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Une chanson pour passer le goût du steak à marde

"Like a stone, carried on the river. Like a boat, sailing on the sea. I’ll keep on walking, I’ll keep on walking. Till I find that old love or that old love comes to find me."

Par
Le Moes
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Avril 2012, je vis brusquement la fin d’une relation. Après quelque chose comme 3 ans et demi, on décide qu’on se sépare et que c’est la fin de notre belle histoire. J’ai toujours dit “on se sépare”, mais c’était pour me donner l’impression que j’avais eu mon mot à dire. Dans les faits, je me suis fait pas mal crisser là. Une décision prise en commun… émanant d’une décision prise par elle.

On ne planifie jamais de défaire un lit acheté seulement deux mois auparavant, pour le remonter dans la deuxième chambre du condo d’un de ses chums. Ce n’était pas le plan. Ce moment, ça s’immortalisait difficilement en un beau cliché filtré sur Instagram.

Je m’installe donc chez un ami. Dans cette petite chambre, j’empile des meubles qui ne sont clairement pas destinés à être tous encombrés dans un si petit espace. Je me sens un peu comme si je jouais à Tetris et je finis par avoir un résultat acceptable. Le look est ainsi le reflet de l’activité dans ma tête à ce moment : un pêle-mêle entassé de plein de choses qui crient à la confusion et au manque d’air.

Puis, la vie continue. Elle doit continuer, right?

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Les jours se suivent et je fixe le plafond de ma nouvelle chambre en chamboulant les idées noires, les hypothèses, les solutions trop optimistes, les projets ridiculement ambitieux et que sais-je encore. Mon iPhone me brûle dans les mains tellement je voudrais la texter. Envoyer un “je t’aime” qui ne servirait qu’à recevoir en guise de réponse, un émoticône personnifiant le malaise avec une bouche croche. Un “désolée, pas moi” sous forme imagée.

Crisse d’époque de paresseux où la technologie permet de communiquer, sans avoir à passer un coup de fil. Au moins en l’appelant, j’aurais fait preuve de courage et de fierté en ayant une interaction en temps réel.

Anyway.

Les semaines passent et la vie continue, sauf que même le meilleur steak goûte la marde. Tsé le feeling que ça va mieux, seulement parce que le temps avance. Seulement parce que tu peux quantifier le temps sans elle. Quand ça te réconforte de constater que “ça fait un mois”. T’as l’impression de faire du chemin parce que tu continues de faire ton quotidien avec une moitié de toi qui n’est pourtant plus là.

Sauf qu’en réalité, je fais du surplace.

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Ce n’est pas une mauvaise chose de prendre le temps de se remettre d’une rupture. C’est un deuil au fond. Ça prend de la patience pour passer au travers et que la blessure cicatrise. Rien ne presse, me disais-je.

Puis, j’ai téléchargé l’album All the little lights de Passenger.

J’ai écouté cet album d’un trait, au milieu de ma pyramide de meubles entassés. Chaque chanson me parlait. Je n’avais même pas à me forcer pour trouver les parallèles avec ma vie. C’était là. Y’a quelque chose de rassurant quand tu constates que ton blues, y’a un chanteur britannique de l’autre côté de l’océan à des milliers de kilomètres qui l’a vécu aussi.

La proximité fait en sorte que ça adoucit la situation, aussi déprimante soit-elle. C’est pour ça qu’écouter de la musique triste quand t’es triste, c’est si libérateur. C’est de se faire dire : “t’es pas tout seul à manger du steak à marde, bro”.

Je buvais les paroles des chansons comme je buvais de la bière aux larmes quand je sortais. Au-delà de la musique, je n’en avais que pour le discours. Et j’suis tombé sur Keep on Walking.

Well last night I couldn’t sleep

I got up and started walking

Down to the end of my street

And on into town

Well I had no one to meet

And I had no taste for talking

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Seems I’m talking my whole life

It’s time I listen now

L’approche de cette chanson-là était plus optimiste que celle des autres. Les paroles me faisaient réfléchir à ma vie. On dirait que son message n’était pas forcé. L’interprète ne voulait pas imposer sa philosophie, mais simplement raconter son histoire. Et moi, j’abusais de l’option loop.

Être en peine d’amour, c’est chercher des bouées. Des choses qui vont t’ancrer les pieds sur Terre pour te donner l’impression de ne pas être trop perdu. Des repères, des conseils, des suggestions, des preuves tangibles que y’a une suite à ça. Que ce n’est pas la fin.

Et, y’a eu ce passage-là :

And I thought to myself oh son

You may be lost in more ways than one

But I’ve a feeling that it’s more fun

Than knowing exactly where you are

Qui a dit que tu devais absolument savoir où t’étais rendu dans la vie?

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Depuis qu’on est tout petit qu’on nous dit de suivre un chemin bien droit et de ne pas en déroger. La vie, tu le sais maintenant, c’est crissement pas une ligne droite. C’est un réflexe inné de toujours vouloir retrouver cette ligne, mais d’en déroger, c’est aussi une possibilité de t’en partir une autre. Le passage m’a ouvert les yeux en me disant que : tsé pas savoir EXACTEMENT t’es où, ce n’est pas aussi dramatique que tu peux le croire.

Tout dans cette chanson revient à une chose : “Keep on walking”. Continue de marcher. Je me suis approprié cette philosophie de vie suite à l’écoute de cette chanson. Ça m’a aidé à lâcher mes culottes de pyjama crottées, ma pizza frette et mon PornHub pour enfin mettre des jeans propres et aller voir ce qui se passait dehors.

Pourquoi “Keep on walking”?

Parce que c’est, à mes yeux, ce qu’il faut toujours faire dans la vie. Avec un cœur brisé, c’est bien de prendre son temps pour recoller les morceaux. Sauf qu’il faut éviter de faire du surplace. Et en faisant du surplace, t’es à pas grand-chose de reculer. Certains diront que c’est bien de faire un pas en arrière pour en faire deux en avant. Vrai. Cependant, le “pas en arrière”, c’est quoi? C’est de risquer de se planter, en osant provoquer les choses.

En continuant de marcher.

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J’ai appris de ce moment de ma vie que ce n’est pas la vitesse à laquelle tu marches qui est importante, mais plutôt de ne jamais arrêter de marcher. Des petits pas si c’est ce que tu préfères, mais des pas pareil. Quitte à emprunter un mauvais chemin.

Au pire, t’auras appris quelque chose.

***

Ce texte, je l’ai écrit pour te faire découvrir (si tu ne le connais pas) un artiste réellement inspirant. Mais surtout parce que je suis parfaitement conscient que parmi tous les gens qui me liront, y’en a certains qui vivent des jours plus rough. Tsé c’est novembre, asti. Même un banc de parc devient déprimant.

Tu vis peut-être une rupture, un deuil ou un autre moment difficile. Pis dans ce temps-là, tu cherches des bouées, un p’tit quelque chose qui t’aidera.

Moi ç’a été une chanson. Peut-être que toi, ce sera un passage dans ce texte.

Hey, j’m’essaye.

Paix.

Le Moes, également ce dude-là.

***

Pour lire un autre texte sur la rupture : 10 DOs & DON’Ts en cas de rupture amoureuse de Donovan Lauzon.

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