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Une entreprise québécoise dans le monde des gros bâtons de baseball

Entrevue avec Olivier Lépine de B45, une entreprise de Québec qui bouleverse le monde du baseball.

Par
Pier-Luc Ouellet
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URBANIA et le Collectif pour une forêt durable s’unissent pour découvrir ceux qui innovent avec le bois.

Quand j’étais au Cégep, notre professeur d’économie nous avait lancé comme défi de monter un plan d’affaires pour une entreprise qui trouverait une utilité au bois qui pousse au Québec. Comme j’y connaissais rien à l’industrie du bois, mon équipe s’est retrouvée avec un plan pas de bon sens d’une entreprise qui ferait des meubles Ikea, mais avec du bois de sapin pis ça s’appellerait «Gaspésikea».

On n’a pas eu une ben bonne note.

Heureusement, il y a des entreprises qui ont des idées pas mal meilleures que les miennes. Comme l’entreprise B45, qui utilise le bouleau jaune pour fabriquer des bâtons de baseball qui se retrouvent entre les mains de certains des plus grands joueurs de la MLB. J’en ai parlé avec Olivier Lépine, directeur de la production et cofondateur de B45, et lui-même ancien joueur professionnel.

La genèse d’un coup de circuit

«Ça a commencé en 2002 par un ingénieur forestier qui était en voiture et qui a entendu Éric Gagné à la radio se plaindre de la qualité des bâtons.»

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Comment nous vient l’idée de se lancer dans la fabrication de bâtons de baseball, surtout quand on habite la ville de Québec, qui est bien loin de Fenway Park ou du Yankee Stadium? Et en bouleau jaune, en plus, quand les bâtons sont habituellement faits en frêne ou en érable?

« Ça a commencé en 2002 par un ingénieur forestier [Bruno Del Degan] qui était en voiture et qui a entendu Éric Gagné à la radio se plaindre de la qualité des bâtons. L’ingénieur s’en allait vers une usine qui faisait du contreplaqué en bouleau jaune. Ils laissaient beaucoup de retailles, ils ne se servaient pas du cœur de l’arbre. Il a donc décidé de prendre le cœur de l’arbre pour essayer d’en faire des bâtons » raconte Olivier Lépine.

Mais la vie d’entrepreneur n’est pas sans embûches : « Finalement, le cœur de l’arbre, c’est pourri, tu peux pas faire des bâtons avec ça ». Mais cet échec a quand même permis à Monsieur Del Degan de réaliser que le bouleau jaune avait des propriétés intéressantes.

Le bouleau au boulot (pardonnez-moi ce jeu de mots)

Fait que ça donne quoi, de faire un bâton en bouleau jaune? « Le frêne a longtemps été utilisé parce que c’est flexible. Les joueurs aiment ça. Mais les bâtons brisent. Ensuite, les joueurs se sont mis à beaucoup utiliser l’érable. C’est un bois dur, qui donne beaucoup de puissance ». Sauf qu’évidemment, ce qu’on gagne en puissance, on le perd en flexibilité… sauf avec le bouleau jaune : « Le bouleau jaune, c’est un bois quasi aussi dense que l’érable, mais flexible comme le frêne ».

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Mais on a beau avoir un produit extraordinaire, encore faut-il convaincre les gens que c’est un coup de circuit et non une fausse balle (pardonnez mes analogies douteuses, la seule fois que j’ai joué au baseball c’est dans Wii Sports).

« Implanter le bouleau jaune, ça a été ça le plus gros obstacle. Ça fonctionne beaucoup par bouche-à-oreille, les joueurs vont parler aux autres joueurs des bâtons qu’ils aiment ».

Ils ont donc commencé à l’époque par les joueurs des Capitales de Québec, les mettant au défi de casser le bâton en frappant des balles… ce qu’ils n’ont pas réussi à faire. Puis, ils ont aussi convaincu les joueurs amateurs « qui utilisaient encore beaucoup les bâtons d’aluminium », en leur disant que le bouleau jaune était aussi solide, mais avec toute la qualité du bois.

À la conquête du monde

Maintenant, B45 font partie du club très sélect des fournisseurs autorisés d’équipement pour les joueurs professionnels de la MLB. Ils produisent environ 10 000 bâtons par année, et la légende qui a inspiré la compagnie a ses débuts, Éric Gagné, s’est porté acquéreur de la compagnie en 2015, avec d’autres associés.

«Juste du côté de la production, on a plein de défis. Quand un joueur professionnel nous appelle parce que ses bâtons ont cassé, il a besoin de nouveaux bâtons rapidement! »

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Mais ce n’est que le début pour la troupe de B45, qui ne compte pas s’arrêter là : « On veut améliorer notre délai de livraison, l’aspect esthétique du bâton encore plus. Juste du côté de la production, on a plein de défis. Quand un joueur professionnel nous appelle parce que ses bâtons ont cassé, il a besoin de nouveaux bâtons rapidement! »

Et évidemment, les gros joueurs de l’industrie se sont mis à produire des bâtons de bouleau jaune eux aussi. Mais B45 n’ont pas trop à s’inquiéter, ils ont toujours un ingrédient secret. Fort de son expérience dans les ligues professionnelles, Olivier Lépine s’évertue chaque jour, avec précision, à « produire le bâton exactement comme je le voudrais ».

Comme quoi dans une industrie où la compétition est féroce, on peut compter sur la passion et la minutie des Québécois pour faire briller non seulement leur savoir-faire, mais les ressources du terroir également!

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Les gars derrière B45 l’ont démontré, le bois, en plus d’être écologique et durable, cache une foule d’autres possibilités. Découvrez-les sur uneforetdepossibilites.com.

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