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The Empire Strips Back démarre en force
« Il y a bien longtemps, dans une parodie près de chez vous… », lance en grande pompe le générique défilant dès la levée du rideau, sur un air connu signé John Williams. Spontanément, le public siffle et applaudit dans une salle à la fois comble et surchauffée.
Moins de deux minutes plus tard, une fille se déhanche en petite tenue devant un tauntaun mort de froid, avant de retirer son top pour aller se réchauffer à l’intérieur de l’animal en se pinçant le nez à cause de la puanteur. Ah, et tout ça sur la toune Need You Tonight d’INXS.
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Crédit: Craig Ridgwell
La table est mise, bienvenue au spectacle The Empire Strips Back, une parodie burlesque slash sexu inspirée par l’univers de Star Wars, de passage dans notre système solaire jusqu’au 12 avril prochain.
Toutefois, l’événement cartonne à un point tel que j’ai dû avoir recours à un véritable jedi mind trick pour me faufiler à la première, mercredi dernier, qui se déroulait entre les murs du National sur la rue Sainte-Catherine.
-Désolé, c’est complet. On n’a plus de billets.
-Donne-moi un billet, les gens ont le droit de savoir.
-Voici un billet, les gens ont le droit de savoir.
Mais, comme dirait l’autre, on y va surtout pour le voir, parce que le scénario de la chose est aussi étoffé qu’un film mettant en vedette « la fille de l’UQAM ».
Le spectacle s’adresse surtout aux geeks de Star Wars vu le nombre de clins d’œil aux différents films de la franchise (particulièrement l’épisode 5 qui a inspiré le titre de la parodie), mais risque de plaire à un public un brin averti.
« Ma femme déteste Star Wars, mais adore le show », m’assure justement Neil Gooding, un des producteurs qui accompagne la troupe et dont le jupon dépasse un tantinet. Tout juste avant que la première ne débute, il était au fond de la salle, flanqué de son partenaire David Foster, tous deux visiblement ravis du buzz montréalais. « C’est vraiment la meilleure ville, ici! », lance David Foster, qui jure ne pas répéter la même affaire à chaque endroit.
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David Foster et Neil Gooding, promoteurs du show.
Né en Australie dans une formule cabaret en 2011, le spectacle roule depuis sa bosse aux quatre coins de la galaxie. Après avoir été présenté un peu partout aux États-Unis, il amorce une tournée canadienne après avoir brisé la glace à Toronto.
La troupe se compose presque essentiellement de jeunes danseuses professionnelles. Pour les shows locaux, les promoteurs pigent dans une banque de talents nord-américains, dont quelques artistes ontariens.
Pour pimper la dimension locale, on a confié l’animation de la soirée à l’humoriste québécois Pantelis, qui a déridé la salle dans les deux langues officielles (mais surtout en français, vu la composition de la salle majoritairement francophone).
Voir Leia se défaire le chignon
Bon, revenons au spectacle, qui nous entraîne cette fois sur Tatooine où une fille en costume sexy de Luke Skywalker (oui) lave son landspeeder de la manière la plus caliente possible. Oui, oui, avec une finale de wet t-shirt pis toute.
Décernons d’emblée une médaille de bravoure aux décors, reproductions et costumes, qui justifient à eux seuls le fait de payer pas mal plus qu’un covercharge à un monsieur louche à la porte d’un bar d’effeuilleuses tout aussi louche du boulevard des Laurentides à Laval.
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Crédit: Craig Ridgwell
Par contre, contrairement à un bar d’effeuilleuses, ici, la nudité n’est que partielle et les seins des danseuses sont recouverts de pasties la plupart du temps.
Autre élément qui fonctionne bien : le mariage des scènes cultes de la franchise et de succès pop des 30 dernières années. Le tout rehausse d’un cran l’enthousiasme de la salle, qui prend de véritables airs de party.
Au risque de basculer vers le côté sombre de la force en spoilant le show, difficile de rester stoïque devant la princesse Leia qui se défait le chignon sur Diamond de Rihanna, pendant qu’un RD-2D satisfait lui crache des billets de banque à la fin de son numéro.
Après une chorégraphie lascive de gardiennes impériales sur du Die Antwoord culminant par un flashage de boobs en règle (et les acclamations nourries d’un public conquis), Pantelis revient placoter avec la foule.
Il le fait d’ailleurs à outrance pour donner le temps aux danseuses de se rhabiller et aux techniciens de monter les décors, dont certains semblent plus complexes à monter.
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Crédit: Craig Ridgwell
Les fans de Star Wars, c’est comme les végans, ils DOIVENT te le dire qu’ils aiment ça. La foule participe, s’esclaffe et l’animateur costumé en officier de l’Empire a un sens de la répartie aiguisé, qui fait mouche à plusieurs reprises.
« Quel est votre film préféré de Star Wars, votre personnage favori? »
Le hic, là-dedans, c’est que les gens essaient d’être drôles, avec des réponses frôlant l’hérésie comme « La Menace fantôme » ou « Jar Jar Binks », juste pour le plaisir de troller. Un spectateur aussi agréable qu’un collègue éméché qui essaie d’imiter Jar Jar Binks s’en donnait particulièrement à cœur joie avec de nombreuses interactions tout au long du show, forçant éventuellement Pantelis à l’intégrer dans ses gags, le raillant gentiment au passage.
Au moins, le concours de la meilleure imitation de Chewbacca était assez drôle et a suffi à racheter les 40 000 fois où Pantelis a demandé au public s’il aimait le spectacle jusqu’ici.
Han Solo porte bien son nom
Après une séquence de trémoussage de filles aux body types franchement interchangeables, vient le tour de Han Solo de se shaker le bonbon, au grand bonheur des dames, quand même très bien représentées.
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Crédit: Craig Ridgwell
Mais bon, on est dans le futur et je sais bien que désormais, le torse de Han Solo peut plaire à tous. C’est d’ailleurs le cas, puisque le contrebandier le plus bad ass de la galaxie se fait aller devant la princesse et une sexy Greedo (rendu là) après sa décryogénisation, au rythme de Smooth Criminal.
Le numéro se termine par un fade out sur le cul de Han Solo, en string. La foule a beau être en délire, le personnage d’Han Solo n’a jamais aussi bien porté son nom, étant le seul homme de la troupe (si on exclut Chewbacca).
URBANIA m’a clairement contaminé, mais me semble qu’on pourrait offrir une plus grande diversité de corps et de genre dans un tel spectacle en 2024.
Au moins, le vaillant Han Solo remet ça un peu plus tard avec un numéro de breakdance pas piqué des vers en compagnie d’un Chewbacca salace qui se comporte comme une matante horny au party de Noël.
Sans farce, cette séquence endiablée sur un medley des Spice Girls, des Backstreet Boys et des Beastie Boys a contribué à propulser le niveau de décibels dans la stratosphère
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Crédit: Craig Ridgwell
Après les moves de robot sexy de C-3PO sur Dance Monkey, mais surtout un numéro à gros déploiement dans l’antre de Jabba the Hutt sur une toune complètement gangsta de The Notorious B.I.G., quinze minutes d’entracte étaient nécessaires pour reprendre nos esprits.
Et comme chacun le sait, il n’y a rien comme un peu de misère humaine pour redescendre sur terre, gracieuseté du voisinage du National, loin d’être situé dans le plus beau secteur de l’Île. Toxicos en crise, arrestation policière, engueulades, quêtage de clopes : disons que les fumeurs en ont eu pour leur argent.
Puis, c’est la reprise des hostilités, avec une Boba Fett qui se la joue « Coyote Ugly » au rythme de Welcome to the Jungle.
Pantelis nous revient en force (lol), cette fois avec un accoutrement de pilote rebelle. « Comme un bon Québécois, je me suis séparé de l’Empire », badine-t-il.
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Crédit: Craig Ridgwell
Ensuite, pas le choix d’admettre que la sulfureuse prestation de deux Twi’leks sur une chanson de Garbage constitue le moment le plus susceptible de vous donner une érection. Pas à moi, bien sûr, puisque je suis en couple et que je regardais subtilement des photos de mes enfants sur mon cellulaire pour chasser de mon esprit la gestation de toute forme de scénario impur.
Par contre, si, dans la vie, je pouvais dé-voir quelque chose (à part la naissance de mes enfants), ça serait certainement le numéro suivant, mettant en vedette l’Empereur Palpatine. Puisque j’ai pas tant envie de ressasser ces images dans mon esprit, je vais simplement déposer ici quelques mots-clés : Empereur, zouine en plastique, couille molle, masturbation, Étoile de la mort et Wrecking Ball.
C’t’assez, arrangez-vous avec ça.
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Crédit: Craig Ridgwell
Sans farce, c’est sans contredit le moment fort du spectacle, en termes de réactions dans la salle. Ça et l’adaptation peu subtile de Nookie de Limp Bizkit en Wookie, qui a momentanément transformé la salle en plancher de danse (faire danser le public = pire chose. Oui, je suis mort en dedans).
Après deux heures d’absurdité et de twerkage en slip, le rideau est finalement tombé sur des stormtroopers stripteaseuses, une Darth Vader affriolante et un caméo de Yoda. Dieu merci, on nous a épargné les estifis d’ewoks, chose que Georges Lucas aurait aussi dû faire en écrivant Le Retour du Jedi.
Ne me reste qu’à paraphraser tout croche Anakin/Darth sur son lit de mort pour conclure cette critique :
Si vous voulez vous forger votre propre opinion, pas le choix de vous laisser le regarder avec vos propres yeux.
D’ici là, que la force soit avec vous.