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Ce texte est extrait du Spécial ROUX, en kiosque dès maintenant ou disponible en version PDF sur la Boutique Urbania
On a tout dit sur le fantasme des rousses. On a aussi colporté mille mensonges odieux à leur sujet, alors qu’au fond, c’est la fascination qu’elles exercent, parfois bien malgré elles, qui rend les hommes fous, et parfois cruels.
J’ai failli y laisser ma peau à force de courir après la leur. Son odeur typée, indéfinissable. Mais surtout sa blancheur laiteuse, parfois translucide, qui laisse voir le complexe réseau des vaisseaux qui courent sous l’épiderme.
Assis à côté de l’une d’elles à l’école, plus rien n’existait que les taches sur ses bras. Un visage constellé, jusqu’à former une tempête de son, me ravissait. Puis il y avait les cheveux… Mais même tirant sur le blond ou le châtain, ils me convenaient. À la limite, et à la condition d’en posséder toutes les autres caractéristiques (surtout les picots), la fausse rousse trouvait grâce à mes yeux. J’avais l’obsession inclusive.
J’en étais tellement dingue que j’ai passé une partie de ma vie à courir après les rousses, implorant mes amis de me présenter toutes celles qu’ils connaissaient, découvrant une liste inespérée de qualités à des filles qui, si elles avaient eu les cheveux d’une autre couleur, ne m’auraient jamais même vaguement intéressé. La rousseur agissait comme du glutamate monosodique sur mes goûts.
Ce n’était même pas un truc de cul. Je ne bandais pas comme un fou sur la touffe rousse, je ne voulais même pas nécessairement coucher avec elles. Toucher leur peau ou même leur parler pouvait parfois me suffire. C’était un désir qui n’avait pas prise dans le réel. Une déviance ? Ça se peut.
Je n’ai jamais compris pourquoi exactement. Ce n’est pas nouveau, et dans l’histoire de l’humanité, les rousses furent l’objet d’un si grand et impétueux désir qu’elles ont souvent été associées au péché (à commencer par Lilith, la première femme d’Adam), à la sorcellerie ou à la prostitution (la légende veut que Marie Madeleine fut rousse, ce qui est aussi peu probable qu’un Christ blond aux yeux bleus cachés derrière des RayBan).
Mais comme se plaisaient à dire nos pieux ancêtres et Martine St-Clair : désir égale danger. Comme ils avaient raison !
Pour toi, j’ai marché à genoux
Dans cette quête folle, je me suis perdu. Pour une rousse, j’aurais rampé des kilomètres dans du gravier concassé ¾, j’aurais assisté à un concert de Patrick Bruel en miaulant comme un chaton entre les chansons, et, dans les faits, je suis allé jusqu’à voir Dances with Wolves avec Kevin Costner pour en sortir et faire semblant d’avoir aimé ça. Je me souviens encore de spasmes incontrôlables et d’envies de pouffer de rire devant le ridicule du film. Mais la simple vue de la main tachetée sur l’accoudoir du siège et de ces yeux verts et humides dans lesquels se reflétaient les images suffisait à me rappeler le sérieux de mon entreprise, et j’en oubliais jusqu’à l’onctueux sirop des dialogues qui me coulait dans les oreilles.
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