pédagogique, souvent non souhaité. Cette réflexion pousse à se demander : pourquoi est-ce à certaines communautés de porter le poids de l’enseignement, même dans des interactions aussi banales que marcher dans la rue ou s’intégrer à un événement social ?
Une quête de fierté et de représentation authentique
Le sujet des représentations diverses est également venu teinter la réflexion. « Ça m’avait vraiment fâché », s’exclame Soleil Launière en rappelant une discussion sur les « coureurs des bois » qui, pour certains, ne pouvaient être que blancs et québécois. Cette anecdote illustre non seulement l’importance de la représentation, mais également la violence des stéréotypes qui persistent encore aujourd’hui.
« Le besoin de représentations diverses réelles », comme le dit Aïcha Bastien N’Diaye, ne devrait pas être une revendication d’exception. C’est un besoin, une urgence, d’entendre et de voir des histoires provenant de diverses perspectives afin de refléter réellement les sociétés contemporaines et d’apaiser des perceptions cloisonnées.
Au lieu d’être constamment réduit à expliquer ou à se défendre, il est simplement question de vivre (et célébrer) son individualité. Chaque geste ou moment de transmission culturelle, même un prénom, devient un acte de réaffirmation important. Toutefois, cette exigence d’éducation, voulue ou non, impose une réelle charge mentale.
Entre souvenirs musicaux et identité culturelle
Dans cet échange riche, un autre élément marquant était la portée des souvenirs musicaux et leur lien avec les identités personnelles. Écouter un morceau de country dans son auto ou fredonner des classiques issus de notre enfance, voilà des moments qui unissent et renforcent nos souvenirs les plus chers. « Moi, toutes les chansons de cette cassette, je pense que ce sont des plaisirs coupables », avoue Soleil Launière en se rappelant d’une mixtape qui jouait tout le temps dans la voiture de sa mère.
Ces titres marquent souvent des expériences de vie, ancrées dans une culture familiale ou générationnelle, et deviennent des symboles universels de réconfort pour toutes les communautés. Ce lien soulève une vérité universelle : l’attachement émotionnel et identitaire à certains éléments culturels transcende souvent les étiquettes sociales ou les frontières géographiques.
Collaboration et création : un besoin d’espace et de partage
Un autre sujet poignant abordé dans la discussion est l’importance de la collaboration dans les milieux créatifs. « J’adore travailler en collaboration », explique Soleil Launière. Mais pour qu’elle soit effective, il faut du temps, de l’écoute et de l’humilité. Dans un espace où l’efficacité prime souvent sur la profondeur humaine, plusieurs regretteraient des collaborations expéditives, manquant de sincérité et de respect mutuel.
Ces collaborations, lorsqu’enrichies par la diversité et des dialogues respectueux, peuvent devenir des vecteurs puissants pour déconstruire des barrières culturelles tout en créant un impact durable.
Une conclusion sans fin : vivre et être soi
En conclusion, ce récit entre introspection et anecdotes personnelles témoigne d’une réalité complexe. L’identité, qu’elle soit culturelle, émotionnelle ou artistique, s’exprime à travers de multiples petits gestes. Pourtant, la pression omniprésente d’éduquer peut compliquer cet épanouissement simple et naturel. Entre souvenirs musicaux, réflexions culturelles et espoir d’un avenir plus inclusif, cette conversation montre qu’il est plus que temps de normaliser la diversité et de laisser les gens être ce qu’ils veulent : eux-mêmes.

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