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Scanner notre vie (parce que l’avenir passe par l’imprimante 3D)

Portrait de Jean-Philippe Carmona en collaboration avec Desjardins

Par
Camille Dauphinais-Pelletier
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C’est grâce à Desjardins que le Spécial extraordinaire 2017 du magazine URBANIA est fabriqué. Visiblement, ils choisissent bien leurs protégés! On leur a donc demandé qui était leur entrepreneur coup de cœur de 2017. La réponse? «Vous devez absolument rencontrer Jean-Philippe Carmona.» On l’a fait. Et on n’a pas été déçu. Portrait de celui pour qui l’expression «chaque client est unique» est loin d’être de la théorie.

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J’ai toujours eu de la misère à trouver des lunettes qui me vont bien. Forme de la monture, couleur, style général… C’est comme si rien n’avait été conçu pour aller sur mon visage (qui n’est pourtant pas si problématique, OK?). Je me résigne donc à payer chaque mois pour des verres de contact en espérant vaguement qu’un jour, je tomberai sur LA paire qui m’ira bien.

Jean-Philippe Carmona, jeune ingénieur de 26 ans, a le même problème, mais il m’en parle avec le sourire en coin du gars qui sait ce qui s’en vient. C’est que le cofondateur de l’entreprise Caboma travaille justement à trouver des solutions pour des gens qui, comme moi, cherchent une approche plus personnalisée. «Imagine que tu peux faire un scan numérique en trois dimensions de ta tête avec ton téléphone intelligent, l’importer sur le site Internet d’un fabricant de lunettes et designer toi-même ta monture, en voyant en temps réel le résultat. Puis, une fois que tu as fini, tu passes ta commande, une imprimante 3D fabrique les lunettes, et tu les reçois chez toi.»

Dans deux générations de [cellulaires], il va y avoir des scanners directement intégrés dans les téléphones.

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Avoir des lunettes parfaites sans avoir à interagir avec un autre être humain? Oui, je suis capable d’imaginer ça… et ça me donne le goût. On peut deviner la suite : vous voulez changer vos armoires? Scannez votre cuisine! Besoin d’un casque de gardien de but qui protégera bien fiston? Scannez sa tête!

«Dans deux générations de [cellulaires], il va y avoir des scanners directement intégrés dans les téléphones. C’est un peu ce qui s’est passé avec les appareils photo qui ont joint les téléphones: on prend en photo notre environnement et on le partage sur les réseaux sociaux. Certaines entreprises ont tiré avantage de ça. Lorsqu’on va être capable de scanner son environnement en tout temps, ça va vraiment envahir la sphère industrielle», indique le jeune entrepreneur.

Depuis une centaine d’années, on s’efforce de faire de la fabrication en série…

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Je résume: les scanners numériques devraient bientôt se retrouver dans toutes les poches, et les imprimantes 3D sont de plus en plus performantes. Avec Caboma, Jean-Philippe Carmona veut créer un pont efficace entre les deux technologies. «C’est l’élément manquant. Comment, avec des algorithmes, peut-on permettre à des gens de personnaliser des objets simplement? À l’heure actuelle, n’importe quel ingénieur peut prendre ton scan, l’interpréter et faire un produit, mais ça prend des heures… et ça prend un ingénieur. On veut automatiser le design.»

De la personnalisation… de masse?

Il me semble que «personnalisation» et «masse» sont deux mots qui vont mal ensemble. Jean-Philippe m’explique.

«Depuis une centaine d’années, on s’efforce de faire de la fabrication en série. On veut répliquer des centaines de milliers de fois le même produit, le plus vite et le plus économiquement possible.»

Ce qui mène à la standardisation: alors que tous les vêtements étaient auparavant faits sur mesure, maintenant, on a plutôt accès à un éventail de tailles. «Je porte du 32 et ça me fait très bien. Mais dans certains domaines, la standardisation se fait au détriment du consommateur. C’est tout particulièrement vrai dans le secteur médical.» En effet, s’il est fatigant de porter un chandail mal coupé, imaginons ce que ça peut faire, par exemple, de mettre chaque jour un corset orthopédique inconfortable…

On est capable de faire des produits sur mesure sans que ce soit fait à la main.

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Le premier succès commercial de Caboma est d’ailleurs une orthèse de genou, un produit mis au point en partenariat avec le réseau de cliniques Médicus.

«On est capable de faire des produits sur mesure sans que ce soit fait à la main. On peut vendre des centaines d’orthèses par mois ; ce serait impossible sans l’automatisation. Quand tu lances une machine d’impression 3D, elle peut aligner par exemple 50 montres différentes l’une de l’autre, et ça ne sera pas plus long de faire 50 montres uniques que 50 montres pareilles.»

Faut pas traîner

Caboma existe depuis à peine plus de deux ans. Jean-Philippe Carmona et ses deux associés, Jonathan Borduas et Julien Arnaud, sont tous jeunes. Ça ne les empêche pas de posséder la plus grande chaîne de production par impression 3D au Canada et de faire affaire avec de gros clients partout sur le continent (pensons notamment à la Défense américaine et aux Forces canadiennes)…

Il faut dire que Jean-Philippe n’a pas niaisé : pendant qu’il complétait sa maîtrise-recherche en génie aéronautique à Polytechnique, il a profité de sa participation au sein d’un groupe de recherche et développement chez Bombardier pour acquérir plein de connaissances sur l’impression 3D, puis il a démarré une entreprise de consultation, devenue Caboma.

On a déjà hâte de scanner notre vie.

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Le jeune entrepreneur a eu une autre bonne idée, l’an dernier, en soumettant sa candidature au concours Adopte inc., qui propose un coup de pouce financier et stratégique à la relève entrepreneuriale. Il a été «adopté» en novembre par nul autre que Guy Cormier, président et chef de la direction du Mouvement Desjardins. En plus d’avoir reçu une bourse de 24 000 $, il peut maintenant compter sur le mentorat — «très rapproché, pas juste devant la caméra» — de M. Cormier.

C’est une bonne chose, parce que Caboma veut relever un défi de taille. «On n’est pas les seuls dans cette course-là, c’est une course contre la montre: qui va arriver le premier et sortir la meilleure application? Je dis ça en toute humilité, mais grâce à ce qu’on a fait du côté des orthèses plantaires, on est définitivement en avance sur tout le monde là-dessus.»

De notre côté, on a déjà hâte de scanner notre vie.

Desjardins Entreprises contribue une fois de plus à inspirer et supporter les entrepreneurs d’ici.

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