La montée des benzodiazépines : un fléau chez les jeunes
Les benzodiazépines, bien que peu connues du grand public sont en hausse de popularité, notamment chez les jeunes, avec des médicaments comme le Xanax qui s’imposent sur le marché récréatif. À l’origine prescrit pour la gestion de l’anxiété, le Xanax prodigue un effet calmant qui attire de plus en plus de jeunes en quête d’évasion.
Au Québec, environ 30 000 personnes consomment des benzodiazépines sous prescription. Parmi elles, près de la moitié sont des personnes âgées, mais ce chiffre masque une réalité plus sombre : une consommation alarmante chez les adolescents.
« Leur usage chez les jeunes a doublé depuis 2016 », affirme le Dr Nicolas Chadi, pédiatre et chercheur en médecine de l’adolescence. Selon lui, le Xanax et ses dérivés attirent, car ils sont peu coûteux et agissent rapidement, provoquant une sensation d’engourdissement autant physique que psychologique. Ce cocktail d’apaisement immédiat peut se transformer en piège, la dépendance s’installant sournoisement, souvent après seulement quelques mois d’utilisation non encadrée.
Le danger est d’autant plus grand qu’une consommation régulière à cet âge, alors que le cerveau est en cours de développement, peut entraîner des séquelles irréversibles. « Certaines zones du cerveau pourraient ne pas se développer comme prévu, entraînant des conséquences à long terme telles que la dépression, l’anxiété ou même des problèmes psychotiques », met en garde le Dr Chadi.
Ce fléau s’est aggravé avec l’émergence de produits de rue souvent coupés avec des opioïdes ou de l’alcool, rendant les risques de surdose mortelle bien réels. En 2021, la moitié des décès par surdose de drogues comportaient des traces de benzodiazépines.
Et pourtant, l’influence de la culture populaire joue un rôle dans cette démocratisation. Le hip-hop en particulier a contribué à intégrer le « Xanny » dans l’imaginaire collectif des jeunes. Depuis les années 2010, les références à ces médicaments se multiplient dans les textes de nombreux rappeurs, banalisant leur consommation et exacerbant leur attrait de flottement.
Steve Cabana, éducateur en prévention des toxicomanies en milieu scolaire, témoigne des défis liés à cette problématique que l’on ne peut plus ignorer. Selon lui, l’essor des benzodiazépines parmi les jeunes est avant tout symptomatique d’une société en proie à une anxiété croissante. « Ces médicaments sont un plaster », analyse-t-il, citant la pression sociale, le mal-être adolescent et l’influence des pairs comme des moteurs qui mènent vers les anxiolytiques.
Pour sa part, le Dr Fouhad Saher, psychiatre, met en garde contre la surprescription. Il plaide pour une utilisation stricte et limitée. « Ces médicaments, bien qu’efficaces à court terme, sont si puissants qu’ils incitent souvent les patients à en redemander », prévient-il.
Que signifie la prévalence des benzodiazépines dans notre société? Révèle-t-elle un mal-être générationnel? Le traitement de ce problème demande peut-être de repenser notre approche face à la détresse des jeunes dans une société toujours plus complexe et exigeante.
Si vous souhaitez en apprendre davantage sur le sujet, l’épisode de la série documentaire Substances consacré au Xanax et autres benzodiazépines est disponible dès maintenant sur la plateforme de Savoir Média.