La job facile des influenceurs, remercier ses amis et des recommandations culturelles
La job facile des influenceurs, remercier ses amis et des recommandations culturelles
Gab : le Millenial Thank you Note
L’autre jour, on est allées pique-niquer ensemble avec notre groupe d’amies. Ma fille était là, vous avez joué avec elle, il faisait beau, c’était le fun, bref, j’ai eu une belle soirée. En allant me coucher, j’ai voulu vous envoyer un petit message : « Aw, merci pour la belle soirée, j’étais super contente de vous voir, je vous aime ! ».
Mais quelle ne fut pas ma surprise quand, en ouvrant mon téléphone, je suis tombée nez à nez avec une publication du média américain Bustle qui allait comme suit : les milléniaux qui envoient des messages à leurs amis après une soirée donnent l’impression que ces chillings-là sont leur seule raison de vivre. Je paraphrase, mais tu comprendras que je me suis sentie visée.
Après le millenial side part et le millenial tuck, je réalisais avec horreur que mon petit texto rempli de bons sentiments était lui aussi une preuve de ma vieillesse. Serai-je devenue cringe ?
La Millenial Thank You Note – ou le petit mot de remerciement des milléniaux (ma traduction) –, c’est apparemment une affaire de génération. Selon ma source d’information très fiable, Internet, la Gen Z envoie elle aussi des petits mots de remerciements à leurs amis, mais elle le ferait de manière plus ironique, genre : « Merci de m’avoir sauvé de la déprime ce soir xoxo ».
Les Gen Z ont grandi avec l’internet. Plusieurs d’entre eux et elles ont même vécu une partie de leur scolarité en ligne durant la COVID, ce qui a certainement changé leur manière de voir les amitiés – pour eux, la frontière entre chiller en ligne et chiller en vrai est plus poreuse. Dans la grande pyramide de Maslow des Gen Z, bruncher avec ses chums n’est donc pas au top.
Pour nous, les milléniaux, c’est pas la même affaire. On est plus vieux que les Gen Z. On a donc moins de temps à consacrer à nos amitiés parce qu’on est trop occupés à aller jouer au pickleball, à acheter des fraises à 8$ au Marché Jean-Talon et à essayer de trouver une place en CPE à notre enfant. Ça fait que quand on réussit à faire notre maudit souper qu’on a dû déplacer 3 fois, on est #grateful en criss. La Millenial Thank You Note, c’est peut-être aussi une manière de dire « ne m’oublie pas » à nos amis sans avoir l’air trop désespéré.
Flo : juger les influenceurs
Gab, cette semaine, j’suis tombée sur un extrait d’un balado où voit essentiellement Lysandre Nadeau dire une affaire qui est quand même tabou : elle admet que c’est facile, sa job d’influenceuse.
Dans les commentaires, y’a plein d’infirmières, de travailleuses sociales pis d’éducatrices en CPE qui disent : « Hey, merci. Enfin quelqu’un qui l’avoue. »
Fa’que là je me suis demandé : pourquoi ce soulagement collectif? Pourquoi on avait besoin d’entendre ça? C’était comme si on se disait : fiou, les faits sont rétablis.
On se fera pas de cachettes : on juge le métier d’influenceur. C’est peut-être pour ça que dans le milieu de la création de contenu, on sent, peut-être, souvent le besoin de rappeler la difficulté à comprendre les algorithmes, la discipline que ça prend pour percer en ligne pis des défis qui viennent avec le fait de s’exposer. Pis tout ça, c’est full vrai, même si cette réalité-là se compare pas à faire du temps supplémentaire obligatoire de nuit, la fin de semaine, avec des patients désorganisés qui te crachent dessus. Pick your poison comme on dit.
Donc je pense pas que ce soulagement-là vient d’un besoin de rabaisser les influenceurs. C’est peut-être juste un besoin de dénoncer une genre de crise de la reconnaissance. Même si on aimerait ça dire qu’il y a une belle corrélation toute droite entre les métiers où on souffre un peu et notre mérite ou le respect qu’on sent qu’on nous accorde en société, bin c’est juste pas le cas. La réalité, elle est pas mal plus complexe que ça :
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Un métier peut-être physiquement exigeant… et qu’on conçoit comme plus ou moins utile. (ex. assembler des balles de golf dans une usine)
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Il peut être super vulnérabilisant… et mal payé (ex. toutes les jobs en communautaire)
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Il peut ne pas sauver de vies… et être super valorisé en société. (ex. vendre de la pub pour Pepsi dans une grosse agence)
Bref, ça gosse un peu de s’admettre collectivement que la visibilité est pas toujours proportionnelle à la difficulté, ni à l’utilité sociale. Pis la dure vérité, c’est que quand t’as un métier qui est facile et payant, c’est généralement parce que ça prend un certain talent. Et j’ai l’impression que c’est dur d’admettre que les créateurs de contenu ont du talent.