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Une saison «complexe» pour les patrouilleurs de ski alpin

Casse-tête sur les pentes.

Par
François Breton-Champigny
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Pour les amateurs de ski, le début de la saison a été laborieux. En plus des mesures sanitaires qui menaçaient à tout moment de ruiner les beaux mois d’hiver, mère Nature ne nous a pas fait de cadeau de Noël pendant les fêtes en restreignant la neige à un minimum. On a même eu droit à plusieurs épisodes de pluie pour une bonne partie de la province, de quoi démoraliser les plus fervents pratiquants de la glisse.

Heureusement, depuis quelques semaines, mère Nature s’est défâchée et la neige tombe à profusion pour le grand bonheur des skieurs et des stations.

Pendant que la province au complet semble profiter des pistes de ski malgré la pandémie, on peut se demander comment ça se passe pour les anges gardiens des montagnes, aka les patrouilleurs, en cette saison hors de l’ordinaire.

On a posé la question à un vétéran du milieu pour le savoir.

Pas évident, former à distance

Même s’il adore le ski alpin, Jonathan Giguère a su assez tôt dans la vie qu’il voulait faire plus que de simplement dévaler les pistes des montagnes près de chez lui à Québec. «Ce que j’aimais dans mon quotidien d’infirmier, c’était l’adrénaline. Quand j’ai vu une opportunité pour faire une formation de patrouilleur, je me suis dit que ça rejoignait deux de mes passions, le ski et les soins infirmiers, et qu’il devait y avoir une bonne dose d’action au quotidien à faire ça», raconte l’énergique homme dans la quarantaine au bout du fil.

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Au tournant des années 2000, Jonathan a donc entrepris une formation de 65 heures pour devenir patrouilleur en plus de son emploi comme travailleur de la santé à temps plein. «Ça n’a pas pris de temps pour que je devienne formateur pour les futurs patrouilleurs», explique Jonathan en riant, qui aime ça quand «ça brasse».

Patrouilleur à Stoneham puis au Massif, où il travaille encore d’ailleurs, Jonathan a formé beaucoup de ses confrères et consoeurs à travers les années en tant que membre de l’Institut National de Secourisme du Québec (INSPQ), qui compte à elle seule 1000 membres.

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Mais il ne s’en cache pas: préparer les troupes pour la saison 2020-2021 a été tout un casse-tête. «Tous les patrouilleurs doivent refaire leur certification chaque année pour être à jour. Donc on a dû faire la majorité de ces mises à jour à distance avec l’aide de notre plateforme en ligne, qui était déjà fonctionnelle depuis 3-4 ans. Les gens s’arrangeaient avec ce qu’ils avaient chez eux pour pratiquer des bandages ou des petites interventions en prenant leur conjoint comme sujet, par exemple».

Pour les ateliers de «manipulations» et de «techniques», certaines unités de patrouille situées en région ont été autorisées à opérer en petites bulles pendant une bonne partie de l’année jusqu’à l’automne. Pour les personnes en zone rouge cependant, ça a été une autre paire de manches. «Il a fallu repousser les manipulations à plus tard et y aller au cas par cas avec des demandes spécifiques. C’était plus de logistique, mais on a réussi à les former aussi bien que les autres», assure Jonathan Giguère.

«Les gens s’arrangeaient avec ce qu’ils avaient chez eux pour pratiquer des bandages ou des petites interventions en prenant leur conjoint comme sujet, par exemple».

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Cette logistique a cependant été assez éreintante pour les équipes de formation selon la patrouilleur avec plus de 20 ans d’expérience. «C’était très complexe par moment. On ne pouvait pas constater concrètement ce que les nouveaux apprenaient et ils n’avaient pas tous accès à du vrai matériel que l’on utilise sur le terrain. On devait se fier à ce qu’on pouvait voir par visioconférence et aux apprentissages faits via la plateforme web».

Est-ce que cette nouvelle flotte de patrouilleurs fraîchement débarquée en pleine pandémie inquiète le vétéran? Pas tellement. «Je fais confiance à notre système de formation et on s’est aussi adapté sur le terrain. Les nouveaux patrouilleurs sont accompagnés plus longtemps cette année par les anciens afin de s’assurer que tout se passe bien», explique-t-il.

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Patrouilleurs ou patrouilles de police?

Depuis qu’il a entamé la nouvelle saison avec un fond de pandémie, un constat s’impose pour Jonathan Giguère: il faut parfois revêtir l’uniforme de «police sanitaire», une tâche que le vétéran n’apprécie pas particulièrement. «Personne aime ça jouer à la police. Mais malheureusement, ça fait partie de la job. Les stations nous demandent de faire des tours dans les files d’attente pour les chaises pour vérifier que tout le monde respecte les règles».

Normalement, les skieurs sont assez compréhensifs et obtempèrent sans faire de chichi, selon Jonathan. Mais une petite frange de récalcitrants subsiste. «Pendant le temps des fêtes, c’était pas mal moins drôle parfois. On en a vu des “covidiots” qui nous envoyaient promener ou qui chialaient quand on leur demandait de monter leur masque sur leur nez ou de se mettre à deux mètres», confie le patrouilleur.

«Personne aime ça jouer à la police. Mais malheureusement, ça fait partie de la job».

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Si le couvre-feu a suscité une vague d’indignation dans la société en générale, il a été plutôt bien reçu parmi la communauté de patrouilleurs. «La clientèle du soir est disons… différente. Ce sont souvent des skieurs plus jeunes qui ont tendance à être plus “rebelles” donc ça ajoutait une pression supplémentaire sur les patrouilleurs qui faisaient ces quarts de travail, qui étaient déjà plus difficiles à faire avant la pandémie, explique Jonathan. Ça a donc été un “poids” de moins à considérer quand on a su que les stations devraient fermer à 19h30».

Dans les prochaines semaines, le vétéran espère que les gens vont continuer à respecter les règles pour ne pas que la saison s’achève abruptement. «On le sait qu’on (les stations de ski) est sur la corde raide et qu’on est sur du temps emprunté. Si les gens ne collaborent pas, ça risque de se finir plus tôt que tard».

Avec la neige qui tombe sur une bonne partie de la province aujourd’hui, Jonathan s’attend à un gros achalandage dans les stations de ski le weekend prochain. S’il souhaite envoyer un message aux skieurs qui pensent s’élancer sur les pistes enneigées prochainement, c’est celui-ci. «Soyez prudents. Ça serait plate que des gens accaparent des places aux urgences parce qu’ils n’ont pas fait attention alors qu’on sait que les lits sont comptés et que le système de santé est fragile».

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Sur ce, mettez un casque, portez un masque, gardez vos distances et bon ski!

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