Flusher ses amis, élever des enfants égoïstes et le grand retour du crystal meth
Flusher ses amis, élever des enfants égoïstes et le grand retour du crystal meth
Cette semaine, Flo se demande si on flushe pas nos ami.e.s trop facilement, Gab apprend pourquoi les enfants n’ont plus besoin de partager et elles accueillent une invitée toute spéciale : leur nouvelle collègue journaliste Salomé Maari, pour parler de ses premières semaines chez URBANIA.
Florence : 🤚 l’intransigeance dans nos relations
Gab, cette semaine, j’avais envie de te parler d’un TikTok sur lequel je suis tombée qui montrait une mère et sa fille en voyage sur un terrasse, et à l’écran, c’était écrit : quand t’as tellement protégé ta paix (du fameux mantra protect your peace) que la seule amie qui te reste, c’est ta mère.
Tu connais sûrement le concept de protéger sa paix, qui est vraiment simple : c’est qu’on se gêne pas pour éliminer à peu près tout ce qui nuit à notre tranquillité d’esprit, à notre santé mentale. Genre : un ami te choke un peu dernière minute pour une soirée? Poubelle. Ta tante a des propos un peu arriérés? Elle est désinvitée du réveillon.
Bref, ça niaise pas, pis la question que je me pose cette semaine, c’est : on a tu le bouton cancel de plus en plus facile quand vient le temps de gérer nos relations?
Y’a des données qui suggèrent que oui. Y’a une étude d’un sociologue de Cornell qui a révélé que y’aurait 27 % des Américains de 18 ans et plus qui ont coupé les ponts avec au moins un membre de leur famille. En ligne, beaucoup de jeunes adultes disent qu’ils ont quiet quit certaines de leurs amitiés, donc qu’ils se sont subtilement retirés de relations sans adresser les choses.
Ce qui est intéressant, c’est tout ça ça se passe alors qu’on observe depuis plusieurs années que de plus en plus de créateurs de contenu font de la vulgarisation de notions de psychothérapie en ligne – on a inventé un terme pour ça : la TikTok therapy. Dans ce coin-là du web, on fait beaucoup l’apologie du no contact, de protect your peace, d’imposer ses limites.
Bref, on présente le fait de couper de nos vies certaines personnes qu’on juge « toxiques » comme un move plutôt noble, une façon de prendre soin de soi – pis effectivement y’a des cas dans lesquels c’est tout à fait nécessaire de faire ça – mais y’a des experts qui s’inquiète, et qui pensent que ce qui se passe vraiment, c’est plus le contraire : notre tendance grandissante à nous isoler pis à couper les ponts quand on sent qu’on pourrait se pogner avec quelqu’un, c’est ça, quit nuit à notre santé mentale.
Y’a une étude de 2019 qui a prouvé que plus une personne a de proches (famille, amis, ex, collègues) qu’elle a coupé de sa vie, plus elle a tendance à être déprimée, à avoir un style d’attachement anxieux, pis à avoir moins de soutien social.
Faque bref, c’est sûr que confronter quelqu’un, c’est pas le fun. Dire à ta tante que ses jokes te blessent ou dire à ton ami qu’il t’a déçu, c’est mille fois plus compliqué que de juste couper les ponts. Mais prendre des risques dans ses relations en se chicanant pis en se confrontant, ça vaut peut-être la peine, contrairement à ce que beaucoup de pseudo-experts prônent en ligne.
Gabrielle : les enfants doivent-ils vraiment partager?
Cette semaine, Florence, je te parle d’une tendance qui gagne en popularité auprès des jeunes parents et qui m’étonne pas mal: ne pas apprendre à son enfant la notion de partage.
C’est un article du média américain The Cut qui m’a mis la puce à l’oreille. Apparemment, de plus en plus de parents qui pratiquent la parentalité bienveillante et des experts et expertes de la petite enfance croient qu’on devrait arrêter de forcer les enfants d’âge préscolaire à partager leurs jouets.
Leur réflexion part quand même d’un fait : à 2, 3 ou même 4 ans, un enfant n’a pas les capacités cognitives pour partager.
Les gens qui encouragent cette tendance un peu décrissante pensent qu’en attendant que l’enfant soit assez vieux pour vouloir partager ses jouets de son propre gré, soit entre 4 et 6 ans environ, on favorise un geste de partage sincère et non forcé. Pis surtout, on s’évite ben des crises et des luttes inutiles.
Des experts croient aussi que de ne pas forcer les enfants à partager leur permet de se concentrer sur leurs besoins et mieux exprimer leurs limites. C’est sûr que vu de même, c’est bien : je ne veux pas que ma fille devienne un tapis qui n’est pas capable de demander ce qu’elle veut dans la vie – une augmentation, par exemple, ou quelqu’un qui people please à tour de bras. Ne pas partager, c’est peut-être une notion importante à apprendre pour qu’elle fasse sa place dans notre belle société capitaliste.
Par contre, je n’ai pas non plus envie qu’elle devienne un enfant roi égoïste et gossant.
Tout ça m’a rappelé à quel point élever un enfant, c’est culturel. Mes voisins français, eux, par exemple, valorisent beaucoup la tranquillité de mon enfant. C’est une blague car ma fille n’est pas tranquille du tout.
Mais tout ça pour dire qu’en Occident, on valorise énormément l’individualité et la possession de biens matériels. Si les enfants ne veulent pas partager, c’est aussi parce qu’ils reproduisent ce qu’ils voient. C’est pas comme si ça partageait fort dans notre société, à part un sac de chips de temps en temps au bureau.
Au Mexique, par exemple, certaines communautés encourageant les enfants à veiller au bien-être des autres presque dès la naissance. Y’ont pas ce problème-là.