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Thé électoral avec Andrés Fontecilla

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Après avoir savouré une bière dans Parc-Extension en compagnie du candidat libéral Gerry Sklavounos, l’équipe d’Urbania s’est rendue dans Villeray pour poursuivre sa tournée des candidats de Laurier-Dorion.

Cette semaine, c’était au tour du co-porte-parole de Québec solidaire, Andrés Fontecilla, de nous inviter dans un bar de son quartier afin d’assister à un match de soccer.

– « Tu prends un thé marocain? » me demande d’emblée Andrés Fontecilla.

Nous sommes dans un typique houka-bar de la rue St-Hubert tout juste au nord de la rue Jean-Talon. L’endroit, bien que peu enfumé pour le moment, est déjà rempli par une dizaine de clients, tous venus assister à un duel espagnol entre le FC Barcelone et l’Atlético Madrid.

– Un thé marocain? C’est quoi exactement?
– Un thé marocain, c’est un thé marocain, me répond-il du tac au tac pour me taquiner.

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J’acquiesce du même coup et commande deux thés marocains au serveur. La boisson, au final, n’avait rien de très sorcier. C’est du thé, du thé rouge. On se reprendra donc pour l’alcool. Après tout, Andrés a encore bien du monde à rencontrer dans la journée.

Il est d’ailleurs déjà prêt à faire du porte-à-porte. Sérieux, il porte la cravate et le veston et cela même dans un bar qui transpire la détente. Pourtant, un peu à l’image de sa cravate aux teintes orangées, couleur de son parti Québec solidaire, Andrés Fontecilla est jovial et n’hésite pas à plaisanter quand les conversations deviennent plus sérieuses. On le sent confiant et confortable. Sa voix ne semble jamais agacée. C’est à se demander s’il est humain et capable de colère!

– Je vous écoute, mais si ça vous dérange pas, je vais regarder le match en même temps, ajoute-t-il toujours avec un ton moqueur.

Andrés Fontecilla adore le soccer et ne cache pas son parti pris pour l’équipe de Barcelone. Son joueur préféré, l’Argentin Lionel Messi, est l’étoile de ce club. Sans oublier, me dit-il qu’un Chilien, un certain Sanchez, est aussi membre de l’alignement. Son admiration pour le sport n’est pas étrangère à ses origines. Natif du Chili, il s’est établi au Québec avec sa famille à l’âge de 14 ans. Comme bien d’autres Chiliens de l’époque, la famille Fontecilla a quitté le pays sud-américain alors sous la dictature de Pinochet. Sa jeunesse, raconte-t-il, s’est faite sans coup d’éclat. Il était un garçon plutôt discret, mais tout de même batailleur. Dans son quartier de Côte-des-Neiges, il n’était pas rare que de jeunes Québécois et Latino-américains en viennent aux coups pour expliquer leurs différends. Ce n’est qu’en arrivant au cégep qu’il sort de l’ombre. Il tordra dorénavant les langues sales plutôt que les gros bras.

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– C’est là que je me suis vraiment ouvert et intéressé à différents enjeux politiques. J’ai rencontré beaucoup de personnes à l’époque et je me suis même fait des petites amies québécoises, ajoute-t-il toujours en plaisantant.

Les « trois Parizeau »

En 1995, le Québec est à la une des journaux partout autour du monde. La province tient un référendum sur sa souveraineté. Un scrutin auquel Andrés Fontecilla a été plus spectateur que participant. Alors en séjour d’un an en Haïti comme observateur des droits de la personne pour les Nations Unies, il suit du coin de l’œil la soirée référendaire. Une soirée dont il garde un souvenir amer, particulièrement à cause du discours du chef du Parti québécois, Jacques Parizeau. Ce dernier avait alors déclaré que le « OUI » avait perdu à cause de l’argent et du vote ethnique.

– Comme la majorité des immigrants, j’ai été blessé par les propos de Jacques Parizeau. Il venait de nous exclure du projet souverainiste. C’est comme s’il venait nous dire que la souveraineté c’était une affaire de Québécois de souche.

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Une exclusion qui a remis en doute pendant longtemps les valeurs souverainistes du candidat solidaire. Si bien qu’encore aujourd’hui, il n’est pas capable de pardonner cette tache noire au dossier de l’ancien Premier ministre du Québec.

– Il y a trois Jacques Parizeau. Le premier, celui d’avant 95, dont j’admire la franchise et le courage d’avoir tenu un référendum. Celui d’après 95 qui a amené des propos intéressants et nuancés dans le débat. Et finalement celui de 95 qui a pris les immigrants comme tête de Turc.

Et, selon lui, le dernier de ces Jacques Parizeau s’apparente beaucoup au Parti québécois actuel avec sa Charte des valeurs. Un projet qui alimente le sentiment d’exclusion des nouveaux arrivants et les éloigne d’une discussion sur la souveraineté.

D’ailleurs, lorsqu’on lui demande s’il est souverainiste, Andrés Fontecilla n’hésite pas à raconter ses aléas à travers les années avant d’en être venu à adhérer au projet. Tout comme le joueur du FC Barcelone qui prend alors le ballon à l’écran, il raconte avoir dribblé longtemps avec la question sans jamais avoir été en mesure de trouver la bonne trajectoire. Son cheminement comme immigrant souverainiste ne s’est accompli qu’à son arrivée chez Québec solidaire.

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– Pour moi, la souveraineté, ça ne peut se faire qu’avec un projet social pour tous les Québécois.

Malheureusement pour le joueur du FC Barcelone, lui, sa trajectoire n’a amené le ballon qu’à frôler la lucarne. Un tir qui a tout de même épaté la galerie du houka-bar.

La persévérance d’Andrés Fontecilla

Rien n’est acquis dans Laurier-Dorion. Si le candidat libéral Gerry Sklavounos semble avoir transformé la circonscription en un château fort libéral, Andrés Fontecilla croit être celui qui surprendra tout le monde le 7 avril prochain. Pourtant, avant d’y arriver, Andrés devra avant tout amener une majorité d’anciens péquistes de Villeray à changer d’allégeance politique. Un processus qui est long, mais qui commence à fonctionner pour lui.

– C’est la même ostie d’histoire qu’en 2012. Les gens que je rencontre veulent sortir Gerry à tout prix, mais ne savent pas pour qui voter. Pourtant, cette fois-ci, je le sens, à la place de voter pour le Parti québécois, les gens de Laurier-Dorion vont voter pour Québec solidaire.

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La tendance lui donne raison. En 2004, Andrés Fontecilla s’était présenté dans cette même circonscription pour l’Union des forces progressistes, un des ancêtres de Québec solidaire. Il avait alors remporté 4 % des voix. En 2012, il en a récolté 25 %. Il projette maintenant convaincre près du tiers de l’électorat de voter pour lui. Et il n’entend pas s’arrêter là.

Pour remporter la circonscription, il doit faire une percée du côté de Parc-Extension, un arrondissement surtout habité par des familles immigrantes. Pour les convaincre, il promet aux familles une éducation supérieure gratuite et de meilleurs services sociaux.

– Ce n’est pas en promettant des baisses d’impôts comme le Parti libéral que nous allons améliorer la situation financière des familles immigrantes. Ces familles bien souvent ne font même pas assez d’argent pour avoir de l’impôt à payer, affirme le candidat avec fermeté.

Du coup, on le remarque rapidement : les questions sociales comme l’équité salariale et l’aide aux chômeurs sont des thèmes qui soulèvent bien plus la passion d’Andrés Fontecilla que ceux de la souveraineté et de l’identité. Le candidat en perd même de vue la partie qui se joue devant lui. Il ne devrait pourtant pas.

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Pour la première fois de la partie, son équipe, le FC Barcelone parvient à marquer. Ce but leur permet de niveler la marque. C’est maintenant 1-1. Un score qui nous gardera sur la faim puisque le prochain match entre les deux équipes n’aura lieu qu’au lendemain des élections. D’ici là, il est permis à tous de rêver. Pour Andrés Fontecilla, c’est une question de persévérance. Il veut la victoire. Si ce n’est pas pour cette fois-ci, ça le sera certainement la prochaine fois.

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