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Un jeu vidéo pour remplacer les cours d’histoire?
Quand j’étais jeune, on avait un seul « jeu » éducatif sur les ordinateurs de l’école. C’était une espèce de jeu où il fallait faire des bibittes en roche à la manière d’Alfred Pellan. Je sais pas ce qu’on était censés apprendre, mais on a découvert que si on cliquait assez vite sur le bouton suivant, on pouvait sauter l’étape de mettre certaines parties du corps comme la tête ou les pattes et juste faire un cul de bibitte qui flotte dans les airs.
C’était un apprentissage, j’imagine.
Bientôt, les écoles pourraient avoir un jeu éducatif pas mal plus impressionnant. En effet, le studio de jeux vidéos Ubisoft nous a invités la semaine dernière pour nous présenter leur grande nouveauté : un mode éducatif intégré à même leur plus grosse sortie des derniers mois, Assassin’s Creed Origins.
Entassés dans le laboratoire informatique du Collège Brébeuf, nous observons Marc-André Éthier, professeur à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal, entouré de quelques-uns des développeurs d’Assassin’s Creed Origins ainsi que de Yannis Mallat, PDG de la branche canadienne du géant vidéoludique, donner les consignes à la vingtaine de jeunes qui ont répondu à l’invitation.
Parce qu’en effet, les jeunes qui se trouvent devant moi sont en congé pédagogique. Ils ont décidé de venir passer leur journée de congé à l’école pour essayer un jeu éducatif. Mettons que j’aurais pas fait ça pour Tap » touche.
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Le professeur Éthier a à peine commencé à donner ses instructions, qu’une main se dresse dans les airs : « Monsieur, est-ce qu’on va pouvoir tuer du monde pareil? »
Maxime Durand, historien officiel chez Ubisoft, éclate de rire : « Non, le combat a été désactivé dans cette version. N’essayez pas de vous battre, personne ne va vouloir entrer en conflit avec vous. »
Les cris de déception fusent de toute part. Ah, là je reconnais les adolescents. Ils n’étaient pas venus apprendre, ils étaient venus poignarder des méchants.
Mais ce n’est pas ainsi que le mode Discovery, offert au grand public dès ce jeudi 22 février (gratuitement pour ceux qui possèdent déjà Assassin’s Creed Origins, et au coût de 20 $ pour les autres), fonctionne. Il s’agit plutôt d’une visite guidée de l’Égypte ancienne qui tire profit de l’attention maniaque à la reconstitution exacte des détails dont Ubisoft fait preuve depuis longtemps déjà.
Les joueurs sont invités à sélectionner l’avatar de leur choix. Pas besoin d’être un assassin ici, les jeunes présents ont choisi toute une variété de personnages allant d’une jeune enfant pauvre à César lui-même (qui a d’ailleurs passé toute la période d’essai à essayer de noyer son cheval).
Les personnages sont ensuite invités à se promener dans des lieux de l’Égypte antique recréés avec minutie. Par exemple, lors de l’essai auquel nous avons pu assister, les élèves de secondaire 3 étaient invités à visiter la bibliothèque d’Alexandrie, guidés par le jeu. À chaque pas, de l’information apparaissait; on leur présentait des œuvres d’art qu’on aurait pu y trouver, ce à quoi elles ressemblent aujourd’hui, les personnages impliqués dans l’histoire de cette mythique bibliothèque, etc.
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Force est d’admettre qu’au niveau visuel, ça frappe fort. Les graphismes des jeux Assassin’s Creed sont magnifiques, et l’étendue de la zone qu’on peut explorer est immense. C’est tout simplement quelque chose qu’aucune compagnie de logiciels éducatifs ne pourrait se permettre. Mais puisque le tout a été créé d’abord pour un jeu très lucratif, on se retrouve avec une interprétation de l’Égypte riche en détail et visuellement inégalable (à part peut-être dans les films de La Momie avec Brendan Fraser qu’on sait TRÈS historiquement justes).
Une journée typique en Égypte antique
Mais comme outil pédagogique, qu’est-ce que ça vaut? C’est ce que Marc-André Éthier a étudié justement. Il a fait essayer le jeu à des jeunes dans huit écoles, testant leurs connaissances avant et après avoir joué au jeu, et comparant ensuite les résultats avec des élèves qui avaient vu la même matière dans un cours magistral traditionnel.
Si vous pensez que les professeurs seront bientôt remplacés par des PS4, ne vous emballez pas trop vite. Les résultats restent en faveur des bons vieux profs (44 % de moyenne pour ceux ayant joué au jeu contre 55 % pour ceux ayant suivi un cours couvrant la même matière).
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Toutefois, le jeu pourrait être un outil pédagogique intéressant. Comme le mentionne Maxime Durand, historien d’Ubisoft, beaucoup de professeurs le contactaient déjà pour lui dire qu’ils utilisaient des séquences des jeux d’Assassin’s Creed pour illustrer certaines époques.
Maintenant, au lieu de devoir faire du montage pour ne garder que les séquences où il n’y a personne qui se fait poignarder, les professeurs pourront utiliser le jeu pour donner un cours interactif devant la classe, ou inviter les jeunes à explorer eux-mêmes l’Égypte en complément de leurs cours.
Et qui sait, peut-être que le soir à la maison, entre deux assassinats, ils apprendront quelque chose sur l’Histoire avec un grand H, et surtout, quelque chose de plus instructif que faire flotter des derrières d’insectes.