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Théodore Pellerin: Conquérir Hollywood sans trop s’en faire avec ça…
Ils sont rares, les comédiens qui passent d’un téléroman de Fabienne Larouche à une série à succès sur Netflix. C’est pourtant le chemin qu’aura fait Théodore Pellerin en moins de cinq ans. Après 30 vies et The OA, ce sont maintenant plusieurs plateaux de cinéma (majoritairement américains) qui attendent le jeune homme. On aura beau le voir bientôt sur les billboards du monde entier, pour lui, le succès n’est qu’accessoire.
Acteur / 21 ans / Signe astrologique non divulgué (les comédiens sont des êtres mystérieux)
Quand on me demande ce que je fais dans la vie, je réponds… acteur, la plupart du temps. Caissier, quand j’ai moins envie de parler.
Jouer me permet… d’apprendre et d’explorer. Quand j’ai commencé au secondaire, je n’étais pas attiré par les textes, l’idée de comprendre l’humanité ou de défendre des points de vue… Je faisais ça pour m’amuser. Pour « jouer », littéralement. Puis à force de m’intéresser au cinéma, j’ai vite réalisé que je n’arrivais pas à exécuter les transformations que les grands comédiens accomplissent. À 16 ans, mon envie d’être meilleur est devenue obsessive. Je m’isolais, j’analysais : j’étais conscient de n’avoir aucune expérience de vie ni formation solide en théâtre. J’ai compris que je devais aller vers les autres et, surtout, écouter pour m’améliorer. Je suis beaucoup plus libre depuis que je m’observe moins.
En 2018, les créateurs se doivent d’aborder… Il y a plein de choses dont on a collectivement besoin de discuter, notamment ce qui se passe en politique internationale. La montée de la droite et du fascisme est un sujet sur lequel il faudrait se pencher, mais il y a tellement de façons de le faire à travers tant de personnages… Si je savais lesquels privilégier, je serais auteur! Par contre, je crois être en mesure d’aider ceux-ci à raconter notre monde. Et illustrer notre société, c’est crucial si on veut évoluer.
Cette année… je participe au tournage de plusieurs films, surtout américains. Les productions étrangères sont très secrètes; je ne suis pas autorisé à dévoiler quoi que ce soit. [NDLR : On sait qu’il sera de la distribution de Boy Erased, film de Joel Edgerton avec Nicole Kidman et Xavier Dolan.] C’est drôle, parce que les États-Unis m’intimidaient, il y a un an. Je trouvais démesurée l’importance que l’industrie hollywoodienne se donnait et surtout l’importance qu’on lui accorde ici. Quand j’ai décroché un petit rôle dans The OA, les médias québécois ont repris la nouvelle. Je suis content que les gens soient heureux pour moi, mais ce n’était vraiment pas une grosse affaire! Bref, j’avais envie d’aller voir là-bas (parce qu’il y a plus d’occasions qu’ici), mais je trouvais que les gens prenaient tout ça trop au sérieux. En discutant avec mon entourage et mes collègues, j’ai changé de perspective. Pour ne pas freiner mes ambitions, j’approche maintenant mes projets américains et québécois de la même façon. Je me dis que c’est partout pareil : on travaille avec des gens autour de textes et on fait du mieux qu’on peut pour leur rendre honneur.
Le milieu culturel québécois manque de… réflexion et de recul. On est une société de plaisir : l’humour domine! C’est bien, mais quels humoristes nous amènent à réfléchir sur nous-mêmes? Ils sont peu nombreux. Et c’est normal, quand on y pense : dès que quelqu’un apporte des idées, on a peur. C’est pourquoi on ne porte pas attention à nos intellectuels et n’a à peu près pas d’émission de débats. Bref, il nous manque des espaces culturels pour réfléchir ensemble. Il faut devenir suffisamment confortables avec la discussion pour remettre enfin les choses en question.