.jpg)
Mes hommages.
J’ai bien dû écrire 38 ébauches de billets. Des BILLETINS. Des morceaux de petites choses qui tâchaient de vous tirer risette. De vous fleurir le bulbe. Cette semaine manque cruellement de musicals qui finissent par une petite canne de bois qui te tire de scène par le cou.
J’aime ça, quand vous riez.
Ça me rassure. Comme quand ma mère faisait couler son bain après m’avoir bordée dans mon petit lit de St-Hubert. J’avais mon Luminou, pis le son du bain. Mon petit quart-cuisse de quiétude.
Mais cette fois, je ne peux que taper du pied comme le petit Josué qui refuse de retirer ses culottes courtes pour faire sa toilette.
Je n’ai qu’une seule envie, hurler un NON Pocahontesque. Me déchirer le coat à m’en fendre la glande pituitaire. Comme vous tous, j’imagine que la fatigue m’use. Aussi.
Sale, sale semaine.
Et l’objet ici ne se gorge ni du sang de Trump, du rideau tombé de Cohen ou de la délicate loi 70 qui sert aux assistés sociaux un autre petit four à la bile. Il se gorge de ma peur.
D’une peur-colère que j’ai pourtant le privilège de ne ressentir que rarement.
Je promenais le caniche, hier soir. Comme tous les soirs. J’ai la chance d’habiter un quartier tissé de quiétude, de chaumières aux lumières allumées, habitées par des gens que je ne connais pas, mais qui me sourient pendant qu’un stew crépite sur le feu.
Plus jeune, j’étais cette brindille au vent qui sursautait à la moindre quenouille qui craque. En déménageant à Montréal, je suis passée de cette brindille qui ne sortait pas de chez elle sans tenir fermement son set de clés astucieusement positionné en gant de Fredy Krueger, à une fille qui refuse de se véhiculer dans la crainte. Anéwé, je sais ben pas ce que ferais de mon arme de pacotille, plus craintive de blesser mon assaillant fictif que de jouer les Jackie Chan avec mon porte-clé en forme de cornet deux boules.
J’ai décidé de faire confiance. De tâcher de la dégager. D’y croire. Ça s’entretient, ces affaires-là. Et on finit par le transpirer dans son collet de chemise. Le concret au cou.
Puis, a circulé cet avis de recherche au sujet de ce garçon, un dénommé François, qui a sauvagement attaqué trois filles, pas loin de chez moi, la semaine dernière. Un sordide fait divers dans une mer de renvoyou, se dira-t-on. Le gars est bouclé. L’affaire est close pis le pas-fin, retiré de ma partie de cartes. Mais le trottoir est encore sale.
Depuis une semaine, il ne se passe pas un soir, pendant que le caniche besogne à se vidanger le tuyau, sans que je jette douze regards furtifs à la minute autour de moi, EN CAS. Et si ce dividu, au coin de la rue, celui qui mange un burrito, planifiait de me ravir la flore quand il aura fini sa bouchée? Et si ces deux potes furieusement inoffensifs, assis à une table à pique-nique du parc, n’attendaient que mon passage pour dépecer ma carcasse et se faire une cape avec mon cuir?
Chaque fois que le frisson me gagne la rondelle – un frisson de tarée, j’en suis bien consciente – je suis en tabarnak. FURIEUSE. Aucun autre mot ne me vient à la corde. Y’a pas de poésie ni d’image festive pour me crémer le saint-honoré.
Des milliers de filles vivent l’horreur. La dénoncent ou l’enfouissent. Émergent. Se résilient. Survivent. Fendent le vent.
Moi, j’ai rien vécu de tout ça.
Et me revoilà pourtant plus brindille que jamais. 35 ans, TRENTE-CINQ, et l’irrationnel qui reprend le dessus. L’osti de « et si ». La paranoïa à broil.
Oh! Le pas-joli finira par s’estomper. Les Dieux de la danse triompheront et une intrigue, UNE, finira ben par être bouclée dans District 31.
Jusqu’à la prochaine marche, où je murmurerai tout bas, sans faire vibrer le tympan de personne: « Tu mourras pas. Tu mourras pas, Catherine. Tu mourras pas ».
Je mourrai pas. On mourra pas.
Toute va ben aller.
La bise.
Pour lire un autre texte de Catherine Ethier: « La peur ».