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Ça y est! Après deux ans de campagne référendaire*, les Écossais se rendent finalement aux urnes jeudi afin de décider collectivement de leur avenir. La question, d’une simplicité à faire pavoiser les Stéphane Dion de ce monde, se lit comme suit: Should Scotland be an independent country?
Aucune offre d’association ou de partenariat avec le reste du Royaume-Uni advenant une victoire du OUI n’est proposée aux Écossais. En bref, l’entente entre le camp du OUI et le gouvernement britannique stipulait que Londres reconnaîtrait un résultat de 50% plus un si la question posée aux Écossais était claire. Il est en effet difficile d’avoir une question plus claire que ça!
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Ce qui s’annonçait comme une défaite certaine il y a encore quelques mois prend aujourd’hui les allures d’une chaude lutte dont nul ne peut désormais prédire l’issue. Au moment des premiers préparatifs pour ce voyage, c’est-à-dire il y a un an et demi, le OUI stagnait à environ 35% dans les intentions de vote. Il varie aujourd’hui entre 42 et 56% selon les maisons de sondage. Vous devinerez qu’à ce stade-ci de la campagne, prédire l’issue du vote s’avère plutôt périlleux!
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J’ai donc rejoint à Édimbourg une quarantaine de Québécois** pour suivre le dernier droit de la campagne référendaire. D’aucuns voient, dans ce référendum, un contexte similaire à celui du Québec en 1995 et conséquemment, des leçons à tirer.
Certes, les comparaisons avec le Québec sont nombreuses. La réaction du Better Together depuis quelques semaines n’est d’ailleurs pas sans rappeler celle du NON lors des deux précédentes campagnes référendaires au Québec. La peur semble désormais être au coeur de l’argumentaire de celui-ci. Tout y passe: les pensions de vieillesse, le déménagement des sièges sociaux, l’impossibilité pour les Écossais de garder la livre sterling, etc.. Même le slogan « Non Merci » du camp du NON en 1980 a été repris par les pro-unionistes écossais!
Du côté du OUI, bien que ce soit loin d’être gagné, les militants surfent sur une vague favorable depuis quelques jours, plus particulièrement depuis le dernier débat télévisé entre Alex Salmond (YES Scotland) et Alistair Darling (Better Together). Au lendemain du débat, et ce, pour la première fois depuis le début de la campagne, un sondage mettait le OUI en avance dans les intentions de vote. Il y a donc chez les militants indépendantistes un mélange de confiance et de fébrilité, fébrilité qui, pour emprunter une expression chère à Bernard Drainville, ne m’apparaît toutefois pas très ostentatoire!
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Car quiconque viendrait aujourd’hui en Écosse dans l’espoir de vivre (ou revivre) la « fièvre référendaire » de 1995 au Québec ou les manifestations monstres de la Catalogne des derniers jours serait fort déçu. Contrairement aux Catalans qui déambulent à coup de millions dans les rues de Barcelone pour revendiquer le droit à l’autodétermination, en Écosse, la campagne se vit en effet beaucoup plus paisiblement. Du moins, à Édimbourg***.
Les lampadaires sont dénudés de pancartes, les manifestations et les rassemblements populaires sont plutôt modestes et les discours politiques touchent bien rarement à la fibre identitaire des Écossais. L’économie demeure ici l’enjeu premier pour l’une ou l’autre des options. Les Écossais s’en tireraient-ils mieux si l’Écosse était indépendante? Là semble résider l’essentiel de la question.
Cela rend bien évidemment le débat en Écosse beaucoup moins émotif qu’il ne l’a été (et qu’il l’est toujours) au Québec. D’ailleurs, ce n’est peut-être pas une si mauvaise chose que ça. Les partisans du OUI et ceux du NON se côtoient dans un climat relativement serein et bon enfant.
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En discutant avec des militants indépendantistes, j’avais l’impression qu’une défaite serait décevante mais pas crève-coeur. L’importante percée du OUI dans les dernières semaines de la campagne référendaire prend déjà, chez plusieurs, l’allure d’une victoire morale. Ce type de victoire qui donnerait, selon ces derniers, un rapport de force important dans d’éventuelles négociations avec Londres. On aimerait parfois leur dire qu’on s’est fait «crosser» à deux reprises par des promesses improvisées à la dernière minute par le camp du NON, mais après tout, ce n’est pas notre référendum!
Il y a bien évidemment des indépendantistes de la première heure chez qui les plaies laissées par une défaite seraient plus dures à cicatriser. J’ai d’ailleurs passé ma deuxième journée à Édimbourg avec deux militants de longue date qui m’affirmaient être devenus indépendantistes à la suite de l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher, soit depuis près de 35 ans.
Ma rencontre avec ces deux sympathiques quinquagénaires est d’ailleurs le fruit d’un pur hasard. C’est en pensant me rendre à une manifestation pour le OUI que je suis tombé sur ces deux militants indépendantistes de longue date. Ayant répondu «oui» à une question que j’avais, de toute évidence, mal comprise (sacré accent écossais!), je me suis retrouvé à distribuer des dépliants dans les boîtes aux lettres d’un quartier cossu d’Édimbourg! Un genre de Westmount écossais, l’appui massif au NON compris!
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À voir la fougue qu’ils mettaient à distribuer les tracts, j’en déduis qu’une victoire aurait un goût plutôt amer. D’autant plus si le résultat est serré. Nous savons ce que c’est!
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En terminant, bien que le référendum ne se traduise pas sur le terrain en manifestations monstres, il suffit de parler aux gens pour se rendre compte que depuis quelques semaines, il s’agit du principal sujet de discussion. Enfin, disons à égalité avec les rumeurs sur la grossesse de Kate!
Bien qu’il reste encore un nombre considérable d’indécis, tous semblent avoir une opinion sur la question. C’est d’ailleurs ces indécis qui, jeudi, décideront du sort de l’Écosse. Nous serons donc plusieurs Québécois à se réunir jeudi soir pour suivre le déroulement de la soirée référendaire. Les résultats du vote ne devraient toutefois pas être connus avant vendredi matin ce qui nous permet d’envisager une longue nuit! D’ici là, on va profiter des charmes d’Édimbourg!
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* La campagne du YES Scotland a été lancé le 25 mai 2012 et celle du Better Together le 25 juin 2012.
** J’ai joins le Réseau Québec-Monde, une organisation pratiquant le tourisme politique et qui en était à son premier voyage.
*** Samuel Bergeron, qui tient la page un Québécois en Écosse sur Facebook, m’expliquait que l’appui au OUI est beaucoup plus visible dans certaines régions de l’Écosse dont les Highlands et à Glasgow.
En terminant, je tiens à remercier Voyage Globallia qui m’a gracieusement offert une commandite pour rendre ce voyage possible!