.jpg)
Jusque y’a deux minutes, j’étais en train de rédiger une grosse bouillasse liant la claque reçu par Anderson Cooper au «cyberharcèlement» associé aux «memes» Internet à la Scumbag Steve («ze» Star War Kid des derniers jours). Le meilleur bout du texte, c’était une blague sur Antoine Gratton, genre. Du grand n’importe quoi, en effet.
J’ai donc pris une pause. Direction : Cyberpresse. J’suis tombé sur un billet signé par Marie-Claude Lortie, publié ce mercredi, et qui aborde « Portlandia », une nouvelle série sur IFC taquinant les us et coutumes « alternatifs » des années 90. Prémisse plutôt simple qui s’explique même en une chanson :
Lortie, lie ça aux « hipsters ». Tiens donc, ça me rappelle un truc…
Quelques jours auparavant, on retrouvait une critique gastronomique de Lortie sur le Magpie, une pizzéria située dans le Mile-End. On pouvait notamment y lire…
«On attend. Nos voisins, qui sont arrivés après nous, ont déjà leurs plats. Peut-être ne sommes-nous pas assez hipsters? Après tout, on est au coeur de leur quartier de prédilection et tout le monde aux alentours semble s’être donné le mot: chemises à carreaux, tuque, Canada Goose…Et tout, dans ce restaurant anti-prétention, correspond à l’esthétique rétro-recyclée, anti-clinquant de cette jeune population barbue, tatouée, artistique, bio et créative. »
En décembre, elle livrait un autre billet sur le numéro «Hipster» du Courrier International. Puis, en réaction aux commentaires, elle relançait ses lecteurs en leur demandant quelle sera la prochaine mutation du fameux « hipster ». Deux mois auparavant, c’était sa collègue Sylvie St-Jacques qui rédigeait un article sur le sujet : Ne tirez pas sur le hipster.
‘Scusez-moi, mais on s’en calisse un peu, non?
Il me semble que «l’intérêt» des grands médias pour les hipsters est pas mal futile. Ce n’est pas comme si c’était un phénomène récent (le terme daterait des années 40 selon Wikipédia… je sais que ce n’est pas une super référence, mais allez-vous vraiment me faire chier parce que je n’ai pas cherché «hipster» dans l’Encyclopedia Britannica? Come on!) et ce n’est pas comme si le lectorat allait soudainement (insérez ici un cliché «hipster» de votre choix. Ex : s’acheter des grosses barniques) à la lecture de ces textes. C’est un peu comme si on tentait de cerner, souvent dans un feuillet ou deux, l’essence d’un épicurien (pour moi, c’est du monde qui démarre des blogues de bouffe… ou des échangistes). C’est aussi inutile que réducteur.
Tout ça, c’est la faute à Google et à Wikipédia. Oui, oui!
On le sait, les médias, tout comme les hipsters et le métier de journaliste, sont en pleine mutation. D’ailleurs, hier, on dévoilait finalement le «Daily», le premier quotidien pour iPad. On tentait aussi d’actualiser la définition du «scab» à l’Assemblée nationale.
…
Ça à l’air anodin comme ça, mais ces liens et ces mentions de trucs «dans l’air du temps», c’est du miel pour Google. C’est bon pour les statistiques d’un site, t’sais. C’est bon pour les annonceurs. C’est donc bon pour les chèques de paie. Mieux encore, ces «tendances» sont répertoriées et quantifiées. Plus d’excuses! La belle affaire!
Comme le terme est de plus en plus présent dans les médias, il risque d’attirer davantage de visiteurs que, disons, «pantalon en fortrel» ou «Combien d’oreillers Antoine Gratton a-t-il salopé avec son hostie d’étoile?». Tel l’Ourobos, les médias bouffent leur propre queue en abordant des sujets tout simplement parce qu’ils sont «populaires» ou parce que leur site ou leur magazine est «dans le coup». Bref, toute cette démarche relance encore plus loin le sujet dans la zeitgeist, sans toutefois nécessairement l’approfondir ou le rendre plus intéressant.
En creusant un peu plus (dans ma tête et dans mon drink, en tout cas), je crois aussi que ce «désir» qu’on a de définir ces «tendances» provient d’une certaine soif de savoir qu’on ne peut plus étancher. Non seulement on peut «Googler» ce que l’on veut, mais on peut aussi définir ce «n’importe quoi» dans Wikipédia.
Y’a quelques jours, Something Awful (pas mal mon site préféré… après Urbania et BangBangBlog, bien sûr… *wink, wink*) mettait en ligne une compilation de fiches Wikipédia douteuses allant de la «revue des différentes positions pour faire « kekka» » à «la liste des personnalités YouTube les plus connues». Du who cares? de haut niveau, en effet.
À une époque ou on peut crier au monde entier sa position précise (via Foursquare) ou répondre à des questions extrêmement intimes et qui sont souvent posées par des inconnus (via Formspring), on constate que les barrières tombent. J’imagine (et j’espère) que Diderot aurait battu, à grands coups de gants de duel, le carabin qui lui aurait proposé de faire une liste de personnalités YouTube (ou, dans son cas, de ménestrels particulièrement oubliables). Après tout, a-t-on réellement besoin de cerner, définir et étiqueter le fameux «hipster»? Est-ce vraiment pertinent? Tout comme ce billet de blogue, je ne crois pas…
Pis est-ce qu’il y a vraiment des hipsters qui portent des manteaux Canada Goose ?!
PS : Vendredi, je me la joue Dominic Arpin (non, non, je ne vais pas écrire un livre sur les réseaux sociaux). Je vous proposerai un «best of» de ce que j’ai lu, vu et écouté cette semaine. Bref, un ‘tit billet idéal pour digérer ton lunch du midi.