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Il semblerait que lorsqu’on a une idée, six personnes dans le monde sont heurtées par la même, au même moment. Je n’ai pas de difficulté à le croire. Tous les jours, parce que je réfléchis trop longtemps et que je suis lente à bouger, je me fais voler mes idées.
Récemment, on annonçait l’arrivée en ondes de “Jehane et moi”, une émission de cuisine où une animatrice inconnue reprend intégralement les recettes graisseuses et fortes en sodium de notre mère culinaire à toutes, Jehane Benoît. Qui, vous pensez, avait eu le même flash? Je me voyais d’ici, jeune végétarienne en vogue se prenant pour la Julie de Julie & Julia, cuisiner l’écureuil au vin blanc pour faire exploser les cotes d’écoute de Zeste.
Parce que rappelons-le, Jehane, en plus d’avoir un ‘’h’’ parasite au milieu de son nom, savait cuisiner la vermine.
Qu’à cela ne tienne, puisque l’idée de ressortir Jehane et ses recettes est brûlée, je n’ai plus qu’à suivre ma deuxième idée, dans le même esprit : actualiser le guide de bienséance de Louise Masson. Parce que Louise Masson se promène librement avec son titre de « spécialiste de l’étiquette » et se met à jour elle-même depuis 1991. Je trouve que ça suffit.
L’étiquette selon Marhie-Andhrée
À table : Louise Masson écrivait ceci : « À table, il ne faut ni paraître triste ni attrister personne. » Ce temps-là est révolu. Aujourd’hui, tristesse et épanchement sont bienvenus à table. Où serait-il approprié de le faire, sinon? Là où il ne faut absolument ni paraître triste ni attrister personne, c’est dans un statut Facebook. Vous êtes alors considéré comme lourd et pessimiste par des gens qui vous connaissent à peine et une réputation virtuelle de pourvoyeur de spleen est une bien mauvaise aura à traîner dans le monde réel. Gardez vos anecdotes de cancer pour les soupers avec du vrai monde.
L’humour et les affaires : Jadis, un bon blagueur dans un congrès de professionnels était considéré comme une vedette. Désormais, il est perçu comme un maniaco-dépressif non-diagnostiqué et on retrouve sa carte d’affaires partout sur le plancher à la fin du cocktail de bienvenue. « L’humour et les affaires » est donc un combo à éviter. « L’amour et les affaires », par contre, combo longtemps considéré comme le plus dangereux de tous, gagne en popularité depuis qu’on s’est rendu compte que les êtres les plus dominants étaient ceux qui savaient traîner la famille au bureau et qui maîtrisaient l’art de faire, à la fois, l’amour et de l’argent.
Sur la terrasse : Messieurs, un chandail en tout temps. Le torse nu était justifié à l’époque où vous sortiez avant le souper pour tuer des mammouths; maintenant que c’est pour boire de la sangria après le travail, chandail.
Le langage corporel : Autrefois, il était mal vu de bâiller ou de se tripoter une mèche de cheveux pour exprimer son ennui. En 2011, ère de l’expression individuelle, il n’y a plus aucun mal à laisser son corps parler pour soi. Au contraire, quel signe d’intelligence que de faire comprendre à quelqu’un qu’on s’emmerde sans prononcer un mot. Si, en bonus, on arrive avec la parole à tenir un discours contradictoire au message envoyé par le non-verbal, on peut facilement flouer le cerveau de l’opposant et faire de lui son esclave. Technique utilisée par Mesmer, qui contrôle désormais tout l’UDA, de chez lui.
À l’épicerie : La caisse libre-service est tacitement réservée à ceux qui sont capables d’utiliser la pompe libre-service à la station d’essence. Les autres, s’il-vous-plaît, on se résigne et on se dirige docilement vers une file qui aboutit dans la ressource humaine.
Le snobisme : Dans le temps de Louise Masson, l’attitude snobinarde rêche donnait une impression de supériorité intellectuelle. Désormais, tout le monde est au courant qu’elle trahit un manque de valorisation, une impression de carrière ratée et la prise de forte médication. L’attitude à adopter désormais pour imposer sa supériorité, c’est la bonté mystérieuse. L’attitude de Geneviève St-Germain, mais inversée.
Autrement, si ma lecture est bonne, tout le reste ne tient plus. Louise Masson elle-même ne tient plus, les fesses serrées sur sa chaise, la seule à souffrir encore de reflux quand elle aperçoit un moulin à poivre sur une table pendant un repas.
C’est une mise-à-jour sommaire, je l’admets. Mais pour être franche, ma vraie première idée, c’était d’enregistrer une reprise de la chanson Da ya think I’m sexy de Rod Stewart. Mais pas de chance, Ima nous a damé le pion cette semaine, à cinq quidams et à moi.
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