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« transformé » : une plongée sensorielle au cœur de l’humain

On s’est entretenu avec les créateurs de la dernière exposition d’OASIS immersion.

Par
Alice Lemay
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URBANIA et OASIS immersion s’unissent pour vous faire découvrir l’exposition de réalité immersive transformé présentée au Palais des congrès.

Trois salles, huit histoires et une même plongée émotionnelle : telle est la promesse que tient l’exposition de réalité virtuelle transformé. Aucun casque à l’horizon, cependant : ici, la narration est à taille humaine, projetée en jets d’images, de sons et de couleurs sur les murs des pièces. Les spectateurs sont donc libres de déambuler ou de s’asseoir pour s’imprégner du récit qui leur est conté en 360 degrés.

À chaque récit son narratif immersif. On the Morning You Wake, par exemple, relate le courage du peuple hawaïen lorsqu’une alerte annonce qu’un missile s’écrasera sous peu sur l’île. Vestige, lui, donne la voix à Lisa, une amoureuse endeuillée qui vient de perdre brutalement son compagnon. Goliath part du témoignage d’un gamer pour s’attaquer au tabou de la schizophrénie. Quant à l’œuvre allemande Conscious Existence, elle offre un commentaire lumineux et poétique sur le véritable sens de la vie.

Entre ces œuvres, un fil rouge, grâce auquel on comprend la démarche du projet transformé d’OASIS immersion.

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« On voulait créer une expo sur l’empathie nécessaire pour passer à travers. Après avoir fait une analyse rapide des différentes œuvres de réalité virtuelle qui existaient, on a choisi celles-là parce qu’elles sont très humanistes; elles aident à faire comprendre des sujets vraiment difficiles, mais elles ont toutes une sorte de regard qui cherche à montrer la lumière qu’il y a au bout de la traversée », explique Johnny Ranger, directeur artistique chez OASIS immersion, un espace immersif spectaculaire situé au Palais des congrès de Montréal, cocréé par Nicolas Lassonde et Denys Lavigne.

Et c’est une traversée particulièrement émouvante que narre Notes on Blindness, l’une des dernières œuvres de l’exposition. Originalement cocréée par Arnaud Colinard et Amaury La Burthe, puis adaptée à l’espace OASIS par Vincent Guttmann, directeur du studio français Small Creative, cette installation offre une nouvelle maison virtuelle aux notes vocales de John Hull, un homme qui perdra la vue en 1983 et enregistrera ses impressions au fil de sa descente en cécité.

« Ce sont les vrais enregistrements audio, et c’est pour ça que le son est très particulier. C’est même l’élément principal de l’expérience », estime Vincent Guttmann. Et le résultat de cette expérience est celui d’un voyage intérieur poignant, entre redécouverte du monde et de soi, dont tous ceux ayant rendu l’installation possible ont accepté de nous dévoiler les coulisses.

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D’une forme à l’autre

Avant d’arriver à l’espace OASIS, Notes on Blindness a eu plusieurs formes et plusieurs vies, dont celle d’un court-métrage réalisé par Peter Middleton et James Spinney, qui a même récolté un prix Emmy.

Ce travail visuel se base en partie sur le livre autobiographique Touching the Rock (1990), écrit par John Hull lui-même, mais surtout sur ses fameux enregistrements recueillant ses émerveillements, ses peines et ses observations à l’aube de sa perte de la vue.

« En fait, ils ont écrit à John Hull et ils ont demandé : “Est-ce qu’on pourrait accéder à ces cassettes pour faire un film?”, mais ils n’ont eu aucune réponse de sa part. Puis, six mois plus tard, ils ont reçu une boîte de cassettes remplie à ras bord! Je dois même encore en avoir une photo quelque part », relate Arnaud Colinard.

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Après l’aventure cinématographique est venue l’autre, plus technologique, lorsque Notes of Blindness a été adaptée en réalité virtuelle afin de permettre à chaque personne de vivre les mots de John Hull de façon individuelle et sensorielle. « Dans l’expérience de RV, on est enfermé dans son casque et on a aussi un casque sonore sur les oreilles. On est complètement isolé du reste », explique Arnaud Colinard.

Préparer l’immersion

Arrive alors OASIS immersion, ses salles vastes, ses murs hauts et un tout nouveau challenge : faire de l’expérience intimiste de réalité virtuelle qu’avait été jusqu’alors Notes of Blindness une immersion ouverte qui se vivrait en groupe plutôt que seul.

« Ça a été toute une problématique d’adapter ce contenu à une salle comme OASIS, car l’expérience de RV est construite pour être vécue de façon solitaire. Là, les espaces sont super grands, la salle est très grande. Ce n’est pas la même chose que dans l’expérience de RV où, quand je tourne la tête, je vois tout, tout de suite. Là, comme l’espace est très grand, les gens ne voient pas la même chose aux quatre coins », explique Vincent Guttman.

Il faut donc trouver le moyen de faire en sorte que cet espace soit « habité, mais aussi habité de partout », comme dit Johnny Ranger.

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Se pose alors la difficulté de transmettre la perception d’une personne unique à une foule diverse et de faire en sorte qu’elle la reçoive avec la même intensité qu’un seul spectateur.

« C’est ça aussi, le travail qui, à mon avis, a été un peu touchy. Il fallait faire ressentir, ou du moins essayer de faire ressentir ça à 500 personnes qui allaient dans la même salle », raconte Arnaud Colinard.

Accompagnés par l’équipe de Vincent, les fondateurs de l’installation ont fait face à différents enjeux de taille : avoir une lumière suffisamment puissante, un son occupant tout l’espace, etc. « C’est aussi un gros travail de spatialisation du son. Quand on marche dans la salle, il y a des sons qu’on entend dans un coin de la pièce qu’on n’entend pas du tout de l’autre côté. C’est vraiment lié à ce qui se passe dans le film », décrit Johnny Ranger.

S’ajoute à cela l’impératif des 12 minutes. Les passages doivent donc être aussi courts que minutieusement choisis pour ne pas dépasser le temps prévu. « Pour faire une expo avec une certaine variété, il fallait que les œuvres aient aussi une certaine durée : 8 minutes, 10 minutes, 12 minutes. Plus que ça, ça devient autre chose. Il faut qu’en 10 minutes, on vive pleinement l’expérience, puis qu’on passe à une autre », précise Johnny Ranger.

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« L’œuvre originale dure une heure, donc il a fallu faire un gros travail d’adaptation pour bien rendre tout cela immersif. Il fallait revoir le contenu de l’œuvre, mais aussi tout revoir sur le plan technique », récapitule Arnaud Colinard.

Vivre l’individuel ensemble

Le résultat est un succès. Les jeux de lumières se substituent à l’obscurité du casque, les capteurs au sol suivant les pas des spectateurs ajoutent au côté interactif et les images vécues au départ en solo sont désormais visibles aux yeux de tous et en temps réel. C’est presque l’aboutissement d’un rêve professionnel, pour ceux qui ont rendu l’installation possible et qui eux-mêmes redécouvrent l’histoire de John Hull d’une façon plus spacieuse, émotionnelle et, surtout, libre.

« On passe d’une expérience conçue pour quelqu’un de seul, d’isolé au milieu de rien, à une expérience pour 200 personnes en même temps. Du coup, le propos ne passe pas pareil et on est plus sur du ressenti, parce que le propos vise moins une personne en particulier. Chacun le prend comme il veut », constate Vincent Guttman.

« Ce qui nous a motivés [Vincent et moi] à faire de la RV, c’est qu’on peut toucher un peu au cinéma et, en fait, tout d’un coup, OASIS, c’est un peu comme si on rapprochait la réalité virtuelle du cinéma parce qu’on a cette immersion », s’émerveille Arnaud Colinard.

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Au départ un inconvénient, le côté ouvert de l’exposition est devenu une force. « Là, on a une expérience collective. Et ça, franchement, c’était vraiment génial parce que j’aimerais partager cette expérience avec mes enfants, mais sans forcément qu’ils soient isolés. Il y a aussi de l’empathie et de l’émotion qui circulent dans un espace quand on est plusieurs », conclut le cofondateur de Notes of Blindness.

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D’autres installations virtuelles pleines de couleurs et d’émotions vous attendent à l’exposition transformé d’OASIS immersion. Réservez vos billets : juste ici.

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