Synonyme de classe, d’authenticité, de talent et de fougue, Lauryn Hill est selon moi, une des artistes les plus accomplies de sa génération. Elle ne nous aura donné qu’un seul album, mais quel album! Moins d’un an après la séparation des Fugees, celle qu’on surnommait L.Boogie lançait The Miseducation Of Lauryn Hill. C’était le 25 août 1998, et j’avais 11 ans.
Cette année-là, je découvrais donc l’album qui allait inspirer ma carrière musicale, inconsciemment bien sûr, et Lauryn allait devenir une figure de proue dans mon parcours. Comme un long fleuve qui raconte sa vie de femme, d’artiste, de mère, The Miseducation of Lauryn Hill m’a bouleversé. De Zion qui d’emblée était ma chanson préférée; un hommage à son aîné sur laquelle Carlos Santana l’accompagne, à Everything is Everything, je n’avais d’oreilles que pour cet album. Ça en était d’ailleurs une obsession, car dès qu’un de ses clips passait à la télé, ma mère criait : « Sarahmée! C’est ta chanteuse à la télé ! » À l’époque, nous habitions toujours Dakar. Évidemment je rappais tous les couplets sans tout comprendre (mon anglais n’était pas si développé) mais l’émotion transcendait la barrière de la langue et je vibrais au rythme de ses beats et ses paroles.
Lost ones. Celle-là je pouvais la rapper dans mon sommeil! Un breakbeat, sa voix, ses punchlines, tout y était pour que je sois sous le charme et devienne une rappeuse en herbe. C’était décidément ma préférée. C’est sûr qu’à l’époque il y a avait toute la controverse avec Wyclef, son label, son nouveau mari (un des fils de Bob Marley), mais tout ça m’était égal. J’aurais défendu Lauryn à la vie, à la mort.
Dans le bassin de rappeuses qu’il y avait à l’époque, j’avais pour une fois un modèle qui me ressemblait, par le teint ébène de sa peau, l’image qu’elle projetait à l’écran et sa féminité pleinement assumée. J’ai pris toute une claque comme on dit.
Tout récemment, j’ai d’ailleurs réécouté tout l’album sans savoir qu’il fêtait ses vingt ans et ce fut comme une révélation. Le message. Chaque chanson de cet album est une expérience décortiquée, une leçon sans prétention posée sans effort avec des mélodies plus belles les unes que les autres et un flow comme il ne se fait plus.
Aujourd’hui je me demande comment, à tout juste vingt-trois ans, a-t-elle pu écrire cet album sans filtre, sans fioritures et nous donner un tel chef d’œuvre? Eh bien croyez-moi, il n’y a que le temps qui définit les classiques. En ce mois d’août 2018, je peux vous assurer que si vous le réécoutez avec des bons écouteurs dehors avec une petite brise d’été et un bon drink en main, vous allez tomber ou retomber en amour avec cet album.