Logo

Un mimosa avec Daniel Tadros

On a rencontré la moitié des jumeaux de l’heure.

Par
Hugo Meunier
Hugo Meunier
Publicité

Les portes de l’ascenseur s’ouvrent sur Daniel Tadros, élégant avec son veston bleu, sa chemise fleurie, sa barbe georgecloonesque et sa chevelure argentée. Je lui tends la main juste pour voir à quel point il se crisse de la COVID, mais il me gratifie plutôt d’un elbow bump. Prudent finalement.

« Je fais quand même attention », souligne-t-il, en m’accueillant chaleureusement dans le spacieux condominium qu’il habite depuis un an dans le quartier Dix30.

Je lui tends la main juste pour voir à quel point il se crisse de la COVID, mais il me gratifie plutôt d’un elbow bump. Prudent finalement.

« Désolé si ça sent les huîtres, j’ai passé la soirée avec quelqu’un hier », lance-t-il une fois chez lui. « Heille écris pas ça là!?! », ajoute-t-il aussitôt, en me voyant griffonner l’information dans mon calepin. Je l’avertis dès lors de ma manie de TOUT prendre en note et comme mon père était policier, rien ne m’échappe mouhahaha.

Publicité

Le salon d’un blanc immaculé accueille une petite batterie, un piano et une guitare, qui traîne négligemment sur le sofa.

« Tu veux un mimosa? », me demande Daniel Tadros, déjà dans le frigo.

Il est 9h30 à Brossard mais 17h30 quelque part dans le monde.

Ça me rappelle une lointaine entrevue avec ma pref Marie-Chantal Toupin quand j’étais à La Presse, où on enfilait gaiement verres de blanc et cigarettes en d’sour de la hotte.

Nous prenons ensuite place autour d’une petite table vitrée, sur laquelle reposent un bol de fruits, le livre « Les cartes abondances » et un jeu de tarot.

Son jumeau Éric habite Terrebonne et ne viendra pas. Les deux inséparables sont en phase dans le dossier « COVID », mais Daniel est plus volubile dans cette cause, sur les réseaux sociaux à tout le moins.

Cette cause – pour ceux qui se posent la question – prêche en faveur du déconfinement immédiat et remet en doute les motifs derrière les mesures prises pour contenir cette pandémie qui a eu pour effet de paralyser la planète à grands coups de #Resterchezvous.

« Tu veux un mimosa? », me demande Daniel Tadros, déjà dans le frigo. Il est 9h30 à Brossard mais 17h30 quelque part dans le monde.

Publicité

Et si vous n’avez encore jamais entendu parler des jumeaux Tadros, et bien ils ont fait beaucoup jaser récemment en participant comme artistes-invités à la seconde manifestation anti-confinement qui partait de Montréal pour se rendre à Québec le 17 mai dernier. Ils ont aussi lancé il y a quelques jours la chanson « Ça va bien aller », qui s’est attirée les railleries ici et là.

Extrait:

Ça va bien aller

laisse-aller, laisse-aller

c’est le temps d’aimer

Ça va bien aller

Pour le reste, les jumeaux Tadros – Daniel surtout – bombarde sa page FB de vidéos à saveur complotiste (il n’approuverait pas le terme) en tirant sur tout ce qui bouge : le timing du COVID de Sophie Grégoire, la chloroquine « bizarrement mise à l’index », la désinformation des médias de masse, les moutons et tutti quanti.

Publicité

Sans nier l’existence du virus, Daniel Tadros conteste ouvertement les moyens pris pour le neutraliser. « On va pas empêcher tout le monde de conduire parce t’as 0,01% des chances de mourir », illustrait d’ailleurs récemment le principal intéressé dans une de ses nombreuses capsules, qui récoltent parfois plusieurs milliers de vues et centaines de partages.

Une visibilité inattendue et soudaine pour le duo, et c’est bien ce qui est le plus paradoxal dans toute cette histoire.

Throwback.

Publicité

De la persévérance

On peut sans doute reprocher des choses aux Jumeaux Tadros, mais assurément pas leur persévérance. Si les plus jeunes découvrent aujourd’hui l’identité d’un Tadros qui n’est pas affilié à Xavier Dolan, ceux de mon âge savent qu’ils roulent leur bosse avec une ardeur presque touchante depuis le bogue de l’an 2000.

Je me souviens encore avoir reçu, ému, le CD de Noël des jumeaux Tadros, incluant six versions de leur chanson All We Want For Christmas Is Love. Cette chanson a d’ailleurs ensuite été popularisée par Marie-Chantal Toupin, prouvant une fois de plus que tout est dans tout.

Abonnés aux coups d’éclat, les Jumeaux Tadros avaient aussi passé en 2012 sept jours et sept nuits dans une bulle de 14X14 pieds sur l’esplanade de la Place des arts pour composer des chansons de leur album Vis ta vie.

Publicité

Abonnés aux coups d’éclat, les Jumeaux Tadros avaient aussi passé en 2012 sept jours et sept nuits dans une bulle de 14X14 pieds sur l’esplanade de la Place des arts pour composer des chansons de leur album Vis ta vie. Les Tadros ont aussi voulu aller dans l’espace à bord d’une navette spatiale pour chanter un hymne à la paix universelle, ont diffusé 24h sur 24h pendant une semaine leur succès Yo Quiero Bailar sur un immense panneau à la sortie du pont Jacques-Cartier, en plus d’avoir passé une audition en 2015 à l’émission America’s Got talent.

Ils ont sorti jusqu’ici 10 albums et certaines de leurs chansons ont connu un certain succès, dont une toune millionnaire sur You Tube.

Publicité

Une feuille de route en dents de scie pour les jumeaux de Saint-Hubert, nés de parents d’origines égyptienne et italienne (ils sont les cadets de quatre garçons), qui ont mis les bouchées doubles pour vivre de leur art. « On a lâché nos jobs à 27 ans pour se consacrer à la musique. On faisait des stunts parce que c’est ce qu’on faisait de mieux », résume Daniel, 43 ans, qui étudiait en marketing à l’Université Concordia, à l’instar de son frère.

«On a lâché nos jobs à 27 ans pour se consacrer à la musique. On faisait des stunts parce que c’est ce qu’on faisait de mieux», résume Daniel.

Les deux travaillaient pour une compagnie pharmaceutique avant de se lancer dans la musique, mais toujours avec une twist entrepreneuriale. « On a produit plus de 300 shows à travers le Québec, dont 30 fois à la Place des Arts. On louait l’endroit et on était producteurs, promoteurs et artistes », raconte Daniel, qui a par exemple payé de sa poche (avec son frère) 5000$ pour s’offrir à deux reprises la scène de l’Étoile de Brossard.

Publicité

Bref, les jumeaux se sont toujours débrouillés avec les moyens du bord. « On n’a jamais été dans le top comme Éric Lapointe. On a travaillé fort, on imprimait nos billets et on n’a pas eu de support des radios commerciales », souligne le musicien/entrepreneur, avant de se raviser en mentionnant que leur toune de Noël passe encore à la radio durant les fêtes quinze ans plus tard.

Parallèlement à leur carrière musicale, les jumeaux disent avoir développé plusieurs business: une de vente d’instruments provenant de la Chine, une d’affichage urbain et un projet d’application de stationnement (sorte d’Uber du parking) qui leur a valu un passage à l’émission Dans l’oeil du dragon en 2017.

Voilà pour le contexte.

Publicité

« Je suis dix ans dans le futur dans ma tête »

«Il ne manque pas de talents dans ce monde, il manque de courage. Je trouve que c’est le cas présentement et là j’ai le courage de parler.»

Cette attention médiatique tant souhaitée à coup de stunts, les jumeaux l’ont donc aujourd’hui, mais à cause d’un virus. « Je reçois plusieurs critiques, des amis qui me disent d’arrêter de faire le cave, etc », admet avec franchise Daniel, qui a néanmoins décidé de partager ses idées publiquement après avoir vu la comédienne Lucie Laurier le faire. « Il ne manque pas de talents dans ce monde, il manque de courage. Je trouve que c’est le cas présentement et là j’ai le courage de parler », se targue Daniel, qui ne connait pas Lucie Laurier personnellement, sauf à travers le truchement des réseaux sociaux.

Publicité

Le musicien ajoute que ses critiques sur l’ordre établi ne datent pas d’hier et que la COVID-19 aura été pour lui la goutte qui a fait déborder le vase.

S’ensuit une explication un brin laborieuse sur la genèse de ses idées à contre-courant, passant de l’obtention d’une citoyenneté numérique estonienne en 2016 aux conseils personnels du cryptomilliardaire du Bitcoin Tim Draper.

J’avoue ne pas avoir tout pigé, mais en gros j’ai retenu que selon lui les frontières telles qu’on les connait vont changer, que certaines grosses compagnies vont finir par remplacer les nations et que les gouvernements ont trop de pouvoir.

Publicité

J’avoue ne pas avoir tout pigé, mais en gros j’ai retenu que selon lui les frontières telles qu’on les connait vont changer, que certaines grosses compagnies vont finir par remplacer les nations et que les gouvernements ont trop de pouvoir. « Les états, on leur fait trop confiance, mais tout se dégrade de plus en plus et on est à un point de non-retour », croit ce verbomoteur, qui rigole en voyant les points d’interrogation dans mon visage et assure pouvoir m’entretenir pendant 10 articles avec tout ce qu’il sait. « Je suis comme dix ans dans le futur dans ma tête! », calcule-t-il.

Shit.

Moi qui ne sais même pas où je vais aller en vacances cet été.

Enfin, tout ça nous amène au virus, un phénomène prévisible selon lui. « Après le crash de 2008, je savais qu’un autre crash s’en venait. Là c’est un virus et je me suis tout de suite dit que quelque chose ne marche pas là-dedans.»

Entre deux gorgées de mimosa, Daniel se lance dans une diatribe ayant pour thème « à qui profite vraiment le virus à l’heure actuelle ?» .

Publicité

La réponse, en vrac: les États, les banques centrales, le pouvoir, l’OMS, bref ce qu’il nomme « la ligne d’autorité ». « On fait trop confiance à ces gens-là, qui nous privent de nos droits en entretenant la peur et on se fait manger la laine sur le dos », plaide-t-il, conscient que les critiques qu’il reçoit abondamment sont un passage obligé à la forme d’« éveil » qu’il dit avoir vécu. « Mais je dis pas avoir toutes les vérités et je ne juge pas les gens, loin de là, mais avant d’être contre quelque chose, c’est important d’aller au bout des possibilités », précise Daniel, qui reproche du même souffle aux médias d’entretenir ce climat de peur ambiante. « Pourquoi a-t-on embarqué autant de monde pour quelque chose d’à peine létal? », demande le jumeau à la barbe hirsute, sans s’enfarger dans le fait que les chiffres actuels ne permettent pas de tirer de conclusion.

«Je dis pas avoir toutes les vérités et je ne juge pas les gens, loin de là, mais avant d’être contre quelque chose, c’est important d’aller au bout des possibilités », précise Daniel.

Publicité

S’il ne nie pas l’existence du virus et les morts qui lui sont attribuables, il martèle cependant que la réaction des autorités est complètement démesurée. « Quand l’état t’empêche de travailler, te force à faire des files ou porter des masques, c’est qu’il a trop de pouvoir, qu’il est une dictature », accuse Daniel, qui s’est permis quelques gestes de « résistance », comme fermer le poste de télé d’une salle d’attente d’un Canadian Tire pendant le point de presse de Legault. « Comme on ne peut pas danser dans les bars, j’ai dansé à l’épicerie l’autre jour aussi », admet en riant celui qui ne portera jamais un masque, même s’il est « fortement recommandé ».

Après une bonne heure de tout ça, Daniel me demande à mon tour ma position dans le débat.

Je lui explique être aussi exaspéré par les crinqués de la 5G que par les porteurs de visière qui font un pas de recul de 12 mètres sur le trottoir quand je marche en leur direction sur le trottoir.

Daniel apprécie. « J’adore ton point de vue, sobre. Mais il va changer quand tu vas voir qu’on va maintenir les masques et les files », m’avertit-il.

Publicité

Même si Daniel me voit comme un des leurs, je lui assure que la portion complot-5G-BillGates de son mouvement me turn off sur un moyen temps et mine selon moi de manière abyssale la crédibilité de la cause en question.

«J’adore ton point de vue, sobre. Mais il va changer quand tu vas voir qu’on va maintenir les masques et les files», m’avertit-il.

Il ne nie pas. D’ailleurs, il n’adhère pas non plus au truc de la 5G. Mais il tient son bout sur le reste. « Laisse faire Bill Gates, mais suis la ligne d’autorité de l’argent et du pouvoir, tout est là », insiste-t-il, mystérieux, ce qui renforce mon impression d’être dans le film L’affaire Pélican.

Daniel ajoute que l’objectif de la première puissance mondiale – les États-Unis – a toujours été d’étendre son pouvoir et son influence dans le monde et que Trump – un électron libre – contrecarre actuellement ce projet d’expansion. « Et quelle est la meilleure façon de changer de président? Un crash économique….», enchaîne Daniel, heureux de constater que je comprends enfin où il s’en va avec tout ça. « Si tu peux payer un gars 5000$ pour tuer quelqu’un, tu penses pas que les banques mondiales ne peuvent pas se payer un virus… »

Publicité

Changer les idées une personne à la fois

L’entrevue se termine. Daniel doit se rendre à Saint-Hilaire rencontrer un gars qu’il a découvert sur YouTube, dont il admire les idées. Il va tirer une nouvelle capsule vidéo de cette visite d’ailleurs.

« J’espère faire changer l’idée d’une personne par jour. Il faut être ouvert d’esprit, parce que je déconstruis toute ta pensée comme ça! », lance-t-il, en s’accompagnant d’un claquement de doigts.

En attendant, seul l’avenir nous dira si la COVID n’était qu’un prétexte pour instaurer une dictature de la peur ou un vrai virus passager causé par une soupe à la chauve-souris. « C’est pas grand-chose en vérité ce virus-là, mais on parle déjà de deuxième vague », souligne, cynique, Daniel en me raccompagnant à la porte.

J’aurais 350 000 arguments pour le convaincre que le virus est quand même pas un enfant de choeur, mais bon.

«Moi, je suis mon coeur et mes passions. Et je ne pense pas que ça va me nuire, d’ailleurs j’ai plus de monde qui me suit maintenant qu’avant.»

Publicité

Avant de partir, j’ose quand même lui demander s’il ne trouve pas ça paradoxal ou frustrant de faire parler de lui pour ces idées anti-virus et non pour sa musique. Croit-il que toute cette attention controversée nuira à sa carrière musicale, sachant que lui et son frangin sont quand même un peu les têtes de Turc de plusieurs présentement? « Moi, je suis mon coeur et mes passions. Et je ne pense pas que ça va me nuire, d’ailleurs j’ai plus de monde qui me suit maintenant qu’avant », rétorque Daniel, sourire en coin, avant de me saluer à nouveau d’un elbow bump.

Damn.

Je suis tellement naïf que j’avais pas pensé à ça.

Et si la COVID avait été fabriquée en laboratoire par les jumeaux Tadros…