Logo

Sylvio Le Blanc, roi du courrier des lecteurs

Version intégrale

Par
Judith Lussier
Publicité

Maintenant retraité de la fonction publique, ce champion des lettres ouvertes peut nous faire part de ses réserves quant au devoir de réserve.

Pourquoi votre employeur vous a-t-il suspendu à la suite d’un courrier des lecteurs?

Au printemps 2003, le projet de réingénierie du gouvernement libéral de Jean Charest m’inquiétait. Avant de le voir sabrer à l’aveuglette dans les ministères, notamment aux Pensions alimentaires (PA), je me suis dit qu’il serait préférable de faire des suggestions. En juin 2003, j’ai donc exposé de façon détaillée dans une lettre [1] que le gouvernement pourrait faire des économies aux PA sans que les familles n’en souffrent vraiment. Elle m’a valu deux journées de suspension sans solde. On a prétendu que j’avais manqué à mon devoir de réserve de fonctionnaire. Or, 12 ans plus tard, rien ne m’empêche de faire des suggestions semblables comme fonctionnaire sur le site web de la Commission de révision permanente des programmes. Comprenne qui pourra!

Publicité

Y a-t-il une raison pour laquelle vous avez choisi un pseudonyme féminin?

Oui. Durant la même période, une collègue de couleur est venue me voir pour que je l’aide à écrire une lettre sur les politiques d’embauche aux PA. Je l’ai assistée et nous avons fait parvenir la lettre aux journaux, mais pas question de la signer de son nom, vue ma déconvenue toute récente. Un pseudonyme fut trouvé : Élisa Milan, et une adresse courriel créée. Ce pseudo m’a donné l’idée de l’utiliser après coup pour mon usage personnel. L’adresse et le no de téléphone fournis, parce qu’exigés, étaient ceux où je travaillais, en espérant que les responsables du courrier des lecteurs comprennent la situation si une vérification était faite.

Combien de lettres avez-vous signées de chacun des noms?

Environ 1600 de mes lettres ont été publiées sous mon nom et environ 25 sous celui d’Élisa Milan (dont neuf dans «Métro»). Lorsque la lettre que je me propose d’expédier aux journaux n’a aucun rapport avec mon emploi, je la signe bien entendu de mon nom, mais lorsque la lettre est liée à mon travail ou à mon employeur (la direction des PA, qui relèvent de Revenu Québec), je la signe de mon pseudonyme. Chat échaudé craint l’eau froide.

Publicité

Quels ont été les impacts de vos lettres signées Élisa Milan? Quel a été votre meilleur coup?

La lettre qui a créé la plus grosse commotion est la première, qui n’était pas de moi, mais de ma collègue de couleur. À titre indicatif, nous donnions des noms d’employés dans des notes de bas de page, étant certains que les journaux ne publieraient pas ces renseignements délicats. Erreur! La Cyberpresse les publia. Ayoye! Pour la direction, il fallait coûte que coûte trouver cette soi-disant Élisa Milan, inconnue au bataillon. Des collègues inquiets furent en conséquence interrogés par un enquêteur [Frank Peter Lach] : “À qui avez-vous confié les détails de votre vie personnelle? Avez-vous des soupçons? Etc.” [2] Bien entendu, les projecteurs étaient braqués sur moi, le mouton noir.

La lettre qui a eu le plus d’impact pour la clientèle des PA est celle touchant au remboursement de la TVQ (ou CIS) aux débiteurs. Avant, les agents ne pouvaient l’accaparer que lorsque le dossier était en voie de fermeture; les créancières perdaient ainsi de l’argent. Quand ma lettre est sortie, cela s’est mis à bouger. Pourquoi? Parce que l’enjeu devenait politique (les ministres n’aiment pas mal paraître dans les médias).

Publicité

Une autre a fait son effet : “Cordonnier mal chaussé“. Depuis que les PA existent, celles-ci n’émettent pas de relevé d’impôt relatif aux revenus d’intérêts versés aux débiteurs (ces intérêts proviennent de la sûreté que doivent constituer ceux-ci en cas de défaut de paiement de la pension alimentaire), ce qui est ahurissant, considérant que cette direction relève de RQ, qui perçoit taxes et impôts. Ce sont parfois de belles sommes! Pensez au fameux milliardaire dont il faut garder l’anonymat, mais que tout le monde a identifié.

Ma lettre intitulée “Des cadres ratoureux” démonte un ingénieux stratagème des PA pour faire obtenir à certains cadres une augmentation de salaire supérieure à celle consentie aux autres commis de l’État. Le syndicat n’a même pas été capable d’afficher la page du journal sur son babillard; les patrons visés l’enlevaient à chaque fois qu’elle réapparaissait.

Publicité

Influence Communication a mesuré que vous aviez en moyenne trois lettres par semaine publiées dans les journaux.

Il fut une période, en effet, où j’ai eu en moyenne trois lettres publiées par semaine (155 dans une année) dans les 12 quotidiens du Québec. Cela dit, IC a aussi répandu des faussetés. Je n’en ferais pas tout un plat si elles n’avaient pas été reprises dans un numéro de Trente, la bible des journalistes du Québec : “Statistique amusante : Sylvio Le Blanc a représenté à lui seul plus du quart de tout le courrier publié dans Métro pendant la dernière année. Un éditorialiste bénévole, quoi!” Or, il appert que le nombre total de lettres publiées dans le courrier des lecteurs de Métro durant la période couverte par IC, soit du 1er mai 2008 au 30 avril 2009, s’élève en réalité à 486 et non 136, tel que recensé par Jean-François Dumas, le patron d’IC. Comme 36 de mes lettres y ont été publiées durant cette période, cela représente 7% du total et non 27%, comme l’a affirmé M. Dumas à l’émission radiophonique de Benoît Dutrizac, sur l’air de celui qui n’en revient pas[3]. Quand les radios-poubelles ont reçu le communiqué de presse de M. Dumas intitulé : “Existe-t-il un ‘‘Star System’’ au sein du courrier du lecteur québécois?”, elles en ont conclu avec jubilation que le courrier des lecteurs des quotidiens était noyauté par les souverainistes, les socialistes et les syndicalistes. Il valait mieux en rire qu’en pleurer. Les radios-poubelles s’abreuvent aux quotidiens pour informer leurs auditeurs, mais ne se gênent pas pour vomir dessus ensuite. M. Dumas a aussi écrit que j’avais eu ma première lettre publiée en 2006. En réalité, 171 de mes lettres avaient déjà été publiées avant cette année-là. Conclusion, méfiez-vous des statistiques d’IC.

Publicité

J’ai tapé mon nom aujourd’hui dans Eureka.cc et il a obtenu 97 résultats pour les 12 derniers mois[4], alors que celui d’Henri Marineau, un résidant de Québec, prolifique “courriériste”, en a obtenu… 421. Alors, qu’on me lâche un peu les baskets. En 2004, l’Indienne Madhu Agrawal a fait publier 447 lettres dans 30 journaux indiens; elle détient le record Guinness en cette matière.

Qu’est-ce qui vous motive à écrire et où trouvez-vous le temps?

Publicité

Quand les gens ont une bonne idée, ils ont le goût de la partager avec autrui. C’est pareil pour les “courriéristes”. J’aime écrire des textes et cela me fait un petit velours que des milliers de lecteurs les lisent. Je suis trop paresseux pour écrire des livres, mais des lettres, ça va. Je les ponds généralement en marchant et quand j’arrive devant mon ordi, il ne me reste plus qu’à les “coucher sur mon écran” et à les peaufiner. La majorité de mes lettres ne me prennent pas beaucoup de temps, généralement 30 minutes, mais certaines, oui. Ainsi, ma lettre de 1600 mots sur Chaplin m’a pris un mois.

Qu’est-ce qui fait qu’on vous publie, selon vous?

Je vous donne d’abord la politique de La Presse à ce sujet : “Nous donnons priorité aux textes reliés à l’actualité et aux témoignages, aux textes courts, bien écrits, pertinents et originaux.” Je pense qu’en général mes lettres sont reliées à l’actualité, courtes, bien écrites, pertinentes et originales. Voilà pourquoi on les publie. Bien entendu, la politique éditoriale a son importance. Mes lettres nationalistes ont plus de chances d’être publiées dans Le Devoir que dans La Presse, par exemple.

Publicité

Y a-t-il des journaux qui vous ont barré? Avez-vous des préférés?

Métro m’a peut-être barré, car cela fait six mois qu’il ne m’a pas publié. Pouvez-vous aller aux nouvelles? Il m’arrive d’être publié par The Gazette, moi le nationaliste à tous crins. Le plus souvent, on y publie mes lettres en français, mais parfois, on les traduit en anglais. Quelques-unes de mes lettres ont aussi été traduites en espagnol, à Cuba. En 2005, j’ai obtenu un prix pour une lettre publiée en France dans le journal L’Est Républicain.

Aussi étonnant que cela paraisse, la seule publication qui m’ait offert de l’argent pour l’une de mes lettres est une revue polonaise de langue française. J’ai décliné l’offre et ai plutôt demandé à me faire parvenir la revue en question. Mes préférés? Être publié par Le Monde, en France, c’est quelque chose. C’est le plus prestigieux journal francophone qui soit. Une dizaine de mes lettres y ont paru.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui aimerait que sa lettre soit publiée?

Publicité

Il faut avoir une idée originale et la creuser. Je conseille aux jeunes de ne pas se presser à expédier leur lettre, de dormir dessus et de la retravailler. Cent fois sur le métier… Mais pour écrire, j’estime qu’il faut d’abord lire. Le “courriérisme” est un excellent exercice pour qui veut devenir journaliste. Prenez Alexandre Shields, journaliste en environnement au Devoir, c’est d’abord avec ses lettres qu’il a pris du métier. Mon “courriériste” favori est Pascal Barrette, un résidant d’Ottawa. Ses lettres sont toutes de petits chefs-d’œuvre de concision et de pertinence.

Maintenant que vous prenez votre retraite comme fonctionnaire, prendrez-vous aussi votre retraite comme commentateur?

Non, je compte au contraire écrire un peu plus de lettres maintenant. Et que le gouvernement libéral de Philippe Couillard se le tienne pour dit! RIP pour Élisa Milan, à moins qu’un autre fonctionnaire la ressuscite. S’il y avait une Élisa Milan dans chacun des organismes gouvernementaux, je vous garantis que les ministres, les sous-ministres, les hauts fonctionnaires et les directeurs marcheraient les fesses serrées.

Publicité

NDLR: Les réponses de M. Sylvio Le Blanc comportaient plusieurs notes et renvois. Dans la plupart des cas, nous avons réussi à retrouver les textes originaux auxquels M. Le Blanc fait référence quelque part en ligne et avons remplacé les renvois par des liens dans le texte, mais plusieurs de ses lettres ne sont pas accessibles en ligne. Nous reproduisons ici les annexes que M. Le Blanc avait joint à ses réponses, encore une fois avec le texte intégral lorsqu’il est impossible de trouver les lettres publiées sur les médias originaux.

er

Annexe

Lettres pertinentes publiées dans les journaux et hebdos

************************************************************************

Publicité

5000 occasionnels mis à la porte

Lettre parue dans «Le Soleil», Opinions, le samedi 15 juillet 2000, p. A 19.

Le 21 juin dernier, l’Association des jeunes de la fonction publique (AJFP) déposait une série de plaintes devant la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse pour contester l’inclusion de clauses « orphelin » dans les conventions collectives intervenues depuis le début de l’année entre le gouvernement et les divers syndicats de la fonction publique. Des clauses qui seraient porteuses d’une discrimination basée sur l’âge, occasionnant l’exclusion des jeunes de la fonction publique.

Il faut savoir que le gouvernement et les syndicats se sont entendus sur le principe suivant: tout emploi dans la fonction publique, occasionnel ou régulier, sera dorénavant comblé par voie de concours. En guise de mesures provisoires visant le personnel occasionnel déjà à l’emploi, trois ententes distinctes ont été conclues afin, soi-disant, de solutionner le problème des « faux occasionnels » (des occasionnels qui occupent en réalité des emplois réguliers). La première va permettre aux occasionnels ayant travaillé 55 mois sur une période de 60 mois de devenir réguliers après une évaluation positive de leur dossier. La deuxième, en gros, va permettre aux occasionnels ayant travaillé 12 mois sur une période de 15 mois de participer à des concours réservés visant des emplois réguliers et occasionnels. Finalement, la troisième entente concerne les occasionnels nouvellement embauchés qui ne rencontrent pas les précédents critères d’admissibilité et qui feront en conséquence l’objet d’une cessation définitive d’emploi.

Orphelins de leur emploi

Publicité

C’est cette dernière entente qui a soulevé avec raison l’ire de l’AJFP. Mais je me questionne: l’AJFP a-t-elle choisi la bonne voie pour la contester? Selon le Conseil du trésor, les jeunes de moins de 35 ans ne formeraient que 20 % de ces quelque 5000 occasionnels bientôt orphelins de leur emploi. Si ces chiffres s’avèrent exacts, c’est donc dire que l’âge ne constitue pas une donnée significative. Mais que l’AJFP ait raison ou non, comment s’y prendront les 35 ans et plus pour contester leur inique congédiement? Une chose est sûre, ils ne devront compter que sur eux-mêmes pour mener à bien les éventuels recours, car les syndicats supposés être là pour les défendre ont agréé aux ententes (c’est à nous faire espérer le maraudage).

On se demande bien quelle folie s’est emparée du Conseil du trésor de saigner ainsi la fonction publique de 5000 de ses employés. S’est-il à ce point fourvoyé en les sélectionnant par le mode de l’entrevue? N’a-t-il pas eu du temps pour les évaluer? Les cas de patronage et de favoritisme ont-ils été à ce point nombreux?

Publicité

Il n’y a que dans la fonction publique qu’on peut être témoin de telles aberrations. Aucune organisation émanant du secteur privé – que plusieurs estiment pourtant moins équitable que celui public – ne se serait ainsi départie d’une partie de ses forces vives. On aurait cru qu’après le départ en 1997 de plus de 30 000 de ses employés, le gouvernement aurait appris de ses erreurs et se serait montré plus circonspect (tout dernièrement encore, le ministère de l’Environnement liquidait une équipe de professionnels expérimentés de 16 personnes œuvrant à Montréal). C’était douter de la capacité du Conseil du trésor à se tirer dans les pattes.

S’il existait une instance habilitée à recevoir des plaintes pour bêtise manifeste, c’est devant elle qu’il faudrait à coup sûr plaider. Le fonctionnaire Kafka aurait tiré un bon livre de cette invraisemblable affaire. Un autre « Procès » dans lequel Jacques Léonard, président du Conseil du trésor, viendrait défendre sa cause: « Votre Honneur, il est vrai que ces occasionnels ont coûteusement été formés, qu’ils ont bien servi la population qui les a rétribués, et que plusieurs même ont été positivement évalués, mais, que voulez-vous, ils n’avaient pas les douze mois requis pour participer aux concours réservés. La preuve était faite: ils n’avaient pas leur place parmi nous. Veuillez en conséquence confirmer les congédiements. » Normalement, un employeur met fin au contrat de l’un de ses employés du fait de son incompétence, d’un manque de travail ou parce que les affaires vont mal, bref pour un motif sensé. Mais là…

Publicité

Quant aux occasionnels qui participeront aux concours réservés, voilà le discours kafkaïen que leur réserve M. Léonard: « Bien que vous ayez œuvré dans la fonction publique pendant 12, 54 mois, et été évalués positivement dans les six ou douze mois, nous voulons néanmoins nous rassurer sur vos aptitudes à faire vos tâches en vous faisant subir un concours. »

Sérieusement, est-il normal qu’un occasionnel ayant quatre ans de service, deux belles fiches de notation en poche, soit obligé de concourir pour garder son emploi? Et se retrouver à la porte au lendemain d’un concours raté? Ce ratage prouve-t-il la non-valeur de l’employé? Je pense à l’auxiliaire de bureau s’occupant des photocopies, et qui, subitement, retourne sur un banc d’école pour passer un concours. Il sait que s’il ne le réussit pas, le chômage l’attend (ce qui me fait dire qu’on a oublié l’élément humain, car, à n’en pas douter, les occasionnels vont subir un stress « contre-performant » dans l’attente des résultats).

Publicité

Combien d’occasionnels vont échouer aux concours réservés et s’en retourner chez eux, Gros-Jean comme devant? Vingt-cinq, cinquante pour cent? À l’instar de l’AJFP, j’espère qu’ils envisageront des recours devant les tribunaux compétents. Le cas échéant, j’imagine la plaidoirie kafkaïenne de M. Léonard: « Votre Honneur, on s’est aperçu après 54 mois qu’il était temps d’évaluer le rendement de cet occasionnel, et, pour ce faire, nous lui avons demandé de passer un examen. Malheureusement, il a échoué. La preuve était faite: il n’avait pas sa place parmi nous. Veuillez en conséquence confirmer le congédiement. »

La rumeur veut que les concours réservés soient allégés ou adaptés. En 1998, les agents des services correctionnels occasionnels ont dû, pour rester en poste et devenir réguliers, subir un tel concours allégé. Le concours était à ce point allégé que tous l’ont réussi (quelques-uns seulement ont échoué à l’examen médical). Si les concours réservés aux fonctionnaires occasionnels sont de la même eau, il y a une raison de plus pour condamner le procédé, pour la très simple raison qu’un concours doit mettre « en compétition des candidats, pour un nombre de places fixé d’avance », et non être bidon. Les Québécois auraient alors toutes les raisons de dénoncer cette mascarade.

Publicité

Il est bon de savoir que plusieurs occasionnels ont déjà tenté de devenir réguliers en participant à des concours de recrutement, mais sans succès. Ils sont donc restés occasionnels, mais néanmoins convaincus qu’un concours écrit ne pouvait pas tout mesurer; qu’une entrevue, assortie d’une mise à l’épreuve sur le terrain, pouvait tout aussi bien faire l’affaire, sinon plus (sont-elles si nombreuses, ces organisations qui misent sur les concours pour sélectionner leur personnel?).

Le Conseil du trésor voudrait faire payer aux occasionnels les conséquences de leurs propres erreurs. Car il s’est lui-même mis dans le pétrin en faisant occuper en nombre toujours croissant depuis les années 70 ses emplois réguliers par des faux occasionnels, créant ainsi des situations aberrantes comme aux Pensions alimentaires à Montréal où 90 % des quelque 325 personnes y œuvrant sont occasionnelles, et où, du fait de la précarité de l’emploi, le taux de roulement est très élevé (quatre par mois: imaginez les coûts en formation des nouveaux employés). Si M. Léonard s’en tenait à sa définition de l’emploi occasionnel, peut-être ne sentirait-il plus le besoin de le pourvoir par voie de concours: « Les emplois occasionnels ont une durée limitée. Ils pallient un manque provisoire de personnel en raison, par exemple, d’un surcroît temporaire de travail, de l’absence d’une personne occupant un emploi régulier, ou encore, sont créés pour un projet spécifique. » Pourquoi lancer de coûteux concours dans ces cas?

En conclusion, si le Conseil du trésor tient à changer les règles du jeu en cours de route vis-à-vis des occasionnels, que ce ne soit pas à leur détriment. Il faut laisser tomber les congédiements bêtes et iniques, les concours réservés, allégés ou non, et en venir à un compromis du type de celui visant les 55 mois. Par exemple: « Tous les occasionnels en emploi sont maintenus en place durant toute la durée de leur contrat »; et encore: « Tous les occasionnels ayant travaillé six mois dans le même emploi sont réputés avoir réussi le concours réservé et demeurent en poste, puis sont nommés par ancienneté dans des emplois réguliers lorsque se présentent des postes vacants »; et encore: « Tous les occasionnels ayant travaillé 24 mois dans le même emploi sont réputés permanents ».

S’il faut pour cela en venir à de nouvelles ententes avec les syndicats, que ça se fasse (je ne crains pas les difficultés de ce côté)! S’il faut amender la Loi sur la fonction publique et modifier le Règlement sur la tenue de concours pour y arriver, eh bien! que cela se fasse aussi. Et si le Conseil du trésor s’en tient dorénavant à sa définition de l’emploi occasionnel, il ne lui sera pas nécessaire de lancer des concours pour le pourvoir.

Pour finir, je rappelle à M. Léonard son propre catéchisme: « Placer la personne au centre des préoccupations de notre organisation, c’est reconnaître son importance, la mettre à contribution dans toute la vie de l’organisation et investir dans son développement. C’est pourquoi nous traitons les personnes avec respect (…). »

Sylvio Le Blanc, fonctionnaire occasionnel, Montréal, le 5 juillet 2000

************************************************************************

Cynisme gouvernemental

Lettre parue dans «Le Devoir», Idées, le lundi 7 mai 2001, p. A 7.

Le gouvernement québécois fait preuve de cynisme en annonçant à grand renfort de publicité l’embauche prochaine de 6 500 personnes alors qu’il s’apprête à montrer la porte à 5 500 de ses employés occasionnels. En effet, les 4 000 occasionnels qui n’ont pu participer aux concours réservés du fait qu’ils n’avaient pas accumulé un an de service au 31 mars 2000 et les 1 500 autres qui n’ont pu réussir lesdits concours, verront leur contrat se terminer dans les six mois. Si le Conseil du trésor était un employeur comme un autre, on peut se demander s’il survivrait à la perte du dixième de ses employés (imaginez l’expérience perdue et les coûts en formation des nouveaux). Manifestement, le gouvernement n’a pas appris de ses erreurs de 1997.

Et pour quelles raisons le gouvernement agit-il ainsi? Pour rajeunir la fonction publique? Sûrement pas, car, parmi les 5 500 infortunés se trouve beaucoup de jeunes. Pourquoi, alors? En fait, le gouvernement n’a jamais pu répondre à cette question de manière convaincante. Qu’on ne vienne pas me dire qu’il est nécessaire de réussir un concours pour accéder à un poste permanent dans la fonction publique, car les occasionnels qui avaient 55 mois de service au 31 mars 2000 ont prouvé le contraire, et avant cela déjà le Conseil du trésor a pourvu des postes permanents sans concours.

Il fallait voir la semaine dernière les conséquences dramatiques du procédé gouvernemental. Une collègue de travail embauchée en mars 1996 s’est évanouie en apprenant la nouvelle de son échec et n’a pu se présenter au travail depuis. Un autre collègue, qui va compter sous peu cinq ans de service, a manqué deux jours de travail puis s’est présenté finalement, la mine déconfite, humilié d’être ainsi traité. Que s’est-il passé le jour de l’examen? Peut-être étaient-ils trop nerveux, sachant qu’ils jouaient leur va-tout. Allez savoir. Ces deux collègues ont fait leurs preuves pourtant; ils sont appréciés, autant par leur gestionnaire que par leur clientèle. Mais le satané concours a “démontré” qu’ils étaient incompétents. Je vous laisse imaginer dans quelles conditions ils effectueront leurs derniers six mois.

Se pourrait-il qu’il n’existe pas un juge, un tribunal, je ne sais quoi, qui vienne dire au gouvernement que ce licenciement massif est illégal? Les victimes vont-elles pouvoir compter sur les divers syndicats de la fonction publique pour se défendre? C’est loin d’être assuré, vu qu’ils ont agréé au procédé. À propos, j’ai bien hâte d’assister au maraudage de cet automne; je ne pense pas qu’un syndicat comme la CSN aurait accepté qu’on exclue ainsi 5 500 de ses membres en criant lapin.

Sylvio Le Blanc, fonctionnaire occasionnel, le 29 avril 2001

************************************************************************

Un président rassembleur

Discours lu au XXe Congrès du Syndicat de la fonction publique du Québec, tenu à Québec du 11 au 16 mars 2002.

Chers congressistes, le 31 mars prochain, deux collègues à moi, deux femmes, vont perdre leur emploi après plus de cinq ans de service, consécutivement à un échec au concours réservé. Je ne dois pas être le seul à avoir vu la détresse dans les yeux des infortunés du SFPQ. Un dirigeant ici présent, un bon ami à moi, a vu sa conjointe en rejoindre le cortège, et le syndicat n’a pas levé le petit doigt pour elle. Je le dis sans ambages: voilà un Exécutif à l’époque qui a manqué de courage, qui aurait dû lancer au Conseil du trésor: «Il n’est pas question qu’on embarque dans votre satané projet. On est là pour défendre tous nos membres, sans exception». Cette triste affaire est un déshonorant épisode de l’histoire récente du SFPQ, et elle a terni sa réputation. Qu’on se le dise: un Exécutif national digne de ce nom ne permettra plus dorénavant qu’une telle situation se produise. Je suis fier malgré tout de dire ici que la section 220 à laquelle j’appartiens a été la seule section à voter contre la dernière convention collective.

Chers congressistes, plus que jamais nous avons besoin d’un président rassembleur, d’un président qui mettra fin à la rivalité rétrograde Montréal-Québec, qui renoncera au repli du syndicat sur lui-même et incitera au contraire à l’ouverture, un président qui montera aux barricades lorsque nécessaire. Nous avons besoin d’un président qui suscitera la fierté des membres, un président de qui nous boirons les paroles.

Nous voulons un président qui, devant les médias, ira, par exemple, défendre les employés de la SAAQ lorsque leur réputation est mise à rude épreuve. Un président qui mobilisera les membres en faisant autre chose que de leur poster de piètres caricatures de nos hommes politiques. Un président qui ira dire en 2003 au Conseil du trésor que les fonctionnaires n’ont pas à parler l’anglais au Québec à moins qu’ils ne soient rétribués en conséquence. Un président qui refusera qu’on réserve un traitement de faveur à ses pairs au sein de l’Exécutif, qui s’objectera à toute prime consentie en catimini. Un président intègre, qui n’aura qu’une idée en tête: les intérêts supérieurs des membres. Un président qui refusera qu’on filme à leur insu les membres à moins qu’ils n’attaquent au lance-flamme le siège social du SFPQ. Un président qui travaillera à ce qu’il y ait une plus nette démarcation entre le politique et l’administratif, qui refusera qu’on nomme des gestionnaires à même le bassin des permanents. Un président qui contiendra le pouvoir grandissant de ces derniers, qui n’ont pas à vivre comme des pachas sur le dos des membres qu’ils défendent, surtout en période de déficit. Un président finalement qui fera procéder aux nominations à l’interne avec le maximum de transparence, qui fera appliquer vraiment la «Politique sur la dotation des postes» du SFPQ. Finie l’époque du «copains comme cochons».

Chers congressistes, élisons des candidats qui ont une communauté d’intérêts, ne recréons pas la situation du Congrès 99. Choisissons-les avec soin car il faut être unis pour préparer la prochaine convention collective, avec les membres derrière pour développer un rapport de force viable. Et, en cette ère où les capitalistes ne jurent que par la mondialisation, élisons une équipe qui fera sa part pour la stopper en nous rapprochant d’un grand syndicat. Finalement, élisons une équipe qui forcera notre admiration.

Chers congressistes, vous détenez le pouvoir mais les rênes vous ont glissé d’entre les mains. Il est plus que temps de les reprendre.

Sylvio Le Blanc, candidat à la présidence générale du SFPQ, le 11 mars 2002

************************************************************************

Salaire équitable

Lettre parue dans «Voir Montréal», Courrier, le jeudi 16 mai 2002, p. 5.

Je salue la détermination de Andrew George, ce jeune homme qui vient de gagner une première manche avec sa victoire au Tribunal administratif du travail (NDLR: il a obtenu le financement lui permettant de lancer un recours collectif contre le gouvernement québécois, afin qu’il offre aux employés étudiants le même salaire qu’aux employés occasionnels).

Je salue aussi son courage, car il fait figure de David contre Goliath, et sait que sa carrière dans la fonction publique est dorénavant compromise (on imagine que les ministères ne se bousculeront plus au portillon pour l’embaucher).

Je conçois sa surprise à la réception de son premier chèque de paie à titre d’occasionnel à la… Commission des normes du travail. Pour le même travail, voir son salaire doubler pour le seul motif qu’il y a eu un changement de statut, ç’a dû être surprenant. (…)

  1. Facal, le nouveau président du Conseil du trésor, qu’on dit homme de principe, va-t-il intervenir? Je l’espère mais j’en doute.

L’affaire Andrew George fait réfléchir. Pourquoi le Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ) n’a-t-il rien fait depuis des années pour aider les étudiants à améliorer leur sort? S’il dit la vérité, il vous répondra qu’il n’a rien à retirer de leur avancement (les étudiants ne sont pas couverts par la convention collective). Cela donne une idée de la valeur de ce syndicat corporatiste qui, sur le dos des membres, traite comme des pachas ses propres employés permanents (qui touchent souvent le double de leur salaire de fonctionnaire) et qui en laisse «mcdonaldeliser» d’autres. Il n’y pas de quoi être fier de notre syndicat.

Je souhaite tout le succès du monde à Andrew George et à tous nos collègues de travail ayant le statut d’étudiant, car sa cause juste est la leur.

Sylvio Le Blanc, fonctionnaire et membre du SFPQ, le 8 mai 2002

************************************************************************

************************************************************************

Extraits d’un article de Michel Hébert paru dans «Le Journal de Québec», le vendredi 27 septembre 2002, p. 4.

La Commission des droits de la personne et la Commission de la fonction publique du Québec sont d’ailleurs penchées sur des plaintes de discrimination faites par des fonctionnaires. «Le fond de l’histoire, c’est que le syndicat s’est fait avoir. Il croyait que ce serait des concours «bidon» et que tout le monde aurait un emploi permanent», affirme Sylvio Le Blanc, délégué syndical.

Les syndicats sont embêtés par cette histoire qui risque de rebondir devant les tribunaux. (…)

************************************************************************

Chaises musicales et poudre aux yeux

Lettre parue dans «Ici», Courrier, le jeudi 21 novembre 2002, p. 5.

Ces jours-ci, le ministre d’État aux Ressources humaines et au Travail, Jean Rochon, fait parler de lui du fait de la bonification sursise de la Loi sur les normes du travail. Mais quelqu’un s’est-il déjà demandé ce que faisait M. Rochon au Travail? Quand on lit sa biographie, on se rend compte que sa carrière a été exclusivement orientée du côté de la santé publique […]. Et c’est justement pourquoi Jacques Parizeau l’a nommé ministre de la Santé et des Services sociaux en 1994, où il a d’ailleurs fait un travail titanesque. Mais à la suite des élections de 1998, Lucien Bouchard le destitue et le nomme ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Pourquoi? […] Et des ministres comme Rémy Trudel, François Legault, Agnès Maltais, Serge Ménard et André Boisclair connaissent, ou ont connu, des situations semblables […].

On me rétorquera que les élus sont des personnes polyvalentes, que les sous-ministres, eux, sont les véritables professionnels, et qu’ils restent en place. Peut-être. Mais je prétends tout de même qu’on n’utilise pas au mieux les talents des députés au sein du gouvernement péquiste, et que les affectations semblent trop souvent obéir non pas à des canons d’efficacité, mais plutôt à de basses considérations d’ordre électoraliste. Et dire que M. Bernard Landry songe à un remaniement ministériel avant les élections…

Est-il trop demandé que de bénéficier des meilleurs ministres au sein de ce gouvernement, en utilisant au mieux les compétences pour lesquelles ils ont fait le saut en politique? Peut-on espérer un jour associer longuement un ministère donné à un ministre donné, pour un peu de stabilité, et de manière à permettre à chacun des ministres l’acquisition de connaissances sensibles et approfondies dans les dossiers pris en charge? Cela ne ferait qu’accroître leur crédibilité, et, partant, à long terme, celle du gouvernement.

Mais, en politique, le long terme est-il vraiment pris en compte?

Sylvio Le Blanc, Montréal, le 13 novembre 2002

************************************************************************

Bienvenue aux fonctionnaires de la Ville

Lettre parue dans «Ici», Courrier, le jeudi 16 janvier 2003, p. 5.

Je comprends tout à fait les fonctionnaires municipaux affectés aux services à l’aide sociale de la Ville de Montréal d’appréhender leur éventuelle intégration dans la fonction publique provinciale. Ils y perdraient (c’est bien connu, les fonctionnaires municipaux – en particulier ceux de la Ville de Montréal – sont les employés les mieux rémunérés du Québec, alors que les fonctionnaires provinciaux se situent à peu près dans la moyenne). Leur appréhension, je présume, est loin d’être atténuée par l’élection possible au gouvernement de Mario Dumont qui jure d’en découdre avec les fonctionnaires provinciaux.

Prenant acte de l’intention manifeste et déterminée du gouvernement, moi qui suis militant du Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ), je tends la main au millier de fonctionnaires de la ville de Montréal qui viendraient nous rejoindre. Avec la renégociation prochaine de notre convention collective, nous avons grandement besoin au SFPQ de syndiqués combatifs qui viennent solidairement revendiquer auprès du gouvernement des avantages sociaux et des traitements de salaire avantageux, secouer la léthargie de nos dirigeants syndicaux qui, dès lors que les mots «grève» ou «moyens de pression» sont ouïs, se mettent à trembloter, contribuer à redonner aux membres le contrôle de leur syndicat (un exemple: les quatre administrateurs du siège social du SFPQ à Québec ont refusé le printemps dernier de montrer leur contrat de travail au nouveau président général, imaginez!), en d’autres mots, concourir à nettoyer les écuries d’Augias.

Cette affaire, qui ne fait que commencer, a le mérite au moins d’illustrer le fait que les fonctionnaires provinciaux ne sont pas les employés privilégiés que l’on pense.

Sylvio Le Blanc, délégué du SFPQ, Montréal, le 12 janvier 2003

Lettre aussi parue dans «Cyberpresse» et «Métro (Montréal)», avec des variantes.

************************************************************************

Pensions alimentaires

Lettre parue dans «Ici», Courrier, le jeudi 12 juin 2003, p. 5.

Jean Charest semble déterminé à faire économiser de l’argent à l’État, en le révisant (!) et en effectuant des compressions dans tous les ministères – sauf la Santé et l’Éducation –, tout en épargnant les moins favorisés. J’ai des suggestions à faire pour limiter les dégâts. Au ministère du Revenu (pensions alimentaires), le gouvernement pourrait faire des économies sans que les familles n’en souffrent vraiment. Pour cela, il faudrait amender la Loi 60 (loi facilitant le paiement des pensions alimentaires).

Présentement, en vertu de l’article 2, le débiteur doit verser la pension alimentaire au ministère du Revenu pour le bénéfice de la créancière (95 % des créanciers alimentaires sont des femmes). Avec pour conséquence qu’un grand nombre de dossiers dans lesquels le débiteur paie bien sont pris inutilement en charge par l’État. Et les parties doivent obtenir du tribunal une exemption pour sortir le gouvernement de leurs affaires et se payer entre elles, ce qui est contraire au bon sens. En clair, il faudrait amender l’article 2 et requérir du débiteur qu’il verse directement à la créancière (sauf exception, comme dans les cas de violence conjugale).

Il devrait être aussi entendu que le débiteur qui verse par lui-même la pension alimentaire n’ait pas à constituer une sûreté (l’équivalent d’un mois de pension alimentaire en réserve). La loi l’a prévue en cas de défaut de paiement, ce qui insinue la défiance et le doute. Cela fait penser au locateur qui exige un mois de loyer d’avance, au cas où. Faisons d’emblée confiance aux débiteurs. Si donc la sûreté n’est plus exigible, beaucoup moins de dossiers seront créés aux Pensions alimentaires.

Le gouvernement n’interviendrait donc qu’en dernier ressort, qu’en cas de défaut de paiement du débiteur. Voilà le cœur du changement proposé.

En pareil cas, en plus de la pension alimentaire, vu que le lien de confiance aurait été brisé, une sûreté serait immédiatement exigée du mauvais payeur (qu’il travaille ou pas), au cas où. Et, bien entendu, il n’y aurait aucune avance consentie à la créancière (ces avances sont un véritable gouffre financier: environ trois millions de dollars actuellement – dont combien irrécupérables? –, et, fait à noter, nous sommes le seul gouvernement au monde à en consentir).

En outre, il devrait être exigé des employeurs qu’ils versent immédiatement aux Pensions alimentaires les sommes retenues sur le chèque de paie du débiteur (il est scandaleux qu’un employeur puisse légalement attendre jusqu’à un mois et demi pour remettre une pension alimentaire), et par le moyen le plus rapide à sa disposition (par voie électronique, par exemple), cela afin que la créancière reçoive sa pension le plus rapidement possible.

Il pourrait être aussi prévu qu’après une certaine période de paiements réguliers aux Pensions alimentaires (disons, deux années), et dans certaines conditions, le débiteur puisse à nouveau verser par lui-même la pension alimentaire à la créancière, et que sa sûreté lui soit retournée. Ainsi, le dossier serait fermé. Et le débiteur se souviendrait que, s’il fait à nouveau défaut de payer, le dossier serait à nouveau pris en charge par l’État et qu’une sûreté serait à nouveau… exigée.

Je vois d’ici le nouveau tableau: de bons payeurs soulagés financièrement, responsabilisés et heureux qu’on ait placé en eux notre confiance; de mauvais payeurs et des créancières qui ne voient pour ainsi dire pas de différences d’avec l’ancien régime. Des employeurs comblés, car moins sollicités (mais, en revanche, invités à remettre la pension alimentaire plus vite). Un gouvernement qui n’intervient dans la vie des gens que lorsque nécessaire, et qui économise. Un ministre du Revenu qui n’en perd plus son latin ou son français devant la Vérificatrice générale. En prime, des fonctionnaires qui travaillent là où ça compte et qui stressent moins (c’est incroyable le temps qu’on nous fait perdre en tracasseries administratives et informatiques).

Certains en voudront au militant syndical que je suis de faire de telles suggestions. Que puis-je y faire? Pour moi, le Québec passe en premier.

Sylvio Le Blanc, fonctionnaire aux Pensions alimentaires, Montréal, le 10 juin 2003

Lettre aussi parue dans «Métro (Montréal)» et «Voir Montréal», avec des variantes.

**************************************

Risqué, le courrier des lecteurs?

Interview parue dans «Ici», Société, le jeudi 3 juillet 2003, p. 6. Illustration (photo de Sylvio Le Blanc).

Un employé du gouvernement a-t-il le droit de faire publier à titre personnel une lettre d’opinion dans le courrier des lecteurs d’un journal? C’est la question qu’on se pose quand on discute avec le technicien à la Direction de la perception des pensions alimentaires Sylvio Le Blanc. Le fonctionnaire dénonçait dans une lettre publiée dans nos pages, le 12 juin dernier, l’intention du gouvernement Charest de réduire les dépenses dans presque tous les postes budgétaires, et, du coup, faisait quelques commentaires sur l’application de la loi 60 (sur la perception des pensions alimentaires), qui pourrait selon lui être améliorée. Résultat: Le Blanc a été suspendu deux jours sans solde pour avoir «manqué à son obligation de loyauté envers son employeur et au devoir de réserve auquel doit s’astreindre tout fonctionnaire de l’État». «De mon point de vue, je n’ai jamais été déloyal envers le gouvernement ni n’ai outrepassé mon devoir de réserve. Et j’ai toujours défendu la loi 60. Mais, comme citoyen, je pense que j’ai droit d’exprimer mon opinion. Et puis, je n’ai pas signé «à titre» de fonctionnaire. J’ai ajouté “fonctionnaire” pour préciser que j’en connais un bout sur le sujet. Je m’occupe tout de même de 400 dossiers!». Le fonctionnaire jongle actuellement avec l’idée de déposer un grief. Histoire à suivre. (Esther Pilon)

**************************************

Une lettre de trop…

Article de Gilbert Leduc paru dans «Le Soleil», Le Québec le Canada, le samedi 5 juillet 2003, p. A 11.

Un fonctionnaire est suspendu pour avoir critiqué publiquement la perception des pensions alimentaires

Fait rarissime dans le monde discret des fonctionnaires. Un technicien en administration de la Direction de la perception des pensions alimentaires du ministère du Revenu a écopé, les 26 et 27 juin, de deux journées de suspension sans salaire à la suite de la publication d’une lettre dans un hebdomadaire montréalais, dans laquelle il suggère des pistes pour amender la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires, afin de faire économiser des sous à l’État.

Un habitué des tribunes

Le nom de Sylvio Le Blanc est sans doute familier pour les lecteurs assidus des journaux québécois. Il ne s’écoule rarement une semaine sans qu’un billet de M. Le Blanc ne soit publié dans les pages des lecteurs du SOLEIL, de La Presse, du Devoir ou de Voir.

Le Blanc a des opinions sur une foule de sujets et il ne se fait pas prier pour les faire connaître. Dans les dernières semaines, il s’est prononcé sur les noms donnés par les fabricants d’automobiles à leur produit, la féminisation des appellations des organisations québécoises de tout acabit, la malbouffe chez les jeunes, l’« anglophilie » des cinéastes européens, Raël et le mauvais doublage québécois des films étrangers.

Il n’est pas rare que Sylvio Le Blanc signe ses lettres en ajoutant à son nom : « fonctionnaire aux Pensions alimentaires ». Dans une lettre vilipendant le Conseil du Trésor sur la procédure de tenue de concours réservés pour les faux occasionnels de la fonction publique, en juillet 2000, il signait « Sylvio Le Blanc, fonctionnaire occasionnel ».

Au mois de juin dernier, M. Le Blanc reprenait la plume pour faire des suggestions au premier ministre, Jean Charest, sur des façons de faire économiser de l’argent à l’État. « Pour limiter les dégâts », ironisait-il, en faisant référence aux compressions prévues et annoncées par le nouveau gouvernement dans les ministères autres que ceux de la Santé et de l’Éducation.

Sa lettre a été publiée par l’hebdomadaire montréalais Ici dans son édition du 12 au 18 juin et, en partie, par Voir.

Il proposait d’amender la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires pour mettre fin, entre autres, à l’obligation du débiteur de constituer une réserve pour assurer le paiement des pensions et à la procédure qui oblige le débiteur à verser la pension au ministère du Revenu plutôt que directement à la créancière. « Faisons confiance aux débiteurs », écrivait-il en signalant « qu’un grand nombre de dossiers dans lesquels le débiteur paie bien sont pris inutilement en charge par l’État ».

Dans les jours suivants la publication de sa lettre, le technicien est informé qu’il écopera d’une suspension sans traitement de deux jours.

« Vos propos, signés à titre de fonctionnaire aux pensions alimentaires, ont été publiés sans l’autorisation préalable du ministère », lui reproche-t-on dans une note de service. « Ce faisant, vous avez notamment manqué à votre obligation de loyauté envers votre employeur et au devoir de réserve auquel doit s’astreindre tout fonctionnaire de l’État, conformément à la Loi sur la fonction publique, à son règlement et aux directives du ministère du Revenu. »

Le Blanc, qui avait écopé en 2002 de mesures disciplinaires pour des motifs autres que la publication d’une opinion dans un média, est estomaqué par la décision de son employeur. Il compte bien déposer un grief pour contester la suspension.

« Ce n’est pourtant pas la première fois que je donne mon opinion sur les pensions alimentaires dans les journaux et que je m’identifie comme fonctionnaire », a-t-il précisé au SOLEIL, en signalant qu’à titre de fonctionnaire, il s’était toujours fait un devoir d’assurer l’application de la loi sur les pensions alimentaires. « Le courrier des lecteurs des journaux est un espace où l’on peut s’exprimer librement. C’est ce que j’ai fait en tant que citoyen. »

Cas rares

Les cas de mesures disciplinaires imposées à des fonctionnaires pour des écarts au devoir de réserve sont rares.

« Le dernier que j’ai en tête remonte à 1983 », indique la présidente du Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ), Carole Roberge, en signalant que le Règlement sur l’éthique et la discipline dans la fonction publique est, de façon générale, scrupuleusement respecté. Ce règlement stipule, entre autres, que le fonctionnaire qui se propose de publier un texte sur des questions portant sur les activités de son ministère doit préalablement obtenir le feu vert de son sous-ministre.

Au Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ), on rapporte un cas particulier qui s’est passé en février dernier, alors qu’un préposé aux renseignements du ministère du Revenu a appelé dans un quotidien pour apporter ses commentaires sur l’affaire des fabricants de médicaments génériques qui offrent des cadeaux aux pharmaciens propriétaires. L’identité du fonctionnaire ne devait pas être dévoilée, mais à la suite d’un malentendu entre les journalistes, son nom a été publié dans le journal.

Il a été suspendu cinq jours sans salaire. Son cas est devant un arbitre de griefs.

Article aussi paru dans «Cyberpresse», avec des variantes.

**************************************

Censure dans la fonction publique

Lettre parue dans «Cyberpresse», La boîte aux lettres, du 30 août au 3 septembre 2003.

Depuis le 26 juin, les substituts du procureur général du Québec doivent, avant de répondre à une demande d’entrevue des médias, en informer le sous-ministre adjoint de Justice Québec et l’attaché de presse du ministre. Ce même 26 juin, mais aussi le 27, un fonctionnaire de Revenu Québec, Sylvio Le Blanc, était suspendu sans salaire pour avoir écrit une lettre aux journaux dans laquelle il appelait essentiellement à amender la loi 60 (Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires).

Depuis leur récente prise du pouvoir, les libéraux auraient-ils la volonté de museler les fonctionnaires? Si c’est le cas, les Québécois ont de quoi s’inquiéter.

Avant, on faisait confiance aux substituts du procureur et on permettait aux fonctionnaires de s’exprimer sur des questions d’ordre public. Ainsi, dans les journaux, M. Le Blanc a-t-il pu critiquer allègrement la vaste opération qu’ont constitué les concours réservés aux faux occasionnels, agréés par les syndicats (en passant, la Commission de la fonction publique les pourfendait récemment et invitait le gouvernement à refaire ses devoirs: les lettres aux journaux des occasionnels auraient-elles aidé la CFP dans leur réflexion?). Sur cette affaire précise, M. Le Blanc a même pu donner une entrevue au Journal de Québec sans être embêté. En un autre moment, il a salué la détermination d’Andrew George, ce jeune homme qui avait obtenu le financement lui permettant de lancer un recours collectif contre le gouvernement québécois, pour qu’il offre aux employés étudiants le même salaire qu’aux autres employés. Sur la question de la langue de travail, il a dénoncé le jeu de l’autruche auquel se prête le gouvernement, qui consiste à demander à ses fonctionnaires de parler l’anglais sans que ne leur soit versée une prime en contrepartie, bien que nous soyons en terre française. Enfin, il a critiqué les multiples remaniements ministériels patentés par le gouvernement et le fait que des ministres n’étaient pas toujours placés là où ils pouvaient être les plus utiles. (Il faut ici préciser que dans certaines de ces lettres, bien qu’écrites en son nom personnel, M. Le Blanc s’est identifié comme fonctionnaire, comme cela est courant dans le «Courrier des lecteurs».)

Les fameux devoir de réserve et obligation de loyauté inscrits dans la Loi sur la fonction publique, antérieurs à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, ne s’apparenteraient-ils pas plutôt chez les libéraux à de la censure? Qu’en est-il de la loyauté de ceux-ci et de l’État envers la population? Un fonctionnaire est-il loyal envers les citoyens qui le paient en laissant perdurer une situation qu’il estime incohérente?

L’interdiction faite aux fonctionnaires de s’exprimer publiquement sur des questions d’ordre public, fait voile à la bénéfique et salutaire transparence qui doit avoir cours dans toute société démocratique évoluée, va à contre-courant du principe d’accès à l’information (dont on parle beaucoup depuis une vingtaine d’années, et qui a grandement évolué), et, finalement, prive les Québécois de points de vue étayés sur les affaires publiques et la gestion de l’État.

À l’instar des ministères qui permettent dans leurs murs l’affichage d’avis syndicaux contestant leurs politiques, l’expression publique de points de vue divergents de fonctionnaires devrait être de même permise? Les médias n’auraient qu’à juger de la pertinence des opinions soumises pour la société.

Pour finir, je réclame, à titre de contribuable et de bénéficiaire de services publics, l’abrogation des articles de loi, règlements et directives limitant la liberté d’expression des fonctionnaires. Faisons-la progresser, et, avec elle, la démocratie!

Guy Rivest, Saint-Bruno-de-Montarville

Lettre aussi parue dans «Métro (Montréal)», avec des variantes.

************************************************************************

La chasse aux sorcières

Lettre parue dans «ICI», Courrier, le jeudi 16 octobre 2003, p. 5.

Ma lettre concernant l’embauche dans la fonction publique provinciale (et aux Pensions alimentaires, plus particulièrement), parue intégralement dans la Cyberpresse du 13 au 18 septembre, et en partie dans l’hebdo ICI du 18 septembre, a fait monter aux barricades les autorités de Revenu Québec.

Depuis deux semaines, un enquêteur du ministère […] va et vient aux deux étages des Pensions alimentaires à Montréal pour colliger et analyser les informations menant à la prise au collet du «coupable». Placide, il a convoqué et questionné plusieurs personnes à ce jour, créant un climat de suspicion et de peur chez l’ensemble du personnel. Voilà le genre de questions posées aux personnes nommées dans la lettre: À qui avez-vous confié les détails de votre vie personnelle? de votre curriculum vitae? Avez-vous des soupçons? des idées? Cela fleure bon la délation. […]

Des représentants des communautés culturelles – particulièrement ceux qui ont été floués dans l’obtention de postes – sont parfois regardés de travers. Certains semblent vouloir leur faire payer ce qui n’est le fait que d’une seule personne (qui n’a, en passant, à payer de rien).

Misère! On se croirait revenus au temps de l’inique chasse aux sorcières du sénateur McCarthy, de triste mémoire. La direction des Pensions alimentaires ne devrait pas être fière de son coup. Et je pense qu’elle sait pertinemment qu’elle ne pincera pas le «coupable», mais cette peur qu’elle instille chez le personnel – dont on veut qu’il marche les fesses serrées – va lui être profitable au bout du compte (d’autant que les négociations avec les syndicats, pour le renouvellement des conventions collectives, ont commencé depuis peu).

Pour ne rien arranger, appréhendant la «réingénierie» annoncée par le gouvernement Charest et les coupures de postes qui lui feront cortège vraisemblablement, les occasionnels (25 % des employés, et j’en suis) ont peur de perdre leur emploi d’ici au 31 mars 2004. Bref, c’est l’enfer aux Pensions alimentaires!

Élisa Milan, Montréal

************************************************************************

Québec et le “whistleblowing”: Les fonctionnaires doivent parler

Article de Gilbert Leduc paru dans «Le Soleil», Zoom, le samedi 6 mars 2004, p. D2.

Pour la présidente du Conseil du trésor et ministre responsable de l’Administration gouvernementale, Monique Jérôme-Forget, “les fonctionnaires ont l’obligation de dénoncer les irrégularités” commises au sein de l’appareil étatique et ils n’ont pas besoin d’une législation les mettant à l’abri de représailles pour le faire.

“Moi, si je faisais quelque chose d’irrégulier ou de malhonnête, je m’attendrais à ce que mes fonctionnaires en informent le sous-ministre et que ce dernier avertisse le secrétaire général du Conseil exécutif du gouvernement”, a déclaré Mme Jérôme-Forget au cours d’une entrevue accordée au SOLEIL.

D’abord ébranlé par l’affaire Radwanski et ensuite secoué par le scandale des commandites, qui apporte, quotidiennement, son lot de rebondissements, le gouvernement fédéral s’affaire à préparer un projet de loi qui assurera une protection aux fonctionnaires désireux de dénoncer des actes fautifs.

Le président du Conseil privé, Denis Coderre, a promis la présentation du projet de loi d’ici la fin du mois de mars.

Monique Jérôme-Forget a indiqué au SOLEIL qu’il n’était pas dans les plans du gouvernement du Québec d’imiter le fédéral et d’initier une réflexion sur un éventuel encadrement législatif favorisant le whistleblowing. “Je crois plutôt qu’il faut essayer de transmettre à nos employés un code d’éthique sans faille.”

C’est d’ailleurs la voie empruntée par le gouvernement du Québec, qui, il y a maintenant un peu plus de deux ans, a mis sur pied un réseau de répondants dans chacun des ministères et organismes pour conseiller les fonctionnaires sur les questions relatives à l’éthique et pour mener des activités de sensibilisation.

Monique Jérôme-Forget reconnaît que les fonctionnaires québécois sont soumis à une obligation de discrétion. “Ils ont aussi l’obligation de dénoncer les irrégularités et de sonner la cloche s’ils constatent des façons de faire qui ne sont pas acceptables au plan de l’éthique comme le versement de pots-de-vin ou des fraudes.”

Si les employés de l’État n’osent pas dénoncer les gestes fautifs, c’est bien souvent parce qu’ils craignent les représailles. À cet égard, Mme Jérôme-Forget a répliqué que les fonctionnaires devraient se “sentir à l’aise” de rapporter les cas irréguliers.

Elle a rappelé qu’à un moment donné dans sa carrière, elle a dû aller voir son patron pour lui dire qu’il faisait des choses qui n’étaient pas régulières. “Je peux vous dire que je n’étais pas très à l’aise de le faire, mais je l’ai fait. Il fallait que je le fasse.”

Et elle a ajouté qu’elle n’hésiterait pas à aller cogner à la porte du premier ministre s’il y avait une situation similaire le concernant. “Même si le premier ministre est impliqué (dans une affaire irrégulière), il faut sonner la cloche.”

À titre de ministre responsable de l’Administration gouvernementale, Monique Jérôme-Forget admet qu’elle s’est posé mille et une questions en regardant ce qui se passait à Ottawa et en relevant tous les constats faits par la vérificatrice générale, Sheila Fraser.

“Est-ce que tout ça pourrait arriver chez nous ? Mes fonctionnaires m’ont rassurée en me disant qu’il y avait beaucoup de contrôles qui empêchaient de telles situations.”

Il y a toutefois un élément qui tracasse la présidente du Conseil du trésor et c’est l’indépendance des comités de vérification interne des ministères et organismes. Ces comités voient à la bonne gestion des ressources au sein de chaque entité gouvernementale. Ils relèvent de la plus haute autorité des ministères et organismes.

“Des vérificateurs internes qui se rapportent aux sous-ministres, ce n’est pas suffisamment rigoureux. À mon avis, il y a là un conflit d’intérêts”, a avoué Mme Jérôme-Forget, qui planche avec ses fonctionnaires sur diverses solutions de rechange.

Pour le député péquiste de Richelieu, Sylvain Simard, le moment est venu d’ouvrir la porte au devoir de divulgation et d’établir un régime de protection pour les fonctionnaires qui dénoncent des actes illégaux et des pratiques administratives douteuses.

Les remparts que peuvent constituer, par exemple, le vérificateur général, ne suffisent pas à détecter les écarts de conduite. “Qu’un dirigeant comme George Radwanski (l’ancien commissaire à la vie privée) réussisse à semer la terreur pendant près de deux ans en adoptant des pratiques totalement illégales sans que personne n’ose bouger, c’est la preuve qu’il y a un problème”, a indiqué l’ancien président du Conseil du trésor dans le gouvernement de Bernard Landry.

“Sous le sceau du secret, évidemment, on me raconte toutes sortes d’histoires sur des firmes externes qui recevraient jusqu’à 25 000 $ pour participer, pendant quelques heures seulement, à des séances de remue-méninges avec des hauts dirigeants. Des fonctionnaires en sont scandalisés, mais la loi du silence est d’une telle étanchéité qu’ils préfèrent se taire. À juste titre, ils craignent que, s’ils disent quelque chose, ça va se retourner contre eux.”

Au SOLEIL, Sylvain Simard a cité en exemple un récent point de presse au cours duquel il a révélé une partie de l’étendue des compressions budgétaires qui seraient effectuées à la direction de la perception des pensions alimentaires au ministère du Revenu.

“Les gens mouraient de trouille de nous refiler les informations. Dans les jours suivant nos révélations, nos informateurs nous suppliaient de protéger leur identité.”

L’Action démocratique du Québec veut, elle aussi, que le gouvernement facilite le recours au whistleblowing.

“Pour assurer une saine gestion des deniers publics, les fonctionnaires doivent être les yeux et les oreilles des citoyens au sein de l’appareil gouvernemental. Il faut les laisser dénoncer les actes fautifs”, a fait observer le député adéquiste de Chutes-de-la-Chaudière, Marc Picard.

QUELQUES CAS RÉCENTS DE “WHISTLEBLOWERS”

Les administrations publiques sont intraitables à l’égard des fonctionnaires soupçonnés d’avoir outrepassé leur devoir de discrétion.

– Septembre 1991. LE SOLEIL lève le voile sur la destruction, par le ministère des Forêts, de 3,5 millions de plants d’épinette dont il n’a plus besoin pour le reboisement. Soupçonnant l’un de ses employés d’être à la source de la fuite, le ministère lui impose des mesures disciplinaires.

– Avril 1993. Outré par la décision du ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles de diminuer le nombre d’heures d’apprentissage du français pour les nouveaux arrivants, Yvon Comeau, un enseignant dans un Centre d’orientation et de formation des immigrants, dénonce la situation dans une lettre publiée dans «Le Devoir». Le lendemain, il accorde une entrevue à la radio sans obtenir, au préalable, le consentement de son employeur. Il est suspendu, sans salaire, pendant 10 jours.

– Juillet 1994. Le ministère de l’Environnement et de la Faune impose trois jours de suspension à Robert Moisan, un contremaître œuvrant dans la réserve faunique de Portneuf. Son employeur lui reproche d’avoir fait fi de “ses devoirs d’obéissance hiérarchique, de discrétion et de réserve” en communiquant au SOLEIL, selon la version du ministère, des informations concernant un “massacre” causé par Hydro-Québec et ses sous-traitants dans la réserve de Portneuf dans le cadre de travaux.

– Février 1997. Dénonçant, dans LE SOLEIL, la surpopulation dans les prisons et l’obligation pour les administrations carcérales de “sortir des gens dont on sait qu’ils n’ont pas abandonné leur intention de récidive ou celle de poursuivre leur carrière criminelle”, le directeur du Centre de détention de Québec, Richard Pelletier, est sommé par le ministère de la Sécurité publique de ne plus parler aux médias. Il appert que le ministère voulait congédier M. Pelletier. Une intervention de l’Association des administrateurs de centres de détention lui aurait permis de conserver son poste. Un an plus tard, il était muté à d’autres fonctions au ministère.

– Février 2003. Comme d’autres lecteurs de La Presse, Michel Tessier donne son opinion sur une manchette du journal rapportant que les fabricants de médicaments offraient des centaines de millions de dollars par année en primes, rabais et ristournes aux pharmaciens. Il demande au gouvernement de “s’attaquer aux bonzes de l’industrie qui ont violé les lois”. À la suite d’un malentendu, La Presse publie le nom et la fonction de M. Tessier : il est agent de renseignements au ministère du Revenu. Il écope d’une suspension sans salaire de cinq jours.

– Juin 2003. Technicien en administration à la direction de la perception des pensions alimentaires du ministère du Revenu, Sylvio Le Blanc est suspendu deux jours sans salaire pour avoir émis son opinion, sans l’autorisation préalable de son employeur, dans les hebdomadaires Ici et Voir sur des façons, pour le gouvernement de Jean Charest, d’économiser des deniers publics dans le programme de perception des pensions alimentaires.

– Décembre 2003. La Régie de l’assurance maladie du Québec congédie un de ses employés accusé d’avoir transmis à un journaliste de La Presse des informations tirées du fichier d’inscription des personnes assurées.

– Février 2004. Le ministère de l’Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille suspend deux de ses fonctionnaires, les avocates Viviane Dagenais et Monique Harrison, qui ont témoigné à une commission parlementaire de l’Assemblée nationale pour demander un amendement au projet de loi sur la justice administrative afin que ce soit des juristes et non pas des fonctionnaires qui plaident les clauses du ministère devant les tribunaux administratifs.

– À Ottawa, deux fonctionnaires au ministère des Affaires étrangères, Brian McAdam et Robert Read, ont subi les foudres de leur employeur après avoir mis en lumière, au début des années 90, les manigances de la mafia chinoise auprès des autorités canadiennes pour permettre l’entrée au Canada de criminels asiatiques.

– Des scientifiques de Santé Canada ont été sanctionnés après qu’ils eurent allégué que les dirigeants du ministère exerçaient des pressions sur eux pour qu’ils approuvent des médicaments vétérinaires malgré l’absence des données requises par la Loi sur les aliments et drogues et la réglementation relative aux hormones de croissance.

************************************************************************

La révision des pensions alimentaires

Lettre parue dans «Le Journal de Montréal», Votre opinion, Courrier, La parole à nos lecteurs, le vendredi 24 mars 2006, p. 26.

Le gouvernement envisage de ne plus obliger les parents séparés à s’adresser aux tribunaux pour revoir à la baisse ou à la hausse le montant de la pension alimentaire. Voilà une bonne idée. Car il est malheureux de voir un débiteur ayant perdu son emploi devoir enclencher des démarches (toujours trop) coûteuses auprès d’un avocat pour faire diminuer sa pension alimentaire, tout en continuant à la verser intégralement comme avant jusqu’à ce que jugement soit rendu.

Mais là où ça se gâte, c’est quand le gouvernement envisage d’exiger que les deux ex-conjoints consentent à une telle révision administrative pour qu’elle se concrétise. À combien estime-t-on le pourcentage de ceux qui vont consentir tout bonnement à une révision quand ils savent d’avance que ça va se traduire par une perte d’argent ? Dans nombre de cas, inévitablement, l’un fera pression sur l’autre pour obtenir le consentement, ce qui générera des tensions, qui se répercuteront éventuellement sur les enfants. S’il n’y a pas consentement, ce sera pire. Si le double consentement est obligatoire, les révisions administratives se feront au compte-gouttes, ce qui n’est pas l’objectif visé. Il faut donc laisser tomber cette exigence.

Concrètement, le gouvernement pense demander aux fonctionnaires de Justice Québec d’effectuer les révisions. C’est une erreur. Dès l’entrée en vigueur de la loi 60, la gestion des pensions alimentaires est passée de Justice Québec à Revenu Québec (afin de faciliter la récupération des sommes dues auprès des mauvais payeurs). Puisque les juges n’auront pas à intervenir, pourquoi ne pas permettre aux fonctionnaires de Revenu Québec d’effectuer eux-mêmes les révisions ? Les Pensions alimentaires possèdent déjà un service juridique et nombre de ses employés ont une formation juridique. Ce serait beaucoup plus efficace de tout retrouver sous le même toit.

Renseignements personnels

Le gouvernement jongle aussi avec l’idée d’obliger les parties à échanger chaque année les renseignements sur leurs finances personnelles (divulgation automatique qui existe dans d’autres provinces canadiennes). Voilà encore en perspective des tensions inutiles entre les parties. Comme les Pensions alimentaires relèvent de Revenu Québec, où se font les impôts, comme on le sait, pourquoi ne pas plutôt permettre à ses fonctionnaires de fournir annuellement sur demande les états de finances personnelles à l’autre partie ? Ce serait si simple.

Faciliter l’exemption

Je suggère au gouvernement d’aller plus loin encore en facilitant l’obtention de l’exemption (qui consiste à ce que les parties s’entendent pour que le débiteur verse la pension alimentaire directement au créancier sans l’intermédiaire des Pensions alimentaires), qui est indiquée pour des ex qui s’entendent bien et pour un gouvernement qui veut économiser. Actuellement, il faut que les parties se présentent en cour pour faire homologuer leur entente en exemption, en déboursant un montant d’argent. Je pense que les fonctionnaires des Pensions alimentaires pourraient s’acquitter gratuitement de cette tâche, si on apporte les changements législatifs nécessaires.

Finalement, le gouvernement devrait exiger des employeurs qu’ils remettent immédiatement aux Pensions alimentaires les sommes retenues sur le chèque de paie du débiteur. Il est inacceptable qu’on puisse légalement attendre jusqu’à un mois et demi pour remettre une pension alimentaire. Et il faudra bien un jour régler une fois pour toute le problème avec les employeurs récalcitrants qui refusent de remettre à échéance, certains ne se gênant pas pour remettre à tous les deux ou trois mois. Encore aujourd’hui, ils ne sont pas embêtés sérieusement. Et qui en souffre ?

Élisa Milan, Montréal

************************************************************************

«Rattrapage solidaire»

Lettre parue dans «Le Journal de Québec», Votre opinion, le mardi 2 mai 2006, p. 12.

Les députés à l’Assemblée nationale voulaient s’octroyer une majoration de leurs revenus de 13,3 % sur quatre ans, arguant qu’un «rattrapage» était nécessaire. Heureusement, ils s’en sont tenus à ce que les libéraux avaient imposé aux employés de l’État. N’en demeure pas moins que l’argument du «rattrapage» surprend, car si on compare les revenus des députés avec ceux de leurs collègues des autres provinces canadiennes, ils se situent au deuxième rang. Aspirent-ils à rattraper leurs collègues trônant au premier rang alors que le Québec ne l’occupe pas comme province canadienne par sa richesse partagée (ni le deuxième rang, d’ailleurs)?

En revanche, si on compare les revenus des employés de l’État québécois avec ceux de leurs vis-à-vis des autres provinces, ils se situent au quatrième rang. Ne serait-il pas légitime pour ceux-là de vouloir remonter au même rang que les députés québécois à l’échelle canadienne? Mais si le Conseil du Trésor s’y oppose, comme cela est à craindre, ne serait-il pas envisageable autrement de demander aux députés de rejoindre volontairement les employés au quatrième rang, par solidarité? Du rattrapage à l’envers, en quelque sorte, ou «rattrapage solidaire».

Cela dit, les dirigeants élus du Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ) m’ont bien fait rire en protestant haut et fort contre le 13,3 %. Eux-mêmes avaient tenté en 2004 de s’octroyer une majoration salariale (heureusement rejetée par les dirigeants locaux) dépassant celle réclamée pour leurs membres. Eux aussi avaient argué qu’un rattrapage était nécessaire.

Élisa Milan

************************************************************************

Un manque de volonté, lettre parue dans «Le Devoir», Éditorial, Lettres, le mercredi 19 juillet 2006, p. A 6.

************************************************************************

Une petite laine, peut-être?

Lettre parue dans «Cyberpresse», Carrefour des lecteurs, le vendredi 23 janvier 2009.

La semaine dernière, les fonctionnaires provinciaux ont reçu un courriel en provenance de la Société immobilière du Québec (SIQ), dont voici des extraits: «Hydro-Québec sollicite notre coopération afin de les aider à réduire la demande électrique importante prévue pour faire face à la vague de froid exceptionnelle que nous connaissons. Voici quelques suggestions: éteindre vos ordinateurs, écrans et tout autre équipement électrique avant de quitter vos bureaux; utiliser l’éclairage minimal requis pour votre travail et éteindre les lumières des locaux inoccupés; fermer les tentures ou stores sur toutes les surfaces non ensoleillées et sur toutes les surfaces au départ le soir.»

Je trouve la démarche de la SIQ tout à fait pertinente, mais ces suggestions ne devraient-elles pas un jour prochain se transmuter en obligations? Et pourquoi seulement quand il fait froid? Pourquoi pas à l’année longue?

Combien de fois ai-je vu des bureaux laissés pour la fin de semaine avec l’ordinateur ouvert et la lampe allumée? Il m’est parfois arrivé de laisser un petit mot: «Tu avais oublié d’éteindre ta lampe…» Rien à faire. Combien de fois ai-je entendu des fonctionnaires se plaindre du froid auprès de leur gestionnaire alors que la température ambiante était tout à fait acceptable et qu’il ne leur aurait fallu qu’un chandail ou une petite laine pour régler le problème.

Terrible cette insouciance, comme s’il n’y avait aucune conséquence. Et pendant ce temps la Terre vacille sur son socle. Il faut se réveiller une bonne fois pour toutes, avant qu’il ne soit trop tard.

Élisa Milan, Montréal

Lettre aussi parue dans «Le Journal de Montréal», Votre opinion, Le courrier, le mardi 20 janvier 2008, p. 24, avec des variantes.

************************************************************************

Le fiscal et le social, lettre parue dans «Le Devoir», Éditorial, Lettres, les samedi 21 et dimanche 22 août 2010, p. C 4.

************************************************************************

Que craint le gouvernement?, lettre parue dans «Le Soleil», Opinion, Vos réactions, le samedi 28 août 2010, p. 38. aussi parue dans «Métro» (Montréal), Opinions, Courrier des lecteurs, le vendredi 27 août 2010, p. 14

************************************************************************

Bachand dans le champ?, Lettre parue dans «Le Devoir», Éditorial, Lettres, le vendredi 15 octobre 2010, p. A 8.

Lettre aussi parue dans «La Presse» et «Métro (Montréal)», avec des variantes.

************************************************************************

Ça promet, lettre parue dans «Le Soleil», Opinion, Commentaire, le samedi 23 octobre 2010, p. 50.

************************************************************************

Lettre parue dans «La Presse», Forum, À bien y penser, le jeudi 9 décembre 2010, p. A 39.

Maintenant que l’Agence du revenu du Canada a épinglé des compagnies de Tony Accurso, qu’attend Revenu Québec pour prendre sa part du gâteau? Le premier ministre Jean Charest ne veut pas de commission d’enquête sur l’industrie de la construction, mais il pourrait en profiter quand la manne passe. Le nouveau ministre du Revenu, Raymond Bachand, doit intervenir. C’est incroyable, cet attentisme des libéraux.

Élisa Milan, Montréal

************************************************************************

Que fait Revenu Québec?

Lettre parue dans «Le Soleil», Carrefour des lecteurs, le vendredi 10 décembre 2010, p. 27.

L’Agence du revenu du Canada a créé il y a un an une unité spéciale d’une vingtaine de personnes pour traquer les fraudeurs dans la construction au Québec, et cela a porté fruit, comme on vient de le voir avec des compagnies d’Antonio (Tony) Accurso épinglées. Et qu’a fait Revenu Québec pendant ce temps-là? Rien, pour ainsi dire. Il y a anguille sous roche.

Élisa Milan, Montréal

Lettre aussi parue dans «Le Journal de Québec», avec des variantes.

************************************************************************

L’anglais, langue officielle

Lettre parue dans «Le Journal de Québec», Votre opinion, Vos commentaires, le mercredi 12 janvier 2011, p. 17.

De nouveau cette année, les Pensions alimentaires de Montréal, qui relèvent de Revenu Québec, offriront des cours d’anglais à leurs employés. En plus de la formation sur le lieu du travail, les fonctionnaires sélectionnés devront consacrer une demi-heure d’étude par semaine à la maison.

Aux Pensions alimentaires, l’ensemble des agents sont tenus de parler l’anglais même si seulement 7,5 % de la clientèle requiert de le parler (225 550 relevés de compte seront envoyés prochainement à la clientèle, dont 16 950 seulement en anglais). Est-ce normal dans une province où la seule langue officielle est le français?

Comme l’anglais est entré à demeure au Québec, il faut peut-être demander à un certain nombre de fonctionnaires de le parler, mais certainement pas à tous. Et comme cette langue n’est pas une connaissance de base au Québec, il faut verser une prime aux fonctionnaires bilingues.

Ne trouvez-vous pas curieux que les libéraux et les péquistes s’entendent comme larrons en foire sur cette question? Pour satisfaire leurs électeurs anglophones et allophones, les libéraux ne pouvaient espérer meilleure politique linguistique que celle actuelle dans la fonction publique. Mais comment expliquer que les péquistes, de leur côté, l’aient toujours tolérée… hypocritement?

Élisa Milan

************************************************************************

Convaincre ou contraindre ?, lettre parue dans «Le Devoir», Éditorial, Lettres, le mercredi 9 mars 2011, p. A 8.

************************************************************************

La révision des pensions alimentaires, lettre parue dans «Le Devoir», Éditorial, Lettres, le lundi 5 décembre 2011, p. A 6.

************************************************************************

Harper et les enfants, Lettre parue dans «Métro (Montréal)», Opinions, Courrier des lecteurs, le lundi 11 juin 2012, p. 17.

************************************************************************

Compenser les créancières lésées, lettre parue dans «Le Journal de Montréal» (Votre opinion, le lundi 9 juillet 2012, p. 23) et «Le Journal de Québec» (Votre opinion, Vos commentaires, le lundi 9 juillet 2012, p. 17).

************************************************************************

Pourquoi faire simple…, lettre parue dans «Le Devoir», Éditorial, Lettres, le vendredi 1er février 2013, p. A 8.

Lettre aussi parue dans «Le Journal de Montréal» (Votre opinion, le mercredi 30 janvier 2013, p. 23) et «Le Journal de Québec» (Votre opinion, le mercredi 30 janvier 2013, p. 19), avec des variantes.

************************************************************************

Deux écrans, un torticolis, lettre parue dans «Le Journal de Montréal» (Votre opinion, le mardi 26 mars 2013, p. 24) et «Le Journal de Québec» (Votre opinion, le mardi 26 mars 2013, p. 14) aussi parue dans «lapresse.ca» – «Le Soleil», Opinions, Carrefour, le jeudi 28 mars 2013.

************************************************************************

Vos réactions au projet de charte des valeurs québécoises (4) Lettre parue dans «lapresse.ca» («Le Soleil»), Opinions, Carrefour, le lundi 16 septembre 2013.

Lettre aussi parue dans «Le Journal de Montréal» (Votre opinion, le lundi 16 septembre 2013, p. 27) et «Le Journal de Québec» (Votre opinion, le lundi 16 septembre 2013, p. 19), avec des variantes.

************************************************************************

Comme si Windows n’existait pas

Lettre parue dans «Le Journal de Montréal» (Votre opinion, le jeudi 31 octobre 2013, p. 26) et «Le Journal de Québec» (Votre opinion, le jeudi 31 octobre 2013, p. 18).

L’année dernière, la Direction du centre des relations avec la clientèle des pensions alimentaires a fait remplacer à coup de dizaines de milliers de dollars les ordinateurs et les écrans de ses quelque 500 agents. De vrais bijoux, ces écrans, larges à souhait et minces.

Mais voilà que, sitôt installés, on les remplace. Eh oui! Les agents travailleront désormais avec deux petits écrans Dell placés côte à côte. Quelle dépense inutile! Il aurait été beaucoup moins onéreux de montrer aux agents comment bien se servir de Windows.

Quelques-uns ont fait savoir leur mécontentement et ont demandé à ravoir leur unique gros écran. Requête refusée! Les agents ont l’obligation de travailler avec les écrans “bessons”. Certains ont bien été tentés de les placer l’un derrière l’autre, mais n’en ont rien fait. La mesure disciplinaire aurait été immédiate.

Ont suivi les maux de tête, les torticolis et les yeux rougis. Il y a quelque chose de pourri au royaume de Danemark.

Élisa Milan

************************************************************************

De l’importance des lanceurs d’alerte ou signé Élisa Milan, lettre parue dans «Le Journal de Montréal» (Opinions, Lettre ouverte, le jeudi 23 avril 2015, p. 28) et «Le Journal de Québec» (Opinions, Lettre ouverte, le jeudi 23 avril 2015, p. 16).

************************************************************************