Florence-Agathe Dubé-Moreau : Est-ce qu’on peut être féministe et sortir avec un sportif?
Est-ce qu’on peut être féministe et sortir avec un sportif?
Quand Florence-Agathe Dubé-Moreau répond à cette question, elle s’attaque à bien plus qu’une simple relation amoureuse. Elle ouvre un débat sur l’industrie du sport et le féminisme, armée d’un regard aiguisé et d’une expérience personnelle unique.
Une rencontre entre art, sport et féminisme
Historienne de l’art et commissaire indépendante, Florence-Agathe Dubé-Moreau s’est retrouvée parachutée en 2014 dans un univers inattendu : la NFL. Quand son partenaire, Laurent Duvernay-Tardif, a été repêché par les Chiefs de Kansas City, elle a plongé dans une industrie où les femmes sont souvent invisibles ou stigmatisées. Cette expérience est devenue le point de départ de son livre et de sa réflexion sur la place des femmes dans le sport professionnel masculin.
Avec son livre Hors jeu, Florence-Agathe explore les rôles multiples des femmes dans cet univers, des conjointes aux cheerleaders, en passant par les arbitres et les coachs. « J’ai voulu créer une cartographie de ces femmes et réfléchir à leur place dans cette industrie », dit-elle.
Déclic dans un bar sportif
Un moment charnière de son cheminement? Un soir dans un bar, entourée d’écrans géants diffusant uniquement des sports masculins. « On le sait, 96 % du temps d’antenne sur une chaîne sportive est dédié au sport masculin, alors que 40 % des athlètes sont des femmes », déplore-t-elle.
Les conséquences sont graves. Les jeunes filles décrochent du sport à un rythme alarmant, faute de modèles inspirants. Florence-Agathe cite des rapports fédéraux qui pointent cette invisibilisation comme une des causes majeures.
Les « WAGs » : entre stéréotypes et travail invisible
L’acronyme « WAGs », pour « wives and girlfriends », a longtemps été utilisé de façon péjorative. Florence-Agathe, qui s’est elle-même retrouvée étiquetée ainsi, critique ce stéréotype. « Ces femmes prennent 100 % de la charge mentale, domestique et émotionnelle. Elles forment un filet de sécurité pour les joueurs, sans aucune reconnaissance », explique-t-elle.
Elle appelle les grandes ligues à agir : offrir des services comme des garderies pour soutenir ces femmes serait un geste simple mais significatif.
Les cheerleaders : athlètes marginalisées
Pour Florence-Agathe, le féminisme passe aussi par la reconnaissance des cheerleaders. « Ce sont des athlètes de haut niveau, des danseuses professionnelles et des gymnastes incroyables », dit-elle. Pourtant, ces femmes ont longtemps été sous-payées, voire pas payées du tout.
Elle souligne leur courage pour dénoncer leurs conditions de travail ces dernières années, une mobilisation qui a poussé certaines ligues à améliorer les choses.
Une industrie à la traîne
Malgré quelques progrès, l’industrie du sport reste en retard. « La première coach dans les grandes ligues masculines, c’était en 2014. La première arbitre en 2015. Ici, au Québec, on a vu des femmes à des postes de direction… en 2023! »
Mais Florence-Agathe croit au potentiel du sport pour porter des changements sociaux. Elle cite les mobilisations politiques après la mort de George Floyd comme exemple de l’impact que les athlètes et les ligues peuvent avoir sur la société.
Réécrire les règles du jeu
À travers son livre, Florence-Agathe offre une réflexion nuancée et intime sur sa propre place dans ce monde. « J’ai appris que je pouvais avoir ma propre définition de ce que signifie être une WAG et que c’était correct de ne pas correspondre parfaitement à cet univers. »
Son espoir? Que ce livre inspire à rêver d’un sport plus égalitaire et solidaire, porté par la reconnaissance et la valorisation du travail des femmes.
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