S’humilier pour connaître le succès avec Charles Beauchesne
S’humilier pour connaître le succès avec Charles Beauchesne
Cette semaine, Gab parle à la « cringe mountain » que les créateurs doivent traverser avant de connaître le succès, Flo s’intéresse aux party de Botox et de ce qu’ils disent sur l’intérêt grandissant des jeunes pour la prévention du vieillissement, et elles accueillent Charles Beauchesne, animateur du balado Les Pires Moments de l’histoire, qui va bientôt lancer sa 7e saison.
Gabrielle : 🏔️ la cringe mountain
Florence aujourd’hui, je te parle de quelque chose qu’on est en train de gravir et j’ai nommé: la cringe mountain. C’est une théorie très populaire sur TikTok, et ça fait longtemps que je voulais t’en parler.
La cringe mountain, ou montagne du cringe, est une courbe difficile à surmonter que tous les créateurs et créatrices de contenu, mais aussi les artistes, doivent franchir pour arriver dans le « land of cool ».
L’idée, c’est que pour devenir bon dans quelque chose, il faut faire des essais-erreurs, rater des trucs, bref, faut se planter. Et quand on veut s’améliorer dans un domaine comme le stand up, l’apprentissage d’une nouvelle langue, ou tiens tiens, le podcast, ces erreurs-là, il faut les faire dans le domaine public. On va pas enregistrer des épisodes de podcast dans le sous-sol du bureau pendant des semaines (ben, on l’a déjà fait) : on va les diffuser pis si c’est pas bon, tout le monde va pouvoir les écouter et être mal à l’aise.
C’est vraiment un concept qui est poussé pour les créateurs et créatrices de contenu et les entrepreneurs qui veulent développer leur « personal brand ». Y’a plusieurs personnes sur TikTok qui coachent les gens pour leur apprendre comment passer par-dessus la fameuse montagne.
Ce qui est cool, c’est que ça t’encourage à faire des erreurs, à te foutre de l’opinion des autres. La plupart des vidéos sur TikTok utilisent la fameuse ritournelle : les gens qui rient de toi ont juste pas le courage de le faire, soyez fiers de vous, vous allez y arriver! Les plus grands entrepreneurs, artistes et créateurs sont passés par là!
Mais moi ma question, c’est : qu’est-ce qui se passe si on reste pogné dans la montagne? On s’entend que c’est pas tout le monde qui va percer, ou qui est assez bon pour gagner sa vie avec ses créations, ou même faire plus que 500 vues par vidéo. C’est tu une autre crosse comme le livre Le Secret ou le concept de manifestation ?
Florence : 💉Botox parties
Gab, cette semaine, je voulais te jaser d’une affaire qui se répand partout mais dont on parle peu : le Botox. Plus spécifiquement, du rapport des jeunes au Botox.
J’pars ça avec des chiffres. En 2022, selon l’American Society of Plastic Surgeons, la majorité des injections de Botox, aux États-Unis, étaient faites sur des patients d’entre 40-54 ans. Mais entre 2019 et 2022, les injections de Botox ont bondi de 71 % chez les 20-29 ans et de 75 % chez les moins de 19 ans. C’est pas rien.
Beaucoup de choses expliquent le phénomène-là.
D’abord, on peut blâmer la tendance au Baby Botox. Le Baby Botox, ça consiste à faire des injections dans des endroits où des rides ne sont pas encore formées, pour les éviter avant même qu’elles n’apparaissent. Ce genre de pratique-là appartient à un tendance plus vaste de prejuvination. On le compare souvent à la rejuvination pour l’expliquer, parce qu’essentiellement, c’est l’idée de prendre une approche « prévenir plutôt que guérir » au vieillissement.
Y’a aussi toute une culture de réappropriation des standards de beauté par les femmes qui contribue au phénomène. Sur les réseaux sociaux, les botox parties sont populaires. Le concept est simple : on se réunit au spa ou à la maison, on fait venir un traiteur, peut-être même un DJ, pis on se fait faire des injections dans un ambiance 5 à 7. Bref, on s’assume, on fait un beau gros fuck you au monde qui jugent ça, pis c’est peut-être pas une mauvaise chose.
MAIS il faut pas oublier que le Botox, ça coûte en moyenne entre 300 et 500$ par séance d’injection à une vingtenaire qui se lance là-dedans, et que y’a une dimension addictive à ça : il faut en refaire aux 3 à 4 mois pour que l’effet perdure – tout ça, pendant la décennie la plus déterminante de sa vie sur le plan financier.
Y’a aussi des dermatologues qui soulèvent que trop de Botox, du Botox botché (genre fait dans un contexte pas sanitaire ou avec des produits du marché noir) ou du Botox fait trop tôt, ça peut ironiquement vieillir quelqu’un qui n’a pas encore de rides, et même rendre le traitement moins efficace plus tard, quand les rides apparaissent vraiment.
Bref, j’finis là-dessus : y’a un article de Dazed super intéressant qui compare les party de Baby Botox, aux soirées Tupperware, nées dans les années 50, qui combinaient socialisation et capitalisme. C’est pu des plats en plastique, mais y’a d’quoi se demander si l’idée reste pas un peu la même : une pseudo-émancipation dans un système patriarcal toujours bancal. Ça donne une impression d’indépendance, mais en réalité, ça impose aux jeunes femmes un cadre limitant : celui de coller à des standards qu’elles ont pas vraiment choisi, et qui les appauvrit.