Négliger ses amitiés, vouloir une blonde autiste et les hauts et les bas de la famille de Gigi Huynh

Florence, j’ai un aveu à te faire. C’est comme gênant, mais je pense que tu es présentement mon amie dont j’ai le plus de nouvelles au quotidien. Pourtant, dans mon arsenal d’amies, tu es ma plus récente, dans le sens où ça ne fait pas tant longtemps qu’on se connaît.

Pourquoi ? Ben parce qu’on est collègues, et donc qu’on se voit plusieurs fois par semaine durant des périodes prolongées, une proximité que je n’ai pas la chance d’avoir avec mes autres amies OG.

La vérité, c’est qu’autour de la trentaine, nos amitiés évoluent, et qu’en vieillissant, on passe souvent d’une amitié basée sur des liens du quotidien à une amitié en mode « rattrapage » où on s’invite pour des drinks devant lesquels on essaie de rattraper les semaines où on s’est donné zéro nouvelles.

En quelques heures, parfois moins, on essaie de raconter tout ce qui s’est passé à la job, chez nous, avec nos enfants et plus encore.

C’est un programme lourd à porter, et c’est surtout ce qu’un article de Dazed a qualifié de “catch-up culture”, donc la culture du rattrapage. Au lieu de vivre notre vie ensemble, on se fait des résumés. Et ça, ça peut donner l’impression qu’on achète du temps pour notre amitié au lieu de réellement s’investir dans une relation à long terme avec une personne.

Un des problèmes de la catch-up culture, c’est que moins on se voit souvent, plus on risque de faire des résumés larges ou même de skipper des parties de notre vie, comme des chicanes de couple mineures, mais accumulées, ou des irritants de job, qui, au final, en disent long sur comment on va.

Et là rassure-toi, j’ai un take de féministe frustrée sur la chose : apparemment, la culture du catch-up serait un résultat de notre valorisation de la famille nucléaire. On met nos partenaires et notre cellule familiale au centre de notre vie, et nos amis gravitent autour, voire même bouchent les trous quand on a le temps et que notre batterie sociale a besoin d’être rechargée.

Je finirais avec un petit chiffre : y’a une étude super intéressante de l’Université du Kansas qui dit que ça peut prendre jusqu’à 200 heures de temps passé ensemble avant qu’on considère quelqu’un comme un ami proche. Je sais pas toi, mais moi, y’a aucune de mes amies avec qui j’ai passé 200 heures cette année.