Notre-Dame du Stand-Up
Joe Guérin
Joe Guérin
« Repérez les sorties de secours, parce que je suis en feu! »
Originaire de Beauharnois, Joe Guérin est humoriste et tatoueur. Donc, si vous avez une décision importante à prendre dans les prochains jours, c’est peut-être pas la personne à aller consulter.
Après avoir assuré la première partie de Korine Côté et Richardson Zéphir et animé pendant 3 ans les soirées open mic du Bordel, Joe était prêt à ajouter une nouvelle ligne à son CV en se joignant au dernier line-up de Notre-Dame du Stand-up.
On le sait, vous n’avez pas fait votre leçon sur DuoLingo et vous commencez à craindre que le hibou vert ne vous attende au rack à bicyc’ après votre shift. Mais ne vous en faites pas : Joe Guérin est là pour vous faire réviser votre néerlandais et hongrois. Deux langues très pratiques à connaître à Montréal.
Une soirée animée où se mêlent souvenirs d’école, anecdotes du métro et réflexions brillamment absurdes : c’est ce que Joe Guérin a offert sur scène devant un public conquis. Avec son style nonchalant et son humour à la fois intelligent et décalé, il réussit à transformer des situations banales en sketches drôlement mémorables. Retour sur une performance qui capture l’air du temps avec finesse et auto-dérision.
Publicité gratuite et autodérision
Dès les premières minutes, Joe Guérin prend d’assaut la scène en s’adressant directement au public pour annoncer… une publicité gratuite. Parce que, dit-il, « aujourd’hui, ça coûte cher avoir de la publicité tout le temps », il choisit de mettre de l’avant une coiffeuse spécialisée dans les tresses, dénichée sur Instagram sous le pseudo « sonia.8377 ». Un clin d’œil comique à l’économie de l’attention dans un monde saturé de contenus payants, et un exemple parfait de ce que serait une publicité version stand-up.
Enchaînant avec un ton volontairement irrévérencieux, il se moque gentiment de ses débuts en humour, de son ancien camarade de classe… et de lui-même. « Il a commencé deux semaines après moi… c’est peut-être pour ça qu’on dirait qu’il y a un léger retard », lance-t-il à propos d’un collègue humoriste. Le ton est donné : Joe Guérin manie l’autodérision comme une arme humoristique de précision.
Les transports publics et leurs héros méconnus
Le métro et la STM deviennent rapidement des terrains de jeu comiques. Il raconte une anecdote improbable mais universelle : un homme qui « réserve » un siège dans le métro en y déposant son manteau. Cette scène anodine sert de tremplin à une longue série d’élucubrations, notamment sur la possibilité que d’autres gestes absurdes aient en fait des justifications secrètement logiques.
Guérin imagine ensuite une patrouille de la STM composée de wagonnets à pomper à la main, à la manière d’un dessin animé. Un gag visuel irréaliste mais brillamment hilarant – imaginez une brigade chantant « Hi ho » en descendant les rails du métro pour arrêter un voleur de sacoche. Une critique déguisée mais savoureuse de l’inefficacité perçue du système de transport.
Langue, chiffres et lois étranges
Son humour touche aussi à la langue et à l’absurde linguistique : les gens qui disent « tournade » au lieu de « tornade », ou encore ceux qui prononcent « popcorn » comme « popcorne »… selon lui, certains mots mériteraient une réinterprétation sonore. Il pousse même la réflexion vers l’« anarithmétisme » – l’analphabétisme des chiffres – et imagine une personne incapable de lire l’écriteau « Trois-Rivières ». « Ça doit être angoissant de savoir juste à moitié où est-ce que t’habites », plaisante-t-il.
Autre moment marquant : sa réflexion sur les lois entourant la sécurité des enfants et des animaux laissés dans des voitures en été. Il dénonce avec ironie à la fois le bon sens parfois absent de certains citoyens et les limites floues de ce qu’on considère comme « aimable ». Peut-on casser la vitre d’un auto pour sauver un chien ? Et une figurine Owen Roy ?
De l’absurde maîtrisé à la critique sociale douce
Joe Guérin ne fait jamais de militantisme agressif. Son arme, c’est l’observation. Son outil, le rire. Chaque anecdote, même la plus ridicule, est livrée avec une légèreté qui cache une certaine lucidité sur les habitudes, les absurdités et les lois tacites de la société urbaine. Il joue avec les mots, les codes et les références culturelles comme le ferait un jazzman avec sa mélodie.
En bref, si vous aimez l’humour pince-sans-rire, l’absurde maîtrisé et les regards complices sur le quotidien montréalais, Joe Guérin a ce qu’il vous faut. Et la prochaine fois que vous croiserez une pancarte étrange ou un manteau sur un banc, repensez-y : peut-être êtes-vous au cœur d’un numéro de stand-up en devenir.
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