Payer pour la vibe au resto, être laide à cause de la récession et être trois parents
Payer pour la vibe au resto, être laide à cause de la récession et être trois parents
Cette semaine, Gab se demande ce que les restos cool veulent dire sur notre rapport à l’argent, Flo se demande comment la repousse des blondes peuvent être un baromètre économique et elles invitent leur collègue journaliste Salomé Maari pour parler de son micromag sur la pluriparentalité, qui est maintenant reconnue légalement.
Les restos cool : https://vm.tiktok.com/ZMBcTcXRS/
Elizabeth May qui chante : https://www.tiktok.com/@nowtoronto/video/7488432930952416554
Les outfits du Gala Dynastie : https://vm.tiktok.com/ZMBcw8vcQ/
Gab : Est-ce que les restos sont rendus trop cool ?
On vit un grand problème de société à Montréal en ce moment. À l’heure actuelle, plusieurs restos et cafés magnifiques ouvrent leurs portes un peu partout dans la métropole. Et grâce au pouvoir de la gentrification, on assiste même à l’ouverture de cafés et buvettes cool dans des quartiers qui ne le sont historiquement pas, comme Lachine, ou même – sacrilège – sur la Rive-Sud.
Ces établissements-là sont souvent très beaux, super design et possèdent une ambiance super agréable. Le service ? Tip top. Le néon en forme de lasagne ? Présent. Sauf que la bouffe, elle, là-dedans, ou même la qualité du café, est parfois mise de c ôté au profit de l’ambiance et du look du resto. Pas toujours, précisons-le, mais parfois.
Là, rassure-toi : j’ai pas envie de tomber dans un discours moralisateur ou même nihiliste de « les jeunes vont aux restos pour se prendre en photo et ne profitent plus du moment présent, les gens vivent leur vie à travers leur téléphone, ya di da » parce que ben, c’est vrai en partie, mais c’est aussi pas de ça dont je veux parler aujourd’hui.
Oui, les réseaux sociaux ont créé des effets de mode autour de certains restos, comme Le petit Dep de Noël, sur Saint-Laurent, qui était partout sur TikTok dans le temps des Fêtes, et où on retrouvait beau temps mauvais temps une immense file d’attente.
En même temps, TikTok et Instagram ont aussi permis de faire connaître des endroits qui seraient peut-être restés dans l’oubli sans cette promotion. Plus que la critique, le bouche à oreille a toujours été le meilleur allié marketing des restos, et dans une ville comme Montréal, où on compte entre 4 700 et 5 000 restos selon les sources, donc environ 3 restos par 1000 habitants, il faut aussi se démarquer pour garder la tête hors de l’eau.
Puis finalement, faut aussi prendre en considération quelque chose d’important : avec l’augmentation du coût de la vie, on a moins les moyens d’aller au resto qu’avant. Ça, ça veut dire que quand on y va, on veut en avoir pour notre argent.
C’est peut être un de mes nombreux hot takes, mais je pense que quand on va au resto bien sûr, on veut de la bonne bouffe, mais on cherche surtout une expérience. On veut un bon service, une belle ambiance et pourquoi pas, faire des belles stories si ça nous tente. Puis c’est peut-être ça, en fait, qui a causé le boom de restos au look cool à Montréal : notre besoin de sentir qu’on jette pas notre argent par les fenêtres.
Flo : le blond récession
Gab, je t’annonce que les signes d’une récession sont pas juste dans les tableaux de Gérald Fillion ou les chroniques de McSween – sont aussi dans ta teinture. Cette semaine, j’avais envie qu’on parle d’un terme qui a été pas mal populaire sur TikTok dans les dernières semaines et c’est « recession blonde », ou « blond récession ».
Le « blond récession », c’est une théorie selon laquelle, en période de difficultés économiques, on voit des racines foncées apparaître sur la tête des femmes teintes blondes qui décident d’espacer leurs rendez-vous chez le coiffeurs ou carrément d’arrêter d’y aller parce qu’elles sentent le besoin de couper dans les dépenses superflues.
Pis des indices basés sur l’analyse de ventes de biens ou de services non-essentiels auprès des femmes qui sont connus pour être des indicateurs de contextes économiques difficiles, y’en a plein d’autres. Y’en a qui s’attardent aux ventes de rouge à lèvre, de manucures, de collations à l’épicerie, de champagne.
Bref, mais là, plus je lisais sur ces indices-là cette semaine, plus ils me dérangeaient. J’ai identifié deux raisons Gabrielle. Les voici :
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Premièrement, bin ça renforce l’idée que les femmes sont le baromètre émotionnel de l’économie. « On le sait bin, les filles, on sait pas gérer notre argent, on est fofolles, pis quand ça va mal faut qu’on arrête le girl math pis qu’on se serre la ceinture. » Me semble penser de même, ça invisibilise les vrais choix difficiles que les femmes doivent faire quand les temps économiques sont durs (parce que dois-je rappeler qu’elles sont les premières victimes d’une économie qui va mal) : genre, skipper un rendez-vous chez le dentiste, pas avoir de linge d’hiver pour ses enfants, travailler plus, stresser sur le prix du yogourt.
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Deuxième affaire qui me gosse là-dedans : ça psychologise la pauvreté au lieu de la politiser. C’est sûr que parler des effets de la récession en évoquant des petites anecdotes de consommation funné sur les cheveux, les ongles pis les manucures c’est cute. Mais ça évacue toutes les discussions sur les salaires, l’inflation, le logement? Même les femmes avec repousse qui sautent un rendez-vous chez le coiffeur vont vous le dire : c’est comme plus ça qui les préoccupe vraiment
Bref, on peut se douter que les filles qui montré leur « blond récession » sur TikTok voulait juste détendre l’atmosphère pis rire un peu du contexte économique rushant, mais sérieux ce que les racines brunes disent du S&P 500, me semble qu’on s’en fout. La vraie angoisse financière c’est pas une posture esthétiquement intéressante.