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Playlist LGBTQ2IA+: les meilleurs nouveaux hymnes de 2018

Une liste qui inclut des chansons de SOPHIE à Janelle Monáe en passant par Safia Nolin.

Par
Estelle Grignon
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Chaque fois que j’ai l’impression que la société évolue dans son acceptation de la diversité, je tombe sur des commentaires Facebook d’un média d’information et mes espoirs tombent en fumée. Mais au moins, comme toujours, la musique est là pour rattraper la balle au bon.

En 2018, bon nombre d’artistes queers ont su briller de 1000 feux et ça fait du bien. C’est vrai que c’est cool d’entendre Lady Gaga ou Sara Bareilles nous rassurer, dire qu’on est braves, etc. Mais d’avoir un hymne LGBTQ+ porté par quelqu’un de la communauté, ça vient nous toucher d’une façon inimaginable. Surtout après une année aussi difficile où l’intolérance est encore partie prenante.

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Je vous ramène au 15 juin dernier, un peu après 4 :00 du matin. Le premier album studio de SOPHIE n’a que quelques heures. Et honnêtement, ça faisait longtemps que je n’avais pas attendu un album avec autant d’impatience et le timing aurait difficilement pu être meilleur.

Transition

Oil Of Every Pearl’s Un-Insides parait huit mois après que la productrice transgenre britannique ait fait son coming out. De mon côté, ça fait alors trois semaines que mes parents savent que je suis trans et exactement douze jours que j’ai changé mon nom sur Facebook pour « Estelle ». La vie n’est honnêtement pas trop difficile pour l’instant. Tout le monde a bien pris ça dans mon entourage. C’est juste que je ne sais pas ce qui s’en vient et je ne connais personne d’autre qui passe au travers de ça.

J’écoute l’album dans mon lit avec mes écouteurs pendant que le soleil commence à inonder ma chambre sous-louée du plateau par ma fenêtre sans rideaux. J’admirais déjà le travail de SOPHIE depuis 2013, mais là, on est à un autre niveau. Sa musique électronique qui étire les conventions de la pop dans toutes les directions porte maintenant une dimension différente. En deuxième moitié de disque, la pièce Pretending est la seule chanson instrumentale. Celle-ci sonne comme le test de son THX qui joue dans les haut-parleurs de cinéma avant un film, mais étirée sur six minutes. Un grand crescendo qui laisse présager que le meilleur est encore à venir sur l’album. Comme de fait, la prochaine chanson commence.

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Je comprends rapidement qu’Immaterial sera tatouée dans mes oreilles pour le restant de mes jours. Les paroles de SOPHIE, filtrées par la voix ultra modifiée de la Montréalaise Cecil Believe, deviennent un nouveau mantra.

« But I could be anything I want/And no matter where I go
You’ll always be here in my heart
I don’t even have to explain/Just leave me alone now
I can’t be held down, I can’t be held down »

J’ai de la chance d’avoir des amis qui sont toujours là pour moi, d’avoir une famille compréhensive. Mais, tous les alliés du monde ne peuvent pas combattre ma dysphorie de genre comme SOPHIE qui me lance ce message. Aucun moment ne m’a fait me sentir bien dans ma peau comme lorsqu’elle a joué cette chanson lors de son court passage à Pop Montréal en fin septembre.

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C’est dans cet esprit que j’ai eu la motivation de demander à URBANIA de publier une liste des hymnes les plus forts de 2018 faits par des membres de l’acronyme. Parce que oui, les nouvelles n’étaient pas toujours bonnes et nos droits ont été maintes fois bafoués ici comme ailleurs. Mais au moins, ces artistes injectent un peu d’espoir et beaucoup de fierté. De la célébration pansexuelle de Janelle Monáe au french super gai de MNEK en passant par l’exploration de genre de Chris(tine) and the Queens et à la première chanson de Cleo Tucker de Girlpool avec sa voix nouvellement grave, il y a de tout.

Le Québec, un peu plus timide

En fait, de tout, oui et non. Malgré toute la bonne volonté du monde, trouver des hymnes queers faites par des artistes francophones queers d’ici, ce n’est pas aussi évident qu’à l’international. Est-ce que le Québec est plus frileux à ce genre de discours?

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Il y a peu de précédents. Un nouvel artiste qui chante ouvertement son arc-en-ciel risque d’être étiqueté pour le reste de sa carrière. Et puis bon, être gai, lesbienne, bi, pan, trans, asexuel.le, non-binaire, ce n’est au final qu’une parcelle de notre identité. Les artistes peuvent bien chanter sur ce qu’ils veulent, comme ils le veulent. Ce n’est pas tout le monde qui veut devenir, tout d’un coup, une icône gaie.

On peut aussi penser à un artiste comme Hubert Lenoir qui oui, joue avec les notions de genre comme pas un sur la scène pop nationale, avec une flamboyance et une irrévérence rafraîchissantes. Mais le paon de Québec préfère pour différentes raisons ne pas se coller d’étiquette et on respecte ça. À défaut de s’identifier par une lettre du LGBTQ+ ou d’écrire des paroles sur ce thème, il reste un modèle pour quiconque se sent coincé dans une identité de gars straight et qui veut s’amuser un peu, peu importe son orientation.

Ainsi, la ballade bilingue Lesbian Break-Up Song de Safia Nolin est peut-être le plus proche d’une chanson québécoise en français que j’ai pu trouver pour 2018 (le projet anglophone montréalais The Gays est également du lot). Ça ne donne pas autant envie de danser que la musique de Troye Sivan ou cupcaKKe, mais des fois, ça fait du bien aussi.

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