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Une journée pour sortir les pensionnats autochtones de l’oubli

Avec le Orange Shirt Day, les communautés autochtones souhaitent sensibiliser les gens à ce pan d'histoire.

Par
François Breton-Champigny
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Le 30 septembre avait lieu le Orange Shirt Day. Ça ne vous sonne aucune cloche? Et pourtant, ça devrait, surtout quelques jours à peine après un évènement aussi tragique que la mort de Joyce Echaquan, la mère de famille atikamekw de 7 enfants décédée dans des conditions atroces à l’hôpital de Joliette.

Depuis 2013, le Orange Shirt Day est une journée dédiée à mettre en lumière l’impact des pensionnats autochtones sur les communautés des Premières Nations du pays.

On s’est entretenu avec la responsable de la branche montréalaise du mouvement Suzanne Simatos pour comprendre comment une journée comme celle-ci aide à faire avancer les choses.

L’éducation au coeur de la solution

«La majorité des gens ne sont pas au courant qu’il y avait des pensionnats de ce genre au Canada et encore moins qu’il y avait plusieurs violations des droits humains perpétrés dans ces institutions», soutient Suzanne. Dans cette optique, «le mouvement était nécessaire pour sensibiliser les gens à ce pan d’histoire», explique-t-elle.

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Selon l’Encyclopédie canadienne, il y aurait eu plus de 130 pensionnats au pays de 1831 à 1996 où environ 150 000 enfants autochtones auraient été amenés de force sous prétexte de leur offrir une éducation, mais surtout pour les «convertir au catholicisme et les assimiler à la culture canadienne-française». Environ 6000 enfants seraient morts dans ces pensionnats, les données sont toutefois «incomplètes» sur le sujet.

Le mouvement né en 2013 en Colombie-Britannique a utilisé le symbole du t-shirt orange pour se remémorer ces évènements, qui font partie du passé sombre du pays, en se basant sur un incident vécu par l’une des «survivantes».

À son premier jour d’école au pensionnat Williams Lake, Phyllis Webstad, alors âgée de 6 ans, se fait confisquer son nouveau chandail orange que sa grand-mère lui a acheté.

Des années plus tard, la «survivante» a décidé de prêter son histoire à la une cause.

«Des incidents comme celui de Joyce Echaquan pourraient même être évités si les gens étaient plus sensibles et éduqués aux réalités des autochtones».

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«On organise des ateliers dans des écoles primaires et secondaires de Montréal pendant la journée. Par exemple, on invite les élèves à écrire des lettres aux survivants de pensionnat pour qu’ils sachent qu’on ne les a pas oubliés. L’une des écoles organise également une manifestation pacifique (en respectant les mesures sanitaires) dans la cour et une autre demande aux élèves d’écrire de beaux messages sur leurs t-shirts orange en lien avec la journée», explique l’animatrice en vie spirituelle de formation.

Selon elle, sensibiliser les gens sur les enjeux dont font face les membres des Premières Nations à un jeune âge est la clé pour enrayer les préjugés racistes. «Avec tout ce bagage de connaissance, ces futurs citoyens pourront reconnaître et s’opposer à des actes racistes plus facilement. Des incidents comme celui de Joyce Echaquan pourraient même être évités si les gens étaient plus sensibles et éduqués aux réalités des autochtones».

https://www.instagram.com/p/CFxL8CAnH_c/

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Encore du chemin à faire

Même si elle admet qu’il y a eu certains progrès depuis la fin des pensionnats, Suzanne croit que la société a encore une longue route à parcourir avant de se donner une tape dans le dos. «Il y a des promesses des gouvernements qui ne sont toujours pas tenues. Même après les conclusions du rapport de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, plusieurs femmes autochtones ne sont pas en sécurité et sont victimes de discrimination et d’abus physiques. Peu de gestes ont été posés pour régler ces enjeux», souligne-t-elle.

«Il reste beaucoup à faire pour reconnaître tout ce que ces populations complexes et magnifiques amènent à notre nation depuis des centaines d’années».

Selon Suzanne, quelqu’un qui se proclame un allié des Premières Nations devrait agir lorsqu’il est témoin d’un acte de racisme. «On a le devoir, en tant que personnes privilégiées, de faire entendre notre voix et d’agir de la meilleure manière possible dans ce genre de situation», croit l’animatrice en vie spirituelle.

«On a le devoir, en tant que personnes privilégiées, de faire entendre notre voix et d’agir de la meilleure manière possible dans ce genre de situation», croit l’animatrice en vie spirituelle.

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Lorsqu’on regarde la manière dont on traite les membres des communautés autochtones au quotidien, il peut sembler absurde d’avoir espoir que la situation va s’améliorer un jour. Mais Suzanne ne perd pas la flamme. «Si on continue à enseigner aux générations plus jeunes qu’il y a plus d’une façon d’aborder l’Histoire, les choses vont commencer à changer. Des préjugés ancrés depuis trop longtemps vont tomber pour de bon».

Et avec les évènements récents, on ne peut que souhaiter que ces changements s’opèrent le plus rapidement possible.