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“Ever tried, ever failed. No matter. Fail again, fail better.”
— Samuel Beckett
Je ne peux pas être le seul qui lit les phrases de cadres de chez Home Sense pour me remonter le moral. Je dois avouer qu’elles m’atteignent rarement quand je les vois accrochées dans les cuisines ou les toilettes.
Comme toutes ses autres, j’adore cette phrase de Beckett. En plus, en cas d’échec, elle peut vraiment consoler. Néanmoins, il faut être prudent. Le “Fail again, fail better” peut nous convaincre de la pertinence d’un Spice World 2.
On m’a demandé de parler de l’échec et je n’ai pas su quoi dire.
Je pensais que ça serait facile; que je n’aurais qu’à faire un abrégé de ma carrière d’acteur qui, depuis sa genèse, navigue allègrement entre la mer de la persévérance et l’océan du pathétisme. Quels mots utiliser quand on est heureux de faire une audition pour de la figuration dans une pub de Lebeau vitres d’autos (audition que j’ai échouée d’ailleurs)?
Je ne sais pas quoi dire sur l’échec parce que, comme tout le monde, je le déteste et face à l’exécration, les mots fuguent plus efficacement qu’un adolescent dans 30 vies. Ce principe s’applique aussi quand je tente de parler du radis et des magasins Stitches.
Je n’aime pas l’échec, peu importe qu’il soit amoureux ou vécu après une partie de Puissance 4. À travers la honte, la déception ou la colère, il nous confronte à notre propre médiocrité et, bien souvent, il ébranle notre confiance. Aucun médecin ne recommande ça.
Pourtant, on est obligé. L’échec est une certitude absolue.
Sans même appeler à l’émission bizarre de voyance à Vtélé (dont les animateurs semblent importés d’un film des frères Coen), je sais qu’au cours des 365 prochains jours, je vivrai des échecs. C’est bien ce qui frustre le plus.
Les échecs, c’est comme le reportage sur les nids de poule à Montréal par TVA Nouvelles. Peu importe ce qui arrive, ça existera. La différence, c’est que je préfère voir des gros plans de nids de poule géants, des gros plans de nid de poule sur une rue passante et une entrevue avec un automobiliste incommodé à un feu rouge.
En fait, je suis tellement certain d’avoir des échecs que j’ai déjà fait une liste de ceux que je vivrai cette année :
- L’écriture correcte du mot “dythirambique”. Vous voyez! Je l’ai ratée!
- Le test de la soie dentaire chez le dentiste. Encore une fois, je mentirai (mal) lorsque le dentiste me demandera : “Te passes-tu la soie dentaire tous les jours?” Alors, la bouche en sang à la manière d’un vampire dans True Blood, je répondrai avec un “… Oui…” aussi convaincant que celui utilisé quand la mère de notre ami nous demandait si on aimait son coke maison.
- Avoir du plaisir en écoutant du Creed.
- Lire La Guerre des Gaules de Jules César au complet. Pour la 18e année consécutive, je ne réussirai pas à franchir le cap des 60 pages. (Si vous ne savez pas de quoi je parle, sachez que tous vos problèmes de sommeil sont réglés! Oubliez les tisanes, somnifères, chutes frontales dans les escaliers et courez acheter ce livre. Le récit de la campagne contre Publius Crassus en Aquitaine est recommandé par les médecins.)
- Populariser le style vestimentaire dit “normal” à Osheaga. On pourrait peut-être essayer quelque chose de différent que l’esthétique “beatnik au recyclage”.
- Envoûter les gens avec ma passion pour Henri IV Roi de France et de Navarre. Je suis à court de ressources. Même quand j’ai appelé à son émission, le volubile Ron Fournier n’a pas voulu en parler…
- Célébrer le mercredi des Cendres à sa juste valeur.
- Être complètement serein avec mon conseiller financier. Je ne le connais pas, pourtant il sait tout de moi… Au moins, ça me fait comprendre l’inconfort des filles que j’invitais au restaurant.
- Accepter passivement que les livreurs de meubles/électriciens/gars du câble n’enlèvent pas leurs bottes et marquent délicatement leur passage sur mon plancher sans s’excuser.
- Trouver une conclusion à ce texte.
PS Je vous souhaite que vos ratages soient suivis d’une victoire. La réussite est le meilleur remède contre l’échec. Sinon, ne perdez pas espoir “L’échec est la mère de la réussite”. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le tableau de chez Home Sense.
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Pour lire un autre texte de Philippe Audrey Larrue St-Jacques : “Suis-je amoureux?”
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