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Avoir besoin de silence. Autour et dedans de soi. Ça m’est arrivé dernièrement. Le goût de caverner, de me trouver une boîte dans laquelle me cacher ou encore mieux, de pouvoir me replier dans le plus fond de moé, keke part dans le coin des talons ou le creux du ventre. Pis y juste rien faire. Pas de “to-do”, de “to-read” ni même de “to-fun”. Juste: sweet fuck all. À l’abri. T’sais.
De toute. Surtout du bruit ambiant, notamment celui que je suis capable de produire. En pas, mots, respirations, bruissements de vêtements, cliquetis de touches enfoncées sul clavier, de craie sul tableau, même. L’existence, ma présence, sans la fanfare qui vient avec. L’être en mode tayeule.
C’est peut-être parce que novembre, peut-être parce que fatigue, peut-être parce que des événements. Il y a le dehors, aussi, qui est heurtant, ces temps-ci. Pas celui de la pluie et de la neige, mais celui que je regarde, ben impuissante, défiler et contenu dans mes écrans. Avec ses airs austères (tudum tsss), ses airs de violence ordinaire, ces statistiques qui ont désormais des visages, beaucoup de visages, pleins de visages. J’ai comme pas su, comme pas pu faire autre chose que de baisser les yeux, baisser les bras.
J’ai eu le réflexe de crier, mais les mots sont restés pognés en tas. Sont encore là, un peu de travers, dans ma gorge. Incapables de s’articuler. Je regarde à terre et j’ai le goût de m’y enfoncer, dans le à terre. Faire le minimum. Espérer que le corps suive. Que la tête se dise que c’est ben correct de se taire, s’exiler, que le bonheur est dans le respire pis rien d’autre parce que ça sert à quoi, de toute manière, toute le autre. Que le sens… ark… ne plus penser à ça, le sens. Fuck le sens. Nécessairement, rendu là, le « fuck toute », on le frôle. Les citations sur fond de champ fleuri lèvent [plus] le cœur que d’habitude. Le doux des chatons a l’air suspect. Le quelqu’un qui se risque à te parler de ta « plage intérieur » se mérite un combo « yeux en l’air et facepalm » pendant qu’il t’en parle. La petite gêne aussi a crissé le camp. Et c’est vraiment là, à bout de politesse minimale que je me suis dit que fallait que je silence de toute, que j’absence. Métaphoriquement s’entend.
L’affaire, c’est que ce n’est pas une chose facile. Devenir ermite, se couper des autres, fermer ce cellulaire qui fait office de prolongement de la main, ne pas être notifié, se découdre de ce qui est. Pour ne plus rien ressentir, voir, entendre. Dire.
C’est que. Y’a la vie. Qui demande qu’on s’y agite. La vie qui ne s’arrête pas, elle. Je n’en ai pas été surprise, là, mais j’en ai pris la mesure. Ça ne se met pas sur pause. Je peux ben me cacher dans mon lit, sous la couette et ne pas bouger, même avec des efforts, je ne peux pas me calicer de ce qui est. Je ne peux pas arrêter le papote incessant que j’ai dans la tête. Je ne peux pas juste errer à côté de mes p’tits qui se la vivent, eux, la vie.
Les p’tits qui crient.
Les p’tits dans la neige.
Le p’tit, fier de lui, de son premier bulletin à vie. Même s’il fait pas tout parfait. Juste content de ses dessins, ses bricolages, ses lettres encore tremblantes.
Le chaud du corps en boule de ma fille contre le mien, ce matin frette. Sa petite main sur ma joue. Ses grands yeux dans les miens. Son « Allô, ma maman. ». Toute le doux du monde, juste là. Pile là. Toute le doux du monde qui me disait que c’est pas dans le repli, dans le creux, dans le vide, que je dois me garrocher.
Dans le tuseul, le ark fait juste pulser plus fort parce que y’a rien pour le tempérer. C’est un cocon que ça prend, en fait. Un espace rembourré, moelleux. Un espace qui se gosse avec les gens, pas sans eux, pas loin d’eux. Le chaud, c’est collé sul cœur, dans le peau à peau qu’on le ressent. Et c’est facile quand ça va vite, quand tout est urgence, quand ça spin, de penser qu’on n’a pas besoin de chaud, qu’on peut faire ça tuseul, se calmer, se reprendre le goût de la vie. On s’aide pas tant, se faisant. Ça prend des mains qui pressent les nôtres, des présences qui sunshinent notre gris, des voix qui nous « doux » des mots. Et là, nécessairement, on réciproque le chaud. Et on se revient. Et on reparle. Et on se meut.
Et on se lève pour aller faire un bol de céréales à sa fille, on lui coupe son melon d’eau en cœur parce qu’elle aime ça les cœurs. On en fera aussi au p’tit quand il se lèvera, plus tard. On en dessinera aussi sur nos trois poignets respectifs, avant de partir, pour « quand on s’ennuie ». Et on prendra le temps d’en envoyer des virtuels à ces gens qui nous doux la vie. Qu’ils le sachent qu’on les cœur. En ta’. Qu’ils nous ont aidé à nous lever, ce matin.
Illustration: Cath Laporte
J’existe aussi là : Les p’tits pis moé, pis là.
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