Aux frontières du réel
Le court métrage québécois a son meilleur allié : Danny Lennon. Depuis 25 ans, il est l’âme derrière Prends ça court!, une initiative qui a fait découvrir et rayonner le format court aux quatre coins du monde. URBANIA est allé à sa rencontre au cinéma Haskell, une salle unique située à cheval sur la frontière canado-américaine.
Un passionné du grand écran
Danny Lennon est un puriste du cinéma : « Moi, j’aime encore la salle. Quand la lumière ferme, j’oublie tout le reste. » Il croit que la magie du cinéma en salle peut encore captiver une nouvelle génération, malgré l’omniprésence des plateformes numériques.
Installé à Stanstead, il contribue à faire revivre le cinéma Haskell, une salle d’opéra datant de 1904. Ce lieu chargé d’histoire, autrefois au cœur de la route entre Boston et Montréal, était le théâtre de la vie nocturne de l’époque. Aujourd’hui, Lennon et son équipe y projettent des films depuis un peu plus d’un an, sans publicité ni budget marketing. « On a créé des addicts. »
Prends ça court! : d’un projet underground à une institution
Lancé à une époque où YouTube n’existait pas, Prends ça court! est d’abord né d’une envie de partager des films méconnus. « Les gens venaient, c’était une confiance aveugle. » Au fil des ans, les projections mensuelles ont pris de l’ampleur, jusqu’à devenir un rendez-vous incontournable du court métrage au Québec.
Lennon a aussi voulu secouer l’industrie, qui négligeait le court métrage : « Le plus gros festival au Québec donnait 200 piasses pour un court. Qu’est-ce que tu vas faire avec 200 piasses? » Il a donc mis sur pied un gala, non sans une pointe d’ironie, pour donner aux courts la reconnaissance qu’ils méritent.
Un art sous-estimé, mais essentiel
L’un des combats de Lennon, c’est de défendre l’audace dans le cinéma québécois. Selon lui, le système formate les jeunes cinéastes trop rapidement : « Sois pas audacieux, n’expérimente pas, fais ton petit film cute pour rentrer dans les institutions. »
Mais pour lui, ce sont les films qui virent fous qui restent. Il cite Fauve de Jérémy Comte, un court métrage québécois qui a percé à l’international, comme un exemple de réussite rare.
Un autre film qui l’a profondément marqué? Le Temps des bouffons de Pierre Falardeau. « C’est un film parfait. L’audace, le ton… Oh my God! » Il continue de le projeter à travers le monde et chaque fois, l’impact est immédiat.
25 ans et un rayonnement mondial
Pour célébrer les 25 ans de Prends ça court!, Lennon a créé un programme malléable de projections, présenté dans plus de 56 pays. « J’ai arrêté de compter à 114 projections. Pourquoi compter? J’ai pas de rapport à faire. »
Ce qui l’importe, c’est partager le cinéma, peu importe où et avec qui. Que ce soit à Oulan-Bator ou à Washington, il veut que les courts métrages québécois soient vus, ressentis et discutés.
Parce qu’au final, le court métrage, c’est l’essence du cinéma, et Danny Lennon en est le plus fervent défenseur.