Le femwashing de Katy Perry, décoloniser les musées et traiter les animaux comme des humains avec Alexia Renard

Cette semaine, c’est à mon tour d’être cancel parce que j’aborde un sujet beaucoup trop complexe pour que je réussisse à le traiter comme du monde en deux minutes : la décolonisation des musées occidentaux.

Quand on visite un grand musée occidental, genre Le Louvre, on a accès aux plus belles œuvres d’art du monde et à une horde de touristes qui essaient de prendre en photo la Joconde. Mais sans le savoir, on a aussi la chance de plonger dans une belle ride de montagne russe colonialiste.

Ah oui, exit le fun : même votre visite au musée est maintenant problématique. Pourquoi ? Parce que les œuvres que vous allez voir ont été en partie volées à des pays sans leur consentement à grands coups de pillages, d’esclavagisme et de violence. Ça fait longtemps qu’on en parle, quand même, mais plusieurs des oeuvres qui se retrouvent dans les musées occidentaux sont des genres de petits trophées de chasse malaisants récoltés par nos glorieux ancêtres, les hommes blancs qui trouvaient que c’était une bonne idée de débarquer quelque part et de prendre des affaires qu’ils trouvaient belles ou spéciales pour les ramener à leurs amis.

Avec le temps, ces œuvres-là sont devenues une partie intégrante des collections de plusieurs musées, dont certains sont même spécialisés en art africain, moyen-oriental ou asiatique. Des équipes entières travaillent à préserver et faire connaître ces œuvres-là, mais ça reste que, oupilaye, les pays d’origine ont commencé à demander qu’on leur redonne leurs affaires.

En ce moment, on assiste à une vague de restitution d’objets pillés vers leur pays d’origine. Les Pays-Bas ont accepté en février dernier de restituer au Nigeria une collection de 119 objets. En 2021, 26 trésors royaux qui étaient au Musée du quai Branly à Paris ont été renvoyés au Bénin.

On parle de l’Europe ici, mais rassure-toi, on est tout aussi problématiques au Canada! Au Musée des Beaux-Arts de Montréal, on possède 5 bronzes du Bénin qui ont été réclamés par leur pays d’origine.

À l’heure actuelle, on constate vraiment une volonté de décolonisation dans plusieurs musées, qui posent des gestes comme de monter des expos qui mettent en valeur et surtout en contexte des objets des communautés autochtones, ou qui engagent des conservateurices de collections issues des communautés, et c’est encourageant, mais je me demande si c’est suffisant. En fait, je pense qu’on sait collectivement que ces gestes de réparation-là ne vont pas effacer magiquement 150 ans de colonialisme and counting.

Ma question, aujourd’hui, c’est ça : malgré tous les beaux gestes de réparation qui sont posés par les institutions, est-ce qu’on peut réellement décoloniser un musée ?

Gab, cette semaine, on a appris une chose fort intéressante et c’est la suivante : eh non, être trop riche et complètement déconnecté, c’est pas juste une affaire de gars. Les filles aussi, ont le droit! YES!!!!

Je vous apprends sûrement rien, mais la semaine passée, Katy Perry et 5 autres célébrités ont constitué le premier équipage entièrement féminin à aller dans l’espace. La ligne marketing du projet Blue Origin, c’était un peu « go les filles en, nous autres aussi on peut tout faire ». Le roundtrip a duré 10 minutes, chaque place dans la capsule valait près de 30 millions de dollars pis ça a pollué l’équivalent de 13 ans de vie d’une personne moyenne. En atterrissant Katy Perry a donné un bec au sol et a dit se sentir connectée à l’amour. OUF. (Je l’ai écrit en majuscules). Bref, c’était fucking absurde, et plusieurs l’ont dit : c’est du femwashing.

Le femwashing, c’est d’instrumentaliser le mouvement féministe pour justifier et même faire la promotion d’un projet ou d’un produit qui n’améliore d’aucune façon la condition des femmes. Dans le cas de Blue Origin, on assiste vraiment à du femwashing de débutant qui n’a hélas pas du tout réussi à faire diversion sur l’absurdité du tourisme spatial – surtout que les passagères ont fait aucune manœuvre technique ou expérience scientifique significative pendant leur périple (c’était vraiment juste un tour de manège pour millionnaires).

Bref, c’est un peu révoltant pour plein de raisons. Tout le monde en a parlé dans les derniers jours. Mais y’a de quoi dont on a pas parler je trouve : et je vais faire un appel à la nation – on va zoomer sur ma face, s’il-vous-plaît : la prochaine fois qu’une gang de gars font une affaire débile et polluante comme Katy Perry et ses amies les célébrités, est-ce qu’on peut s’insurger de la même manière s’il-vous-plaît? Parce que ça arrive tout le temps. Pis là je pense que Blue Origin c’est particulièrement frustrant parce qu’on a un peu pris pour des caves en pensant qu’on allait boire le kool aid du geste féministe. Mais des boys riches qui ont fait un tour dans l’espace pour le fun, y’en a plein : le joueur de football Micheal Strahan, l’acteur William Shatner, l’entrepreneur Richard Branson. C’est-tu moi ou on en parle moins? Ça nous dérange-tu moins?

Bref, j’encourage tout le monde à ne pas discriminer et être fâché égal envers toutes les personnes ultrariches qui nous rient dans face, peu importe leur genre.