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Santé mentale : quand l’assureur a le dernier mot sur votre dépression

Se faire refuser son assurance invalidité, même avec son médecin et son psy à ses côtés.

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Montréal, Mardi le 26 janvier 2021.

Père de trois enfants, en 2018 j’ai survécu à une dépression qui m’a mené à une séparation et une tentative de suicide.

Depuis, je travaille sans relâche pour ressouder les morceaux cassés. À l’aide de médicaments, de thérapie et de course à pied, je me rebâtis une vie sur des assises plus solides pour mes enfants et moi. Avec la thérapie, on arrive à prévenir le plus possible les mécanismes de la maladie quand on peut tout d’abord la diagnostiquer, puis réussir à canaliser le mieux possible ses troubles précurseurs.

Malheureusement, il arrive parfois que les cycles de la dépression et des déclencheurs extérieurs nous replongent dans certaines voies obscures sans notre consentement.

Je reconnais tout de suite les signaux et fais appel à de l’aide.

Au début du mois de décembre dernier, des crises d’angoisses ressurgissent. Certains déclencheurs comme un changement de lieu de travail, des soucis financiers et familiaux m’ont rapidement replongé dans des lieux sombres qui ne m’étaient pas inconnus. Littéralement tétanisé par un relent dépressif, je reconnais tout de suite les signaux et fais appel à de l’aide.

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Au constat de mon état, mon médecin me met immédiatement en arrêt de travail pour un mois. J’ai des rendez-vous d’urgence avec mon psychothérapeute (PhD) qui s’inquiète de la spirale causée en grande partie par mon travail. Heureusement, il y a aussi ma blonde qui me soutient dans cette crise.

Quand on a ce genre d’état qui refait surface, croyez-moi on a pas toujours envie d’en parler, surtout quand ce n’est pas la première fois. La première fois que ça nous arrive, tout le monde est présent, fier de notre résilience et de notre remontée spectaculaire. Mais quand il y a rechute un an plus tard, puis une autre fois une autre année plus tard, soit en décembre dernier, ce n’est plus aux amis à qui on demande le soutient mais à des professionnels. Ce n’est pas la faute des proches, c’est nous qui sommes envahis d’un sentiment de honte. C’est le propre de cette maladie. Heureusement, j’ai la très grande chance d’avoir cette expertise professionnelle qui m’environne, ce qui n’est pas donné à tous. Mais ma situation n’en est pas moins précaire.

Vingt pages pour expliquer que j’avais besoin d’un break d’un mois pour me remettre sur pied!

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Mon médecin et mon psychologue me mettent donc en arrêt de travail obligatoire. Chacun remplit un formulaire destiné à l’employeur et à l’assureur qui les représente. Cette cotisation que je paye depuis 15 ans dans cette grosse entreprise me permet d’avoir 70% de mon salaire dans une situation comme la mienne. Mais trois semaines plus tard, la compagnie d’assurance refuse cette première demande stipulant qu’il manquait de l’information de la part de mon médecin et psychothérapeute. Soit. Mon médecin et particulièrement mon psychologue se sont donc empressés de renvoyer un dossier clinique complet d’une vingtaine de pages! Dans les deux cas, ils ont écrit, entre autres choses : tendances suicidaires, détresse sévère, ahnédonie, insomnies, troubles anxieux, manque de concentration, etc.

Vingt pages pour expliquer que j’avais besoin d’un break d’un mois pour me remettre sur pied!

On ne peut donc pas conclure à une invalidité complète reliée à une cause médicale.

J’ouvre mes courriels hier matin:

Bonjour,

Le comité d’appel maintient le non support. Intention finale envoyée à votre syndicat. Le dossier doit contenir suffisamment d’informations telles que des précisions sur la gravité des symptômes, des précisions sur l’effet des symptômes sur le niveau fonctionnel, des précisions sur la déficience cognitive et physique empêchant d’exercer le travail en toute sécurité, des précisions sur la réponse au traitement et des précisions sur le niveau de fonctionnement en général. On ne peut donc pas conclure à une invalidité complète reliée à une cause médicale.

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Mme Untel (Case manager/conseillère responsable du dossier).

Quand les préjugés sur la santé mentale commencent par nos institutions, comment voulez-vous que l’on fasse confiance à ses véritables avancées?

Anonyme pour des raisons de confidentialités et de… santé mentale.

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Si vous avez besoin d’aide ou si un de vos proches a besoin de soutien:

Ligne québécoise de prévention du suicide : 1-866-APPELLE (277-3553)