.jpg)
Sur les traces de Jean-Michel Basquiat à New York
Ouvrez grand les yeux et les oreilles, le nom de Jean-Michel Basquiat est sur toutes les lèvres. Alors que le Musée des beaux-arts de Montréal lui consacre À plein volume : Basquiat et la musique, une exposition pluridisciplinaire vouée à la place de la musique dans l’œuvre de l’artiste, le Starrett-Lehigh Building de New York présente King Pleasure, une impressionnante rétrospective aussi poignante qu’intimiste.
En novembre dernier, sur invitation de Bombay Sapphire, je me suis rendue dans La Grosse Pomme, sur les traces de l’icône de l’underground new-yorkais des années 1980, afin de mieux connaître la richesse de son héritage et son impact sur la culture populaire contemporaine, près de 35 ans après sa mort.
Des murs de la galerie aux rues animées du East Village, j’ai fait la connaissance d’un artiste créatif et engagé dont l’œuvre est toujours aussi criante d’actualité.
De SAMO à Basquiat
Jean-Michel Basquiat est né à Brooklyn en 1960, d’un père haïtien et d’une mère portoricaine. Dès la fin des années 1970, il couvre les façades de la ville de graffitis énigmatiques sous le pseudonyme SAMO, flanqué de son acolyte Al Diaz. Rapidement, le jeune créateur se fait connaître dans le milieu de l’art new-yorkais, période au cours de laquelle il se lie d’amitié avec nul autre que Andy Warhol et fréquente Madonna, à l’orée de sa carrière. Basquiat se met alors à réaliser des œuvres picturales en solo, ce qui lui confère un succès international. Sa renommée ne cessera de grandir jusqu’à sa mort tragique en 1988.
Emporté par une surdose d’héroïne, Basquiat est aujourd’hui considéré comme l’un des artistes les plus novateurs de la seconde moitié du XXe siècle.
.webp)
Plus pertinent que jamais
En entrant dans le Starrett-Lehigh Building, au coeur du quartier Chelsea, j’apprends que ce sont les sœurs de l’artiste, Lisane et Jeanine, ainsi que leur belle-mère, Nora Fitzpatrick, qui ont mis l’exposition en place en rassemblant de nombreux souvenirs de celui qui a tristement rejoint « le club des 27 » en 1988. Ce sont plus de 200 œuvres (dont certaines jamais encore exposées), souvenirs d’enfance, lettres, photos, poèmes et objets qui sont montrés au public.
À l’heure du mouvement Black Lives Matter, l’œuvre de Basquiat est plus actuelle et frappante que jamais.
Au-delà de ses œuvres, c’est une véritable plongée dans le quotidien du roi du néo-expressionnisme qui est proposée. J’ai été particulièrement frappée par la reconstitution de son atelier du 57 Great Jones Street, ainsi que par sa bicyclette, celle-là même qu’il enfourchait pour se déplacer dans la ville, à une époque où les personnes noires avaient du mal à accoster un taxi en toute quiétude.
.jpg)
À l’heure du mouvement Black Lives Matter, l’œuvre de Jean-Michel Basquiat est plus actuelle et frappante que jamais. Mettant en lumière les violences subies par les communautés afrodescendantes, elle explore avec une profonde lucidité les inégalités sociales basées sur la race ainsi que les représentations médiatiques et culturelles des personnes racisées.
.jpg)
En me promenant dans la galerie, je me fais une réflexion : si je n’avais pas su que les œuvres exposées dataient des années 70 et 80, j’aurais juré que leur création était beaucoup plus récente.
.jpg)
Basquiat et la musique
« Basquiat est l’un des artistes les plus importants de sa génération », affirme d’emblée Mary-Dailey Desmarais, conservatrice en chef au Musée des Beaux-Arts de Montréal et commissaire de À plein volume : Basquiat et la musique. « La musique est une clé de compréhension supplémentaire pour aborder et comprendre son œuvre ».
«Beaucoup d’artistes hip-hop très influents citent Basquiat comme faisant partie intégrante de leurs inspirations»
Dans cette exposition, présentée à Montréal jusqu’au 19 février 2023, les instruments de musique sont omniprésents, tout comme les références à divers genres musicaux comme l’opéra, la musique classique, le jazz, le be-bop, le hip-hop et le rap. Elle porte un regard approfondi sur la carrière de musicien de l’artiste, sur les sons qu’il a traduits en peinture et sur les musicien.ne.s qui l’ont inspiré, de Beethoven aux artistes de la scène musicale new-yorkaise des années 1970 et 1980, en passant par Charlie Parker, Miles Davis et Maria Callas.
« Encore aujourd’hui, beaucoup de musiciens contemporains très influents, notamment des artistes hip-hop, citent Basquiat comme faisant partie intégrante de leurs inspirations », poursuit Mary-Dailey Desmarais en vantant le génie créateur de celui qui est parti beaucoup trop tôt. « C’est le cas de Jay-Z, ASAP Rocky, Wiz Khalifa, Mos Def et d’autres. »
.jpg)
«Les messages [de Basquiat] en lien avec le racisme, la brutalité policière et les inégalités résonnent très fortement aujourd’hui»
Selon la conservatrice et commissaire, ces artistes reconnaissent et admirent l’esprit novateur de Basquiat ainsi que sa propension à célébrer la créativité des personnes noires et afrodescendantes. « [Basquiat] était un produit de son époque tout en étant profondément avant-gardiste. Ses messages en lien avec la justice sociale, le racisme, la brutalité policière et les inégalités résonnent très fortement aujourd’hui dans notre époque ”Post Georges Floyd” ».
Ce sont d’ailleurs les meurtres de ce dernier et de Breonna Taylor qui ont été l’élément déclencheur de la tenue de l’exposition King Pleasure, que j’ai eu le bonheur de visiter à Manhattan.
« Jeanine et moi [Lisane Basquiat], on s’est dit que c’était le bon moment pour répondre à l’intérêt que les gens manifestaient depuis des années à l’égard de Jean-Michel. C’était une période sombre et on a réalisé à quel point son art résonnait par rapport à ce qui se passait dans le monde. » a récemment confié Lisane Basquiat à La Presse.
.jpg)
Cheers!
En me rendant à New York afin de me plonger tête première dans l’univers de Basquiat, j’ai eu la chance de parcourir le East Village, guidée par les lieux mythiques de la vie de l’artiste. Son appartement au 101 Cosby Street, où il a vécu avec Madonna, son premier atelier sur Prince Street, maintenant transformé en boutique Miu Miu, son dernier atelier sur Great Jones Street, là même il a perdu la vie, et les rues de NoHo qu’il arpentait à pied et à vélo : je me sens transportée dans un Manhattan révolu.
.jpg)
Je prends alors conscience qu’au-delà de son influence sur les arts visuels et la musique, l’œuvre de Basquiat transcende les générations et les frontières de la culture populaire.
Les adeptes remarqueront que les symboles emblématiques souvent associés à son travail y figurent : la couronne, l’oiseau, et le crâne.
En effet, l’équipe de Bombay Sapphire s’est sentie inspirée par l’icône culturelle au point de lui consacrer une bouteille de collection, créée en collaboration avec la succession de Jean-Michel Basquiat. « C’est une manière de diffuser la créativité de Basquiat et de sortir ses œuvres des musées et des galeries », m’explique James Fisher, Senior Brand Manager pour le producteur de gin.
.jpg)
Sur la bouteille figure l’une des premières œuvres de Basquiat, son Untitled (L.A Painting). Présenté une seule fois au public dans le cadre de la deuxième exposition de cet artiste prolifique, le chef-d’œuvre est influencé par le calme de Venice Beach, en Californie, où il aimait se recueillir, loin des distractions incessantes de « La ville qui ne dort jamais ».
Les adeptes de l’univers de l’artiste remarqueront que les symboles emblématiques souvent associés à son travail y figurent : la couronne, l’oiseau, la pièce de monnaie et le crâne.
.jpg)
Pour clore mon séjour immersif, je me suis rendue au cimetière de Green-Wood, situé dans l’ouest de Brooklyn. Une fois devant sa tombe, couverte de dessins, de fleurs, de crayons et de petits pinceaux, je me suis dit que, bien que Basquiat nous ait quittés beaucoup trop jeune, sa créativité, sa fougue et son engagement lui survivent et continueront assurément d’en inspirer plus d’un.e.
.jpg)