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Mes hommages.
Alors. Samedi dernier, je me suis, comme bon nombre de publieux de sparages, abandonnée à caresser les fleurs du tapis de la salle Wilfrid-Pelletier pour me faire vibrer les osselets au rythme de l’opéra.
L’OPÉRA.
La simple évocation du terme me donnait le frisson (le frisson positif. Passionné. Menaçant au niveau du buste).
Avant même d’avoir ouvert mon nouveau paquet de bas de nylon – ne se présente pas à l’opéra (ni même l’opérette) qui veut, jambe dénudée – je me projetais déjà, accroupie sur les rebords coussinés de ma loge et zoomies-lorgnettes dans ma main tremblante, à m’éponger le pleur et le tourbillon émotionnel d’un drame japonais chanté.
C’est que le souvenir des opéras absorbés, étudiés et décortiqués dans mes jeunes années de pianiste sotte était si pur. Si idéal. Des airs déchirants. Des organes augustes. Et tout ce drame. Ces fiers baquets vêtus d’étoffes précieuses et ces glaives brandis en fa dièse.
Le plan de pauvre. Je te jure.
Loin de moi l’idée de te froisser l’idylle-opéra, mais Jésus Marie Joseph, et je déteste l’admettre, c’était terrible.
TERRIBLE.
Dès les premières minutes, le laborieux combat pour me convaincre à quel point tout ceci était merveilleux avait débuté. Le scénario. Le décor. Le grandiose. Chaque note, chaque enjambée chorégraphique dégageait cette odeur de boules à mites qui n’ont pas su préserver la robe de noces de mamie comme en 40.
C’est qu’il s’en passait, des affaires:
“Voyez comme les portes de la maison glissent “
“Je me déplace à l’instant sur cette scène”
“Non monsieur, n’avancez pas. Ciel, vous avancez toujours. Je vous vois, vous avancez sur cette scèèèèène”
Les sous-titres, comme Laurent Paquin, détruisaient toute possibilité d’enchantement. Le charme fou de l’opéra résidait-il jadis dans le fait de ne pas comprendre un traitre pet de ce qu’on me chantait?
Peut-être.
MAIS CHAQUE DAMNÉE ACTION FAISAIT L’OBJET D’UN COUPLET. Du toussotement au grand écart, en passant par le suicide et l’autocueillette de fleurs de cerisier, le moindre geste était décrit-chanté pour guider le spectateur du début du siècle qui, semble-t-il, avait besoin d’être accompagné dans les dédales d’une histoire simple simple simple.
Étais-je à ce point bête pour ne pas capter toute la beauté que moult glottes se tuaient pourtant à me transmettre 100 mètres plus bas?
Sans doute. Et chaque minute qui passait me culpabilisait davantage.
Être déçue par un opéra, ça se peut. C’est même pas plus grave – ni intéressant – que ça. Mais ce qui me tenaille la jugulaire, c’est que tant de gens, TANT DE GENS QUE J’AIME avaient vanté les mérites du happening musical:
“Émue aux larmes”
“Allez voir ça, la Fallope va vous fleurir”
“Puccini is the new black”
Francine Ruel y aurait assisté que le Slava Snow Show aurait pris toute qu’un sucker punch su’l casseau.
Femme de terrain, j’ai aussi observé les spectateurs qui m’entouraient. DES GENS DORMAIENT (et du sommeil du juste).
D’autres, affichaient ma moue désintéressée, pores au bord de l’endormitoir. Certains appréciaient sans doute, mais cet étrange sentiment qu’on était après assister à l’affaire la plus plate depuis la fois où Messmer a transformé Jean-François Baril en poule persistait.
Mais oh! que tout le monde s’est vite empressé de nier au standing ovation. Dans le hall, en sortant, ça se flattait le costume trois-pièces et ça s’appréciait les deux heures et quart DE PUR GÉNIE qui venaient de passer en se trémoussant de complaisance et de ravissement factice.
Comme si c’était interdit de se révéler la gorgée sûre. De formuler à voix haute que Toqué!, c’est pas tant le char.
Bien évidemment, tout ça est, me frotterez-vous les ouïes, fort subjectif.
J’aurais tout de même apprécié que quelqu’un, parce que je sais que vous êtes plusieurs, ose dire ou même écrire: “Madama Butterfly, c’était pas l’cul”. Que mes espoirs, tout comme le furent mes kleenex, soient saufs.
Mais il fait si bon se publier la stupéfaction du David Altmejd, selfie à l’appui. De se tagger dans le dernier Almodovar et d’abreuver autrui aux mamelles de la spaciosité de la moindre de ses sorties culturelles.
Sache que ce faisant, TU M’ÉGARES, SUSIE.
Et pour ça, je te maudis.
(de grâce, ne me honnis pas. Anéwé, à te voir aller, tu écrirais certes que je suis fantastique, lumineuse et, à n’en pas douter, le nouveau Juillet de Marie Laberge)
Allez. La bise.
PS TENDRESSE :: C’est la plus belle chose que j’ai vue de mâââââ vie.