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Trouver l’équilibre dans sa consommation de cannabis

Quel regard portent trois jeunes Autochtones d’horizons diffĂ©rents sur la consommation de cannabis? On est allĂ©s les rencontrer pour le dĂ©couvrir.

Par
Kahenientha Cross
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URBANIA et le ministĂšre de la SantĂ© et des Services sociaux du QuĂ©bec sont fiers de s’associer pour sensibiliser les jeunes de maniĂšre dĂ©complexĂ©e sur la consommation de cannabis.

Ce texte s’inscrit dans une campagne d’information et de sensibilisation plus large liĂ©es aux risques associĂ©s Ă  l’usage du cannabis et a Ă©tĂ© validĂ© par certains partenaires autochtones. Les propos rapportĂ©s reprĂ©sentent exclusivement les opinions individuelles des personnes interviewĂ©es.

Notre gĂ©nĂ©ration a ses propres habitudes, lorsqu’il est temps de se relaxer. Étant donnĂ© tout le stress qui nous affecte ces jours-ci, certains dĂ©cident de brĂ»ler de la sauge, d’aller flĂąner dans les rues en bicyclette ou simplement de se poser devant Netflix aprĂšs une longue journĂ©e. D’autres optent, de temps Ă  autre, pour une petite visite Ă  la SQDC.

Les deux cÎtés de la médaille

Sahawisoko Arquette est diplĂŽmĂ© de Kahnien’kĂ©ha RatiwennahnĂ­:rats, le programme de revitalisation des langues autochtones de Kahnawake. Et il connaĂźt bien les effets de la consommation de cannabis. « Personnellement, ça m’a fait plus de bien que de mal », explique-t-il. « Mais ça peut varier beaucoup selon les personnes. »

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Dans les dĂ©bats entourant le cannabis, Sahawisoko soutient le principe que tout le monde vit des expĂ©riences diffĂ©rentes, et que le plus important est d’écouter son corps et sa tĂȘte. « Il vaut mieux voir les deux cĂŽtĂ©s de la mĂ©daille. Oui, c’est un mĂ©dicament, et oui, ça peut Ă©galement ĂȘtre une drogue. »

«Ça commençait Ă  me faire sentir inconfortable, de fumer, et j’ai rĂ©alisĂ© que je n’avais plus Ă  m’assujettir Ă  ça»

L’an dernier, Sahawisoko s’est mis Ă  rĂ©duire sa consommation de cannabis jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’il n’y songeait plus depuis des mois. « Ça commençait Ă  me faire sentir mal, de fumer, et j’ai rĂ©alisĂ© que je n’avais plus Ă  m’assujettir Ă  ça », dit-il.

Il met toutefois l’accent sur le fait que ce sont ses rĂ©actions physiques au cannabis qui l’ont amenĂ© Ă  cesser d’en prendre.

Sahawisoko s’est joint l’an dernier au corps professoral de l’école primaire Karonhianonha, Ă  Kahnawake, oĂč il enseigne Ă  des classes de troisiĂšme et de quatriĂšme annĂ©e. Il espĂšre encourager le renouveau du kanien’kĂ©ha, la langue mohawk, chez les jeunes et amener ces derniers Ă  reconnecter avec leur culture. Si ses Ă©lĂšves lui posent des questions, Sahawisoko est ouvert et honnĂȘte avec eux Ă  propos de la consommation de drogues et ses consĂ©quences. « C’est un sujet important dont il faut parler », estime-t-il. « Des ados qui grandissent vont vouloir explorer et expĂ©rimenter, et je prĂ©fĂšre qu’ils le fassent de maniĂšre sĂ©curitaire. »

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Les risques d’une consommation malsaine

DiplĂŽmĂ©e en travail communautaire auprĂšs des jeunes, Karahkwahawe Stacey-Delisle songe en ce moment Ă  Ă©tudier en psychologie et hĂ©site entre les universitĂ©s Queen’s et Concordia. Elle est pour sa part plutĂŽt mal Ă  l’aise Ă  l’idĂ©e que des jeunes consomment du cannabis pour des raisons non mĂ©dicales.

« J’ai vu comment ça peut mal virer pour certaines personnes »

« J’ai vu Ă  quel point ça peut mal virer pour certains », dit-elle. « Une personne proche de moi a consommĂ© de l’ñge de 13 ans Ă  l’ñge adulte, et a souffert d’une grave psychose accĂ©lĂ©rĂ©e par une surconsommation habituelle de cannabis. »

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À cause de cette psychose, cette jeune personne a Ă©tĂ© hospitalisĂ©e plusieurs mois et peine toujours Ă  s’en remettre. Karahkwahawe estime que si cette personne avait eu accĂšs Ă  plus d’information et d’encadrement sur le cannabis et ses consĂ©quences au bon moment, la situation aurait pu se jouer autrement.

«Lorsque quelqu’un commence Ă  dĂ©pendre du cannabis, plutĂŽt que d’en faire une option de relaxation parmi tant d’autres, la situation devient prĂ©caire.»

« Je me souviens que lorsque j’étais adolescente, je n’ai eu accĂšs qu’à trĂšs peu d’information sur le cannabis », explique-t-elle. « C’était tabou comme sujet, vu que c’était encore illĂ©gal. Mais on voyait souvent des gens en consommer, donc c’était un peu confondant. Ce genre de situation n’aide pas Ă  sensibiliser les jeunes sur une consommation saine et raisonnĂ©e. »

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La future Ă©tudiante en psychologie a d’ailleurs des conseils pour les gens qui l’entourent et qui ne sont pas certains que le cannabis leur conviendra. « Je leur dis de ne pas l’utiliser en rĂ©ponse Ă  des traumatismes. Ce n’est pas fait pour oublier ses problĂšmes, car c’est lĂ  que ça devient un tremplin vers une consommation malsaine », estime Karahkwahawe. « Lorsque quelqu’un commence Ă  dĂ©pendre du cannabis, plutĂŽt que d’en faire une option de relaxation parmi tant d’autres, la situation devient prĂ©caire. »

UNE UTILISATION RAISONNÉE ET DÉCOMPLEXÉE DU CANNABIS

Felicity Blacksmith est elle aussi souvent entourĂ©e de jeunes membres de sa famille, et elle voudrait Ă©galement que, s’ils dĂ©cident un jour de consommer, ils soient conscients des effets dĂ©lĂ©tĂšres que cela peut avoir sur leurs jeunes corps et leurs cerveaux. « C’est correct d’en prendre de temps Ă  autre, pour s’amuser ou socialiser. Mais il ne faut pas abuser ni utiliser le weed comme bĂ©quille », conclut-elle. « Parce que ça ne mĂšne qu’à de la dĂ©pendance et Ă  une mauvaise hygiĂšne de vie. »

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Felicity étudie au CollÚge Dawson en psychologie et prÎne une utilisation raisonnée et décomplexée du cannabis.

«C’est stressant Ă  l’école ces temps-ci, et fumer de temps Ă  autre m’a aidĂ© Ă  rester calme face Ă  la charge scolaire quand ça devenait trop prenant.»

« C’est une des choses qui m’aident beaucoup Ă  la fin d’une longue journĂ©e », explique la jeune Ă©tudiante autochtone. « C’est stressant Ă  l’école ces temps-ci, et fumer de temps Ă  autre m’a aidĂ©e Ă  rester calme face Ă  la charge scolaire quand ça devenait trop prenant. »

Felicity a commencĂ© son parcours d’études postsecondaires en 2017 avec le programme Journeys, offert Ă  Dawson. Ce programme de transition d’un an est principalement destinĂ© aux Ă©tudiants autochtones et se concentre sur les enjeux et les points de vues des PremiĂšres Nations. Felicity a reçu une distinction pour sa persĂ©vĂ©rance, lors de la cĂ©rĂ©monie de remise des diplĂŽmes.

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Elle poursuit actuellement un DEC en psychologie, de chez elle, dans la communauté de Waswanipi, à une heure et demie de voiture de Chibougamau et à plus de huit heures de Tio:tiake (Montréal). La fierté que sa nomination a insufflée à sa communauté est palpable, et son entourage lui offre un soutien essentiel.

«Il faut trouver un Ă©quilibre, prendre le temps de faire ce qu’on a Ă  faire, pour pouvoir fumer aprĂšs»

« Il faut trouver un Ă©quilibre, prendre le temps de faire ce qu’on a Ă  faire, pour pouvoir fumer aprĂšs », confie Felicity. « Je ne fumerais jamais avant un cours ou avant de faire des choses importantes. Je ne consomme qu’aprĂšs avoir tout accompli, aprĂšs une longue journĂ©e. Il faut savoir choisir son moment pour le faire. »

Si le cannabis peut parfois ĂȘtre vu comme « drogue d’entrĂ©e », Felicity soutient qu’il ne l’a jamais menĂ©e vers des drogues dures ou des psychotropes. « Ç’a toujours Ă©tĂ© un high qui me convenait, ça ne m’a jamais donnĂ© envie d’essayer quelque chose de plus fort », conclut-elle.

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